Après deux ans de navigation, le bateau-école Plastic Odyssey présentera son bilan au Blue Economy and Finance Forum à Monaco

Le bateau sillonne depuis deux ans et demi les mers en insufflant dans les pays visités des méthodes de recyclage de plastique. Au BEFF, Simon Bernard en présentera les réalisations concrètes.

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Cédric Verany Publié le 02/06/2025 à 07:14, mis à jour le 02/06/2025 à 10:00
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Flashback octobre 2022. À l’orée de leur tour du monde, Simon Bernard et Alexandre Dechelotte faisaient faire escale à leur navire Plastic Odyssey à Monaco. Et le prince Albert II était un des premiers à découvrir ce bateau-école (ancien bâtiment d’exploration océanographique de 39 mètres) aménagé pour naviguer dans les océans. À chaque escale, l’équipe explique l’intérêt du recyclage des déchets plastiques. Et joignant directement le geste à la parole, montre grâce aux machines à bord, comment convertir les déchets en objets utiles. Depuis deux ans et demi, Plastic Odyssey navigue entre les trente pays les plus touchés par la pollution plastique de la Méditerranée, l’Afrique de l’Ouest, l’Amérique latine, le Pacifique et l’Asie. "On pensait qu’on connaissait plein de choses en partant, mais on a énormément appris", sourit Simon Bernard, joint en visio depuis Madagascar, où le bateau venait d’accoster. "Aujourd’hui, nous avons une expertise en termes de recyclage et de solutions concrètes de réduction du plastique. On peut agir dans les territoires les plus touchés. Et on est hyper surpris de l’engouement" témoigne le co-fondateur qui sera en Principauté à l’occasion du Blue Economy and Finance Forum (BEFF) les 7 et 8 juin pour présenter le bilan de deux années et demie sur le terrain.

"Montrer des solutions qui existent"

Le propos n’a pas changé. à chaque escale, Plastic Odyssey reçoit des écoliers et des locaux pour partager ses alternatives au plastique et faire en sorte que les gens en utilisent moins. "Nous avons progressé aussi sur nos connaissances sur le recyclage. On a visité plus de 150 professionnels dans le monde entier et on a créé, là aussi, une base de données d’expertise sur toutes les manières de transformer les déchets plastiques et d’en faire des modèles rentables pour les communautés locales."

Dans certains pays, Plastic Odyssey est un phénomène. "Notre escale devient un temps fort avec les institutions du pays" poursuit Simon Bernard, "c’est génial de voir qu’il y a énormément d’attente. Tout le monde a envie de faire quelque chose sans savoir quoi concrètement. Des entrepreneurs peuvent venir se former à bord du bateau et apprendre à monter des usines de recyclage. Et nous avons besoin de montrer des solutions qui se font déjà, pour ne pas réinventer la roue."

L’exemple le plus probant est le Sénégal où le navire a accosté à l’hiver 2023. Plastic Odyssey a fait école et dix usines de recyclage plastique sont nées depuis. "C’était un test, et nous venons de le mettre en place aux Philippines également. Une usine de recyclage tient dans un container et a la capacité de traiter 300 à 700 tonnes par an. C’est la consommation de 10.000 à 20.000 personnes par an. Et ce traitement se fait avec très peu de moyens."

Concrètement, les déchets plastiques collectés sont broyés et constituent une matière agrégée en planche pour servir de matière à construction. "Avec ces planches les menuisiers peuvent faire plein de choses du mobilier pour l’extérieur, des poubelles qui manquent cruellement dans les rues. Au Sénégal, il manque 500.000 tables et bancs pour les écoles, nous avons trouvé les moyens d’en construire."

"Plus vite que prévu"

La démarche peut paraître simple mais elle est hautement ingénieuse: transformer un déchet qui est une contrainte en un objet utile, à moindre coût. L’équipe de Plastic Odyssey croit en son modèle et entend mobiliser des investissements pour financer 200 usines de ce type d’ici 2030.

C’est l’essence de la venue de Simon Bernard à Monaco pour le BEFF où il espère attirer l’attention de bailleurs internationaux. "Nous attendons de passer notre modèle à l’échelle avec des retours sur investissement. Ce n’est pas pour faire de gros profits, mais pour ne pas perdre de l’argent non plus."

En 2022, Plastic Odyssey a démarré son aventure avec douze millions d’euros, principalement financés par des sponsors. "Notre idée était de réaliser ces trois années d’expédition puis de développer des solutions concrètes. Tout s’est fait beaucoup plus vite que prévu. Nous sommes passés d’une petite ONG à un acteur référent que l’on mandate pour répondre à de grandes problématiques. Des solutions existent, des financements aussi, il n’y a plus qu’à les mettre ensemble."

En 2022, le prince Albert II était monté à bord du navire avant qu’il n’entame son tour du monde. Photo Manuel Vitali/Dir’Com’.

Le changement se jouera sur le terrain

"Avec un peu plus de moyens, on peut arriver à soulever des montagnes." Simon Bernard veut rester optimiste. Même si vouloir réduire les déchets plastiques dans un monde toujours plus consommateur peut s’apparenter à un travail de Sisyphe. "On n’attend pas que la solution soit résolue par des décideurs internationaux " confie le co-fondateur de Plastic Odyssey. "Il y a tellement d’enjeux, de lobbys et de visions différentes sur la production plastique que malheureusement on n’a pas beaucoup d’espoir sur la résolution. On a l’impression que ça se jouera sur le terrain, par les communautés locales, par l’adoption de solutions très concrètes. Et par la multiplication de ces solutions qui auront un impact global énorme."

En présentant leurs réalisations autant au BEFF qu’à l’UNOC à Nice, l’équipe entend assurer le financement de leurs usines de recyclage plastique dans les pays du Sud. Un deuxième axe est en cours de développement aussi pour restaurer des sites de l’UNESCO. "Notre idée est de lancer des expéditions pour aller dépolluer les cinquante sites marins inscrits au patrimoine mondial. Amener des scientifiques sur place, étudier l’impact sur les écosystèmes, dépolluer et faire un suivi dans le temps."

En parallèle, l’expédition se poursuit jusqu’en mai 2026. Le retour en France s’accompagnera de plusieurs mois de partage d’expérience. C’est aussi la force du projet qui depuis son démarrage soigne sa communication. "Cette communication nous permet de montrer des choses concrètes" souligne Simon Bernard, qui reste lucide. "Même s’il y a pas mal de contenu, c’est toujours difficile de boucler nos budgets et d’être visible par des financeurs. On espère beaucoup que le BEFF et l’UNOC permettront ces connexions. Car on a encore plein d’idées et de projets."

Le chiffre

19 tonnes

C'est le nombre de déchets plastiques qui se déversent chaque minute dans l’océan. Un chiffre qui a poussé les concepteurs de Plastic Odyssey à développer leur projet.

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