Avec l'exposition Agora, le NMNM invite le spectateur à s'interroger sur les enjeux d'un musée

À la Villa Sauber, les équipes du NMNM proposent une exposition comme un laboratoire pour comprendre les enjeux d’un musée. L’occasion d’y découvrir des pièces rares de la collection.

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Cédric Verany Publié le 28/01/2025 à 09:05, mis à jour le 28/01/2025 à 09:46
La collection d’art africain de la famille Jessula, déposée dans le fonds du NMNM, a inspiré l’artiste Léa Durr pour travail mêlant installation et photographie. Photo Cyril Dodergny

Forcément, elle est dans les pensées de ce premier rendez-vous de janvier au Nouveau Musée National de Monaco. "Nous lui dédions cette exposition parce qu’elle lui ressemble, et elle lui aurait fait plaisir", glisse Björn Dahlström, le directeur des lieux, en évoquant celle à qui il a succédé, Marie-Claude Beaud, disparue le 29 décembre.

En douze années à la tête du NMNM, elle aura installé sa vision de ce que doit être un musée. "Elle a défriché les choses, il n’y avait pas de lieu d’art contemporain à Monaco. Toute sa longue carrière, elle n’a eu de cesse que de convoquer différentes disciplines dans le musée, d’élargir les champs, pour aussi capter de nouveaux publics. C’était pour elle un enjeu fondamental. Elle a mis en place une politique intelligente de public, avec la création au cœur de la transmission. Et en faisant appel à des artistes pour explorer un pan inconnu de nos collections. Une manière intelligente d’éveiller un intérêt à la création."

L'exposition gratuite est visible jusqu'au 4 mai. Photo Cyril Dodergny.

"Mettre l’artiste au cœur de nos projets"

Cet esprit, devenu l’héritage de MCB, avait donné lieu à deux "Lab", lancés il y a dix ans dans la programmation du NMNM, où le musée dédiait ses salles à montrer l’envers de la création et son processus de réflexion pour conserver et faire vivre ses collections.

L’exposition Agora, qui ouvre ses portes à la Villa Sauber, est dans le droit fil de ces laboratoires passés, interrogeant les enjeux contemporains d’un musée, dans une proposition très dense. "Nous voulions montrer un travail qui se mène depuis plusieurs années. Marie-Claude Beaud nous a toujours encouragés à mettre l’artiste au cœur de nos projets. On travaille surtout pour mettre en valeur le travail d’artistes, à qui on a envie de proposer de regarder nos collections, ce qui fait notre identité depuis plusieurs années", explique Benjamin Laugier, responsable des publics au NMNM, qui pense et prépare cette Agora depuis plusieurs mois. Il a composé ce parcours, où plusieurs salles appellent au rassemblement pour échanger. De l’amphithéâtre en bois, pensé par Olivier Vadrot pour meubler la plus grande des salles et installer une agora (forcément) propice aux rencontres avec des artistes, aux performances, aux projets. Mais aussi à la redécouverte d’Ecoletopie, le projet du studio smarin réinventant les codes et le mobilier d’une salle de classe devenant dans le musée un lieu d’échanges.

Les créations de Rita Ferreira Photo Cyril Dodergny.

Le fruit des résidences d’artistes

La Villa Sauber se retrouve aussi, et surtout, peuplée d’œuvres acquises récemment et d’autres plus anciennes exhumées du fonds du NMNM, dans un joyeux mélange voulu comme un dialogue. Qu’est-ce qu’on y voit? D’abord, la concrétisation de l’accueil de deux artistes en résidence, qui ont développé des projets avec les collections du Musée. Celui de Léna Durr, qui met en scène la collection Jessula, conservée par le NMNM. Un fonds d’art africain singulier, constitué par Georges Jessula, industriel en Afrique de l’Ouest, que ses fils ont donné en 2006 à la Principauté. L’artiste a recréé un salon cossu imaginaire de la famille Jessula, faisant intervenir certaines pièces fortes. Elle y a ajouté des meubles de la collection Drapier, léguée en 1950 à l’ancien Musée national des Beaux-Arts et toujours conservée en Principauté.

Dans les salles suivantes, Eléonore False, elle aussi accueillie en résidence, s’est elle penchée sur la collection de l’excentrique Gisèle Tissier-Grandpierre, organisatrice de grandes fêtes sur la Côte d’Azur dans les Années folles et créatrice de poupées. Ces personnages surannés, Eléonore False les a photographiés pour servir de base à des collages, sa discipline fétiche. Le résultat est plein de poésie.

Les créations de Katia Kameli Photo Cyril Dodergny.

L’art de la collection

Le parcours se poursuit avec une sélection des acquisitions récentes du NMNM, dont l’achat résulte d’un processus particulier: celui de donner un budget à des lycéens de la Principauté en classe d’art pour acheter des œuvres rejoignant la collection du Musée national. C’est le projet, depuis 2017, des "Apprentis collectionneurs" qui se déplacent chaque année dans une foire d’art et doivent motiver ensuite un jury pour acquérir telle ou telle pièce. "Ce programme permet de leur faire comprendre ce que collectionner et acquérir signifie pour un musée, de leur expliquer comment fonctionne le marché de l’art. Et d’aiguiser leur regard", détaille Benjamin Laugier, en présentant Rita Ferreira, une artiste portugaise dont les «Apprentis collectionneurs» ont acquis en 2021, neuf huiles sur papier monumentales. "C’est le premier projet que j’ai fait à cette échelle", souligne Rita Ferreira face à cette série aux motifs fleuris remarquables.

Les créations d'Eléonore False Photo Cyril Dodergny.

Dans la salle suivante, l’installation de masques de David Medalla - autre achat des jeunes collectionneurs -, côtoyant un masque signé Kees Van Dongen, convoquent le souvenir de la collection Madeleine de Galéa et ses poupées résidentes pendant quarante ans de la Villa Sauber. Suit une série de paons, en sculptures et aquarelles de Katia Kameli, qui donnera lieu à une performance à Monaco, dans le musée, le 13 février prochain.

Il y a beaucoup dans ce premier projet de 2025, dans tous styles, montrant les reliefs divers de la collection du NMNM. Pour les équipes c’est aussi une manière de compiler le travail accompli ces dernières années et de montrer au public, un best-of qui est bienvenu.

Savoir+
Agora, jusqu’au 4 mai à la Villa Sauber, tous les jours de 10 heures à 18 heures. Entrée gratuite le dimanche

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