"Je ne demande pas vengeance mais justice": 19 mois après la perte de sa fille dans un accident à Monaco, un père adresse une lettre ouverte à la société monégasque

Père de l’une des deux étudiantes de l’IUM décédées lors de l’accident routier du 17 décembre 2023 à Monaco, Vugar Akhundov réclame justice contre le conducteur ivre. Il a rédigé une lettre ouverte et lancé une pétition en ligne.

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Thibaut Parat Publié le 31/07/2025 à 08:15, mis à jour le 31/07/2025 à 08:26
Trois jours après son décès survenu le 20 décembre 2023, Dilara était censé souffler sur ses 20 bougies. DR

Je ne demande pas vengeance, je demande justice. Un an et demi plus tard, nous attendons toujours."

C’est un père endeuillé qui prend la parole depuis Bakou, capitale de l’Azerbaïdjan.Non pas par sensationnalisme, nous jure-t-il, mais pour "rappeler à la société la gravité de ce qu’il s’est passé et veiller à ce que de telles tragédies ne soient pas oubliées ou se répètent".

Le 20 décembre 2023, trois jours après un tragique accident de la route en Principauté, Vugar Akhundov a perdu Dilara, sa fille cadette âgée de 19 ans.

Cette étudiante de l’International University of Monaco (IUM) avait, à l’instar de trois de ses amies et camarades du programme bachelor, pris place dans l’Audi RS4 de Mirco P. après une soirée au Twiga.

Ivre et roulant à 107 km/h, ce Finlandais de 22 ans avait perdu le contrôle de son puissant bolide et percuté de plein fouet un muret à la sortie du tunnel Millenium. Ayana, une Kazakhe de 19 ans, était décédée sur le coup et deux autres femmes blessées.

Dilara, elle, devait souffler ses 20 bougies le 23 décembre.

Dilara (à droite) et Ayana (à gauche), les deux étudiantes de l’IUM victimes de cet accident, avaient « un lien très fort et affectueux ». DR.

Un "silence insupportable"

Deux vies fauchées, des familles meurtries. Toutes se sont constituées partie civile en vue d’un procès pénal, dont elles réclament la tenue urgente.

"Cela fait maintenant plus d’un an et demi. 19 mois de silence, d’attente, d’angoisse. Pendant que nous, parents, allons sur les tombes de nos filles, pleurant chaque jour leur perte, pendant que nous luttons simplement pour survivre à une douleur insupportable, celui qui est responsable de cette tragédie est libre. Il profite de la vie, on le voit sur les plages, dans les restaurants, les clubs, comme si aucun drame n’avait eu lieu. Il savoure sa jeunesse tandis que celle de nos enfants a été brutalement fauchée, s’indigne Vugar Akhundov dans une lettre ouverte adressée à la société monégasque et transmise à Monaco-Matin (que nous publions ici dans son intégralité). Ce silence devient insupportable. Nous refusons que cette tragédie devienne une normalité (...)Je ne veux pas que la mort de ma fille soit juste une statistique, un fait divers oublié."

La lettre ouverte de Vugar Akhundov, publiée dans son intégralité. Vugar Akhundov.
La lettre ouverte de Vugar Akhundov, publiée dans son intégralité. Vugar Akhundov.

Également à l’origine d’une pétition en ligne, signée par 215 personnes, Vugar Akhundov réclame "une réponse judiciaire ferme, équitable et exemplaire" et le renforcement des lois monégasques contre la conduite en état d’ivresse, "pour mieux protéger la vie de chacun".

Ce combat plus global, il le mènera à terme pour honorer la mémoire de Dilara, sa fille bien-aimée, dont il a accepté de brosser le portrait.

"Sa présence est partout"

Étudiante en deuxième année à l’IUM, passionnée par la gestion de marques de luxe et l’organisation d’événements, elle "rêvait de construire sa carrière et sa vie d’adulte à Monaco".

Un pays dont elle était tombée amoureuse en décembre 2014, pendant les fêtes de Noël, à seulement 11 ans. "Elle m’avait dit avec certitude : ‘‘Je veux vivre dans cette ville’’". Un désir, viscéral, exaucé au sortir d’études internationales au lycée de Varsovie. "Il ne se passait pas un seul jour sans que nous échangions", confie-t-il.

Car, aux dires de son père, Dilara n’était pas seulement une brillante étudiante mais "une penseuse et philosophe dans l’âme, une rêveuse et une créatrice". Une touche-à-tout, avide de connaissances. "Ses talents étaient illimités, ses passions sans fin. Dilara composait de la musique, écrivait des poèmes, faisait de la photographie professionnelle, jouait aux échecs à haut niveau et chantait avec un dévouement inébranlable." 

Aujourd’hui, sa famille ne trouve le réconfort que dans les souvenirs laissés derrière elle : ses mélodies, ses vers, ses clichés d’une rare sensibilité. "Elle n’est plus mais sa présence est partout", souffle Vugar Akhundov qui se recueille chaque jour au cimetière de Bakou, où elle a été inhumée le 31 décembre 2023. Une statue de Dilara y domine une tombe couverte de fleurs.

Une cérémonie empreinte d’émotions, comme le fut celle organisée à l’IUM, le 26 février 2024, en hommage à Ayana et Dilara. Photos, vidéos, discours et dépose de fleurs sur les lieux de l’accident ont ponctué cette journée.

Un livre publié avec les poèmes et œuvres photographiques de Dilara

L’association d’aide aux victimes d’infractions pénales (AVIP) a aussi permis une rencontre avec le ministre de l’Intérieur d’alors, Patrice Cellario. Mais pas que. "Avec l’aide de Valérie Campora-Lucas, la directrice, nous avons trouvé un éditeur [Graphic Service, N.D.L.R.] qui a accepté de publier un livre contenant les poèmes et œuvres photographiques de Dilara sous le titre I want to feel alive », remercie Vugar Akhundov.

Plus de 150 exemplaires ont été imprimés et d’autres pourraient être distribués dans des écoles privées et publiques de Monaco, afin de promouvoir son héritage artistique.

"La lumière de Dilara ne s’éteindra jamais. Ma femme, ma fille aînée Aziza et moi-même ne tenons que par la force de notre amour pour elle et notre détermination à perpétuer sa mémoire (...) La vie sans elle est une blessure que le temps ne peut guérir. Son absence est irréparable et chaque jour est une lutte pour accepter un monde qui ne contient plus sa présence », conclut le père.

À l’automne, Vugar Akhundov espère organiser un rassemblement commémoratif sur les lieux du drame. Des fleurs, des bougies et un message à faire passer : "Nous attendons toujours que justice soit faite".

Après le drame, des fleurs et bougies avaient été déposées sur les lieux de l’accident en hommage à Ayana et Dilara, les deux étudiantes de l’IUM disparues. Photo Jean-François Ottonello.

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