"Rester une référence et un moteur de solutions": le nouveau président du Centre Scientifique de Monaco affiche ses ambitions

Le Dr Jean-Jacques Risso a succédé à Patrick Rampal, comme président du Centre Scientifique de Monaco. Il revient sur les enjeux actuels du CSM, l’état de la Méditerranée et l’urgence d’agir pour sauver les océans.

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Jérémy Becam (jbecam@nicematin.fr) Publié le 08/07/2025 à 09:45, mis à jour le 08/07/2025 à 09:45
"Une convention récente, signée avec l’INSERM, permet d’inclure les projets monégasques dans des protocoles de recherche clinique à large échelle." Photo Jérémy Becam

Depuis mars dernier, le Dr Jean-Jacques Risso préside le Centre Scientifique de Monaco. Directeur de l’Équipe de Recherche Subaquatique Opérationnelle à l’Institut de Recherche Biomédicale des Armées (IRBA) à Brétigny-sur-Orge, il succède au Pr Patrick Rampal dans un contexte de transition et de recomposition d’équipes.

Lors du Sommet des Nations Unies sur l’Océan (UNOC 3), il est revenu sur les priorités du centre, l’état de la Méditerranée, et le rôle essentiel que joue la Principauté dans la défense des milieux marins.

Quelle est la place du CSM sur la scène internationale?

Monaco est un leader mondial de la recherche sur les coraux. Le pays a su développer, avec des moyens importants, une compétence unique pour conserver et reproduire des coraux en laboratoire depuis plus de 20 ans. Ce savoir-faire s’est élargi à la biologie polaire, avec des travaux innovants sur les manchots et les effets des microplastiques. Le Centre a aussi ouvert un troisième axe: la biologie médicale. Monaco se distingue également dans la préservation de son littoral. Lors des récents projets d’extension urbaine, une attention particulière a été portée aux herbiers de posidonies et au corail rouge, espèce emblématique. Le pays est même le seul à avoir mis en place un élevage de corail rouge.

Quel est aujourd’hui l’état de la mer en Principauté?

Malgré les efforts de protection, les côtes restent vulnérables. La pollution marine vient majoritairement de la terre. Les déchets déversés par les fleuves lors des orages atteignent la mer, comme on a pu le voir lors des épisodes climatiques extrêmes dans la Roya. De plus, la Méditerranée est l’une des mers qui se réchauffent le plus rapidement au monde. Face à cela, Monaco agit: mise en place de zones marines protégées, gestion durable de la pêche, régulation du tourisme. L’approche est pragmatique: il ne s’agit pas d’interdire, mais d’encadrer les activités humaines pour permettre une cohabitation harmonieuse avec les milieux naturels. La clef est dans la concertation. Pêcheurs, plaisanciers, touristes doivent être associés à cette dynamique. Les scientifiques ont le rôle fondamental de produire des données libres et compréhensibles, vulgariser, accompagner les décisions publiques. L’objectif est de permettre des politiques environnementales éclairées, réalistes et efficaces.

Quelles étaient vos attentes autour de l’UNOC3?

C’était une occasion cruciale. Les catastrophes annoncées depuis des années se produisent désormais sous nos yeux. Le climato-scepticisme est de plus en plus difficile à tenir. Il faut agir maintenant, car même en stoppant aujourd’hui les émissions, l’inertie climatique retardera les effets positifs. Les chercheurs souhaitaient également alerter sur des enjeux majeurs comme l’exploitation minière des fonds marins (les nodules polymétalliques), qui pourrait détruire des écosystèmes inconnus avant même d’avoir été explorés. Ce sommet doit être le début de la résolution. On ne peut plus se contenter de grandes déclarations tous les 3 ou 4 ans. L’avenir appartient aux générations futures. Et elles sont déjà là, très sensibilisées. Il faut leur transmettre des outils, des savoirs, des engagements durables. C’est aussi le rôle du CSM et de ses scientifiques.

Quelle feuille de route pour les prochaines années?

Elle sera présentée prochainement. L’objectif: consolider les équipes existantes, préserver les savoir-faire, assurer la relève. Certaines compétences sont portées par très peu de personnes. Il faut leur donner les moyens humains et financiers pour continuer. Il s’agira aussi de renforcer les transversalités entre disciplines, d’encourager les synergies entre biologies marine, polaire et médicale. Des mécènes privés, sensibles à ces enjeux, accompagnent déjà ces efforts. Le CSM entend rester une référence scientifique, mais aussi un moteur de solutions concrètes pour la Principauté, en lien avec les entreprises locales, notamment dans le domaine du transport ou du traitement des déchets. Une convention récente, signée avec l’INSERM, permet d’inclure les projets monégasques dans des protocoles de recherche clinique à large échelle. L’objectif : participer à des études européennes et accéder à des bases de données et à des cohortes plus vastes.

Le centre peut-il encore s’agrandir?

Le bâtiment actuel, inauguré en 2011, est déjà de haute qualité. Une extension est envisagée, notamment grâce à des surfaces libérées par l’Université de Monaco. Ce n’est qu’une piste, mais elle pourrait permettre de gagner quelques centaines de mètres carrés supplémentaires. D’autant plus que le CSM intéresse de plus en plus la jeune génération. Il accueille des classes, organise des visites, propose des interventions dans les lycées. Cette sensibilisation précoce est essentielle. De nombreux jeunes s’interrogent sur leur avenir scientifique. Il faut dire que les enjeux environnementaux sont particulièrement tangibles pour eux. Ils sont motivés, concernés, et c’est de là que naissent les vocations. Le CSM peut les accompagner, les former ou les orienter vers des filières spécialisées. Il insiste aussi sur l’importance de la sérendipité en sciences: ces découvertes inattendues, nées d’une erreur, d’un hasard, mais rendues possibles par la rigueur scientifique. C’est cette ouverture d’esprit, ce goût de l’exploration, qu’on souhaite cultiver au sein du CSM.

Le Dr Jean-Jacques Risso exerce son rôle de président du Centre Scientifique de Monaco à titre honorifique et bénévole. Photo CMS.

Le président du CSM change de rôle

Nommé il y a quelques mois à la place du Pr Patrick Rampal, Jean-Jacques Risso occupe désormais le rôle de président du Centre scientifique de Monaco (CSM). Un poste qu’il exerce à titre honorifique et bénévole, marquant une évolution notable dans la gouvernance de l’établissement.

"La fonction a évolué. Ce n’est plus un poste salarié à temps plein, mais un mandat honorifique et bénévole ", explique Jean-Jacques Risso. Désormais, le président du CSM n’assure plus la gestion quotidienne, confiée à une direction bicéphale, composée de la directrice scientifique, le Dr Sylvie Tambutté, et de la secrétaire générale, Delphine Frappier. Sa mission consiste à présider le conseil d’administration, accompagner les grandes orientations scientifiques du centre, et rendre compte de sa bonne marche au Département de l’Intérieur.

Une nouvelle organisation qui s’inscrit dans une période de transition: "Nous traversons une phase marquée par plusieurs départs, notamment celui de l’ancien président et du directeur scientifique. L’enjeu principal est aujourd’hui de maintenir l’activité et de la faire évoluer selon les priorités scientifiques et les orientations gouvernementales."

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