Neuf ans après le début du contentieux judiciaire opposant le marchand d’art Yves Bouvier et le président de l’AS Monaco Dmitry Rybolovlev, quant à la vente de tableaux de maître, le deuxième volet de cette affaire tentaculaire a trouvé son épilogue au tribunal correctionnel de Monaco ce mardi après-midi.
Convoquée devant le tribunal correctionnel le mardi 12 mars, Me Tetiana Bersheda avait demandé que l’affaire soit examinée à huis clos. Si rien n’a filtré de l’audience, celle qui selon nos informations est toujours une conseil de Dmitry Rybolovlev dans d’autres dossiers a finalement été relaxée, ce mardi, des accusations d’atteinte à la vie privée et familiale qui pesaient sur elle depuis 2015.
Quatre mois après que ses présumés complices, Dmitry Rybolovlev et l’ancien procureur général de Monaco Jean-Pierre Dreno ont été innocentés par ce même tribunal, Tetiana Bersheda ressort donc blanchie. Il faut dire que, selon nos informations, le Parquet avait requis un non-lieu et la plaignante initiale, Tania Rappo, avait fini par retirer sa plainte… On rembobine.
Un dîner sur écoute
En janvier 2015, Dmitry Rybolovlev porte plainte pour escroquerie contre Yves Bouvier, à Monaco. Le 25 février, le marchand d’art est placé en garde à vue. Tout comme Tania Rappo, proche de la famille Rybolovlev et accusée par le Russe d’avoir profité de son rôle d’entremetteuse pour s’enrichir outre mesure sur ces ventes de tableaux. Tania Rappo estime alors être rattachée à ce conflit artificiellement, uniquement dans le but que l’affaire, qui verra des procédures naître de la Suisse à Singapour, soit arbitrée par la Justice monégasque.
Deux jours plus tôt, le 23 février 2015, Tetiana Bersheda, avait en fait profité d’un dîner organisé chez Dmitry Rybolovlev pour enregistrer Tania Rappo à son insu durant dix minutes, dans l’idée de prouver sa complicité avec Yves Bouvier.
En juillet 2015, Tania Rappo porte plainte pour atteinte à la vie privée. Un enregistrement clandestin pouvant être puni, selon l’article 308-2 du Code pénal, d’une peine d’emprisonnement de six mois à trois ans et d’une amende.
Naissait alors le deuxième volet de l’affaire Bouvier-Rybolovlev, après celui initial né de la plainte pour escroquerie déposé par Rybolovlev contre Bouvier.
Deux volets aujourd’hui bouclés puisque la Cour de révision de Monaco avait clos celui pour escroquerie dès 2020 et que, ce mardi, le tribunal correctionnel a mis fin à celui pour atteinte à la vie privée. Mais un troisième et dernier volet - le plus sulfureux - subsiste.
Alors juge d’instruction en Principauté, Édouard Levrault avait en effet demandé l’expertise de l’IPhone de Me Bersheda remis à la Sûreté publique...
Un dernier volet ouvert pour trafic d’influence
Or, le smartphone révélera des centaines de SMS échangés notamment avec des haut gradés de la police monégasque, laissant supposer des arrangements avec le clan Rybolovlev.
L’instruction a conduit à une série d’inculpations pour trafic d’influence et corruption passifs ou actifs, ainsi que pour violation du secret de l’instruction et/ou du secret professionnel au profit de Dmitriy Rybolovlev. Parmi les inculpés : l’ex-directeur des Services judiciaires, Philippe Narmino, ainsi que son fils et son épouse ; Paul Masseron, ex-conseiller de gouvernement-ministre de l’Intérieur ; l’ancien patron de la Sûreté publique, Régis Asso ; deux haut gradés de la Sûreté publique, Christophe Haget et Frédéric Fusari, Dmitriy Rybolovlev et son avocate, Me Tetiana Bersheda.
Fin novembre 2023, l’instruction a été clôturée. Selon nos informations, les réquisitions du Parquet général ne sont pas attendues avant cet été.
La déclaration
"Par sa décision, le tribunal de Monaco a purement et simplement relaxé Tetiana Bersheda des faits d’atteinte à la vie privée qu’elle a toujours contestés depuis le premier jour", Sébastien Schapira, avocat au barreau de Paris et conseil de Me Tetiana Bersheda, sollicité ce mardi par Monaco-Matin.
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