Une affaire de violences sur conjoint a été jugée au tribunal correctionnel. Le prévenu, un jeune homme sans emploi, avait un visage familier. Ses nombreuses comparutions, liées à ses addictions aux stupéfiants et à l’alcool, ont été égrenées à l’audience par le président Florestan Bellinzona.
Pour autant, seule la boisson aurait initié cette fois l’altercation. Absorbée quantitativement le 3 janvier dernier, dans l’après-midi, elle a favorisé la colère du Monégasque, quand il est rentré dans son appartement auprès de sa concubine et d’un autre homme qu’il hébergeait. Vraisemblablement, le cumul insupportable des personnes vivant sous le même toit aurait déclenché le tempérament colérique du locataire en titre. Dehors! Il ne voulait plus voir ni sa compagne, ni ce confident un peu trop proche! Cette dernière n’entendait pas céder toutefois à pareil diktat impérieux, après un seul mois de vie commune.
"J’avais juste bu cinq rhums et je n’étais pas saoul"
Le ton est monté. Les fluctuations d’humeur devenaient disproportionnées. La jeune femme, déstabilisée, a alerté par téléphone la mère du prévenu qui a exercé une contrainte physique, au niveau de son bras, pour lui arracher le portable des mains et a fait apparaître des ecchymoses. Affolée par la tournure prise en pareilles circonstances, paralysée par la sidération et incapable de se débattre, la victime a crié d’exaspération. La police est intervenue…
Dans le prétoire, prévenu et victime se regardent de biais. Que de reproches et désapprobation entendus pour l’un. Angoisse et émotion sont palpables chez l’autre. "Pourquoi pareille violence au moment où votre amie téléphone? Dès que vous êtes alcoolisé vous n’êtes plus le même homme, note le magistrat.
- Elle ne devait pas appeler mes parents, répond le fautif. J’avais juste bu cinq rhums et je n’étais pas saoul. Agacé, irrité, certes. Je me soigne cependant pour retrouver une attitude normalisée.
- Quand y parviendrez-vous? On a tout essayé pour vous sortir de votre situation de dépendance… Depuis 2013 vous avez été condamné une bonne dizaine de fois pour stupéfiants, menaces, outrages, violences…
- Comment voyez-vous votre avenir? poursuit le ministère public. Que faut-il entreprendre pour que vous arrêtiez enfin. La première fois vous aviez douze ans…
- Il faut m’enfermer!" répond désappointé ce personnage en situation de handicap.
Aucune excuse valable pour Me Anne-Cécile Noël (Barreau de Nice); conseil de la partie civile. "L’homme est violent avec de la haine dans le regard. Il a perdu son contrôle! Des jets d’objets dans l’appartement. Nous sollicitons la somme de 6.000 euros, tout préjudice confondu."
Au moment de requérir, le procureur général Stéphane Thibault tance le prévenu. "Monsieur n’est pas content, car il faut se plier à sa volonté. Il conteste les coups! Il minimise son ivresse, avec 1,50 g dans le sang. Il faut lui rappeler la loi et se rapporter à sa personnalité pour le condamner. Seule la prison pourra préserver la Société de ses accès de violences. Tant qu’il ne décidera pas d’arrêter, cela continuera. Une dizaine de mois d’emprisonnement. Une partie sous le régime de la liberté d’épreuve et l’obligation de soins."
Une nouvelle main tendue de la justice?
Alors Me Sarah Filippi adopte un ton quasi maternel. Elle connaît son client depuis quinze ans et demeure toujours convaincue que son protégé s’en sortira. "Parce qu’un casier judiciaire parle pour lui, il faut irrémédiablement le mettre en prison pour l’écarter? Oui il est coupable! Oui, il dit la vérité! Il n’était pas saoul. Il a voulu que les policiers constatent la situation. L’hématome? Rien ne prouve qu’il est relié à mon client. La prison ne changera rien. Cet homme est fragile, malade… Il lutte pourtant contre ses démons…"
À l’issue du délibéré, la condamnation à deux mois avec sursis, liberté d’épreuve pendant deux ans laisse entrevoir une nouvelle main tendue de la justice pour entreprendre de véritables soins. Le tribunal alloue la somme de 500 euros à la partie civile.
*Assesseurs: Anne-Sophie Houbart et Maxime Maillet.
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