Des "crédits biodiversités" bientôt présentés à la Blue Economy & Finance Forum de Monaco
À l’occasion du Blue Economy & Finance Forum de Monaco, un panel international présentera la nouvelle mouture des crédits biodiversité. Une solution pérenne en faveur de la planète?
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Jérémy BecamPublié le 04/06/2025 à 07:55, mis à jour le 04/06/2025 à 09:35
Les crédits biodiversité visent à financer des projets locaux. Photos Olivier Jude et Frantz Bouton
Les organisateurs l’ont promis: le Blue Economy & Finance Forum sera le rendez-vous des solutions concrètes au service de l’environnement. Les 7 et 8 juin, le BEFF accueillera à Monaco, au Grimaldi Forum, plus de 1.500 acteurs du monde économique. Cet évènement, organisé par le gouvernement princier, la Fondation Prince Albert II de Monaco et l’Institut océanographique de Monaco, a pour objectif de connecter les entrepreneurs et les investisseurs pour atteindre l’Objectif de développement durable 14*.
Si plusieurs voies vont être ouvertes, explorées et peut-être empruntées à l’occasion de ce BEFF, l’une d’entre elles sera particulièrement suivie à l’occasion de ce forum, celle des crédits biodiversité. Présentés en octobre dernier dans le cadre de la 16e Conférence des parties à la convention sur la diversité biologique (COP16), en Colombie, ils sont inspirés des crédits carbone octroyés en contrepartie de tonnes de CO2 évitées ou absorbées. Ils visent à récompenser des actions bénéfiques aux écosystèmes.
Les crédits biodiversité peuvent être définis comme une unité quantifiable, traçable et achetable sur un marché de contribution positive à la biodiversité et aux communautés locales en bénéficiant, obtenue par le biais d’actions de conservation ou de restauration suivies dans le temps et vérifiées par un organisme tiers indépendant.
À cette occasion, un panel international, baptisé IAPB (International Advisory Panel on Biodiversity Credits), initiative indépendante établie par la France et le Royaume-Uni en juin 2023, avait présenté un rapport sur les crédits biodiversité. Co-présidé par Sylvie Goulard, ancienne sous-gouverneure à la Banque de France, et Amelia Fawcett, administratrice indépendante principale de la State Street Corporation, ce panel sera présent à Monaco pour présenter la dernière mouture du projet des crédits biodiversité.
"La base, c’est la même que les crédits carbone: des marchés permettant de financiariser des projets en faveur de la nature par des acteurs privés souhaitant investir dans ce sens", explique Robert Calcagno, directeur général de l’Institut océanographique de Monaco et membre du panel IAPB. Mais la comparaison s’arrête là et c’est un point essentiel de ce projet à la vue des abus observés autour des crédits carbone. "Les crédits carbone ont été développés de manière impétueuse prenant rapidement beaucoup d’ampleur sans contrôle, sans information publique ni prise en compte des enjeux locaux sociologiques et environnementaux. C’est devenu un marché financier avec de la spéculation. Notre recommandation est de ne pas reproduire les mêmes erreurs ", énumère l’ancien conseiller-ministre chargé de l’Équipement, de l’Environnement et de l’Urbanisme en Principauté.
Concrètement, l’objectif est de permettre à des marchés privés d’entrer en contact avec des opérateurs de marché locaux. Ces derniers les mettraient ensuite en relation avec des développeurs de projets bénéfiques pour la nature.
L’IAPB, composé de plus de 120 représentants issus de plus de 25 pays différents, du monde de la finance, des entreprises, des Peuples Autochtones et de communautés locales, des ONGs et du monde universitaire, recommande ainsi un développement plus progressif des crédits biodiversité. "L’espoir est qu’ils deviennent une source majeure du financement de la biodiversité dans 10 ou 20 ans. Il faut avant tout mettre en place des marchés financiers à haute intégrité. Les règles doivent être établies avec de la régulation et du contrôle", précise Robert Calcagno.
Et pour garder le contrôle, les crédits biodiversité se mettraient en place sur des marchés locaux. Les porteurs de ces projets seraient ainsi obligés de communiquer sur l’avancée des programmes et les informations les entourant. Une démarche indispensable pour assurer les investisseurs mais aussi le grand public. "La structure de notre projet était la première étape présentée à la COP 16, avec la définition d’un cadre. Maintenant place à la mise en œuvre. Samedi, au BEFF, il sera annoncé l’IAPB 2.0", annonce le directeur général du Musée océanographique.
L’objectif de ces crédits est de permettre aux marchés locaux de servir de pont entre les marchés privés et des développeurs de projets bénéfiques à la naturePhoto DR.
Une entité mondiale pour superviser
Pour éviter les erreurs du passé et des crédits carbone, il faut encadrer ces crédits biodiversité. Mais qui aura le rôle du gendarme? Les deux co-présidentes annonceront, ce samedi lors du BEFF, la création d’une entité spécifique au niveau mondial pour superviser les projets concernés au niveau macroscopique, et aussi donner des orientations. "Cette entité aura pour but de catalyser et de contrôler la mise en place de systèmes vertueux par région. Elle pourra donner son appréciation sur les systèmes mis en place et de faire le lobbying nécessaire auprès des gouvernements pour valider ou déconseiller un projet si ce dernier ne respecte pas l’environnement", présente Robert Calcagno.
Dématérialisés mais concrets
Comme pour les crédits carbone, les investisseurs pourront acheter des crédits biodiversité de manière dématérialisée mais à cette différence qu’ils ne pourront servir qu'à un projet précis et défini en amont. Le tout dans le but de supprimer la spéculation financière comme pour les crédits carbone. "Quand nous avons commencé à travailler sur ce sujet en 2023, nous avons été très prudents car malheureusement l’expérience des crédits carbone a miné le système. Nous avons essayé de décortiquer tout cela en pointant les dysfonctionnements. La réponse est la mise en place d’une structure et de règles. Le plus important est de ne pas vouloir aller trop vite", conclut Robert Calcagno.
L’organisation d’un tel marché de crédits a pour intérêt principal de réduire les coûts de transaction et de permettre, théoriquement, de faciliter les flux de financements en faveur de la nature. L’intervention d’intermédiaires permet d’optimiser certains coûts et de faire se rencontrer plus facilement émetteurs et investisseurs de projets liés à la nature. Les crédits biodiversité seront ainsi l’une des annonces à suivre lors de cette première édition du BEFF, même s’il faudra toujours plus pour préserver l’environnement.
*L’ODD 14 promeut la conservation et l’exploitation durable des écosystèmes marins et côtiers.
La décla'
"Les crédits biodiversité sont encore plus durs à mettre en place que les crédits carbone. Avec quel outil mesurer l’impact sur la biodiversité ? En agissant localement, vous avez des résultats visibles et accessibles. C’est finalement un avantage pour les crédits biodiversité.", Robert Calcagno, directeur général de l’Institut océanographique de Monaco et membre du panel IAPB.
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