"L'injustice vous ronge": Marion lance une "bouteille à la mer" sur Facebook pour retrouver le chauffard qui a fait basculer sa vie

"Bonjour. Je m’appelle Marion, j’ai 31 ans, je suis étudiante infirmière, et ma vie a basculé."

Ainsi débute le post poignant de Marion Palmieri. Cette jeune Vençoise l’a publié sur Facebook le 10 mai dernier. En quelques jours, son "appel à témoins" a suscité 3600 partages et près de 200 commentaires solidaires. Ses mots ont ému les internautes. Son histoire les a glacés. L’histoire d’un accident à l’impact vertigineux, doublé d’un délit de fuite qu’elle refuse de laisser impuni.

Cette histoire débute le 14 décembre dernier, à 21h40, sur la RM 18 qui relie Cagnes-sur-Mer à la Gaude. Marion Palmieri circule à bord de sa Dacia Sandero Stepway blanche, toute neuve – "Elle était magnifique, pas une rayure", s’efforce-t-elle de plaisanter. Romaric, son compagnon, l’a appelée quelques instants plus tôt. Il l’attend pour une soirée en couple. "Nous sommes passés d’un samedi soir pizza-bière-Miss France à une soirée bagnole fraquée-pompiers-urgences..."

Dans la nuit noire, Marion Palmieri aperçoit les phares du véhicule qui roule en sens inverse. "Je l’ai vu arriver au loin, comme une balle de fusil." Au moment où elle aborde un virage, l’autre voiture se déporte sur la voie opposée. "Je n’ai même pas eu le temps d’avoir peur, ni de freiner. Juste de me dire: ça va taper..."

Blessée et sidérée

Choc. Fracas. Les ailes des voitures se percutent. Marion Palmieri repense au "bruit de l’airbag qui explose", à celui d’une "côte qui se casse". Elle a eu le coup du lapin. Elle est sonnée, et coincée. Elle panique en sentant une odeur de brûlé, sans savoir qu’elle provient de la cartouche explosive de l’airbag. "Au secours!"

Mais les premières pensées de l’étudiante-infirmière vont vers l’autre automobiliste. Elle est rassurée en voyant son véhicule bouger. "Naïvement, je me suis dit: il vient me filer un coup de main... Et là, pas du tout! Il pousse ma voiture pour se barrer. Je suis sidérée. Je comprends tout de suite le délit de fuite. Il me catapulte cette phrase: Dégage, connasse!" Marion Palmieri se retourne pour lire sa plaque. En vain. Une deuxième côte craque. Ses nerfs suivent. "J’ai poussé un cri à réveiller les morts..."

La voici seule, au milieu d’un virage et de la nuit. "Un grand moment de solitude. Si quelqu’un d’autre arrive, c’est terminé." Mais le prochain automobiliste s’arrête, active ses warnings et pose un triangle sur la route. Les sapeurs-pompiers de Vence arrivent dans la foulée. Direction l’hôpital de la Fontonne à Antibes. Marion en sort quatre jours plus tard, avec cinq côtes cassées.

"L’injustice vous ronge"

Débute alors sa convalescence, entre fauteuil roulant, béquilles et collier cervical. Sa jambe gauche ne répond plus que par intermittence. "Elle se bloque. Ça m’handicape pour tout: la vie quotidienne, la fin de mes études, ma future vie professionnelle... Je suis obligée d’être véhiculée. Au stade où je suis arrivée, même si je dois garder une boiterie, tant pis! Mais je veux pouvoir me tenir debout. Reprendre ma vie là où elle s’est arrêtée."

"Ça a complètement changé notre quotidien. Ça fait cinq mois qu’on vit l’accident", confirme Romaric. Il loue le courage de sa compagne, "une énergie et une résilience qui forcent l’admiration". Marion salue le soutien de ses proches, qui la portent avec "beaucoup d’amour, de loyauté, de patience". Passé le choc post-traumatique, elle a plongé dans une "grosse dépression", nourrie par un "profond sentiment d’injustice. Ça vous ronge, ça vous bouffe, ça vous détruit".

"Le silence aussi fait mal"

Sitôt sortie de l’hôpital, Marion Palmieri a déposé plainte à la brigade de Vence. La procédure aurait été transmise au parquet deux jours plus tard, confirme la gendarmerie. "Ils nous ont notifié que l’auteur était inconnu. On ne s’est pas senti d’aller plus loin."

Elle refuse pourtant à s’y résoudre. D’où sa "bouteille à la mer" lancée sur Facebook (1). "Je ne l’ai pas écrit pour me faire plaindre, mais pour faire de la prévention, dire que ça n’arrive pas qu’aux autres et qu’il ne faut pas se taire, car le silence aussi fait mal."

Marion Palmieri caresse l’espoir ténu d’identifier le conducteur de cette "Peugeot 207, 208 ou 308 de couleur foncée", dont l’aile avant droite et la portière ont été accidentées mi-décembre. Pour relancer l’enquête et, qui sait, aboutir à un procès. "Peut-être qu’une langue pourrait se délier. Je veux le voir. Et qu’il me voie. Pour qu’il prenne conscience que, ce soir-là, il aurait pu me tuer."

1. palmierimarion.appelatemoin@gmail.com Ce délit de fuite sera au programme de l’émission Appel à témoins, présentée par Julien Courbet, lundi 23 juin à 21h10 sur M6.