Inconcevable affaire évoquée à l’audience correctionnelle! Quand les policiers contrôlaient à titre préventif une BMW le 24 mars dernier, vers 14h25 au rond-point Wurtemberg, la situation les exposait certainement à un risque bien supérieur du simple niveau d’une vérification d’identité. Déjà, le conducteur de 35 ans, natif du 77 (Seine-et-Marne), présentait de faux papiers. Mais à l’issue de la fouille du véhicule, outre une pochette en plastique contenant une somme de 13.600 euros non déclarée, une arme de poing de calibre 7.65 et son chargeur de huit cartouches dissimulé sous le tapis, était prête à tirer! Conduit à la Sûreté publique pour interrogatoire, cet individu de la région parisienne brisait son téléphone portable afin d’effacer toute trace compromettante. Que voulait-il soustraire aux regards des forces de l’ordre?
Jugé en comparution immédiate à la fin de sa garde à vue avec toutes les garanties procédurales, le délinquant va fournir au président Florestan Bellinzona une réponse sommaire sur son parcours délictueux.
Condamné pour évasion, il lui reste 4 ans à purger en France
Présent en Principauté depuis deux jours, ce protagoniste logeait au Novotel avec l’intention de créer une société de CBD (cannabis thérapeutique). Entre-temps, il devait acquérir 10kg de pollen (cannabidiol) auprès d’un fournisseur établi à Saint-Laurent-du-Var, en plus des 30kg acquis au début mars. Pour financer ce projet, deux amis démontrent un rôle successif où doute et suspicion interpellent le magistrat. "Clairement, selon vos propos, un professeur de tennis envoie l’argent depuis les États-Unis sur un compte au nom d’un joueur de football. Or pour vous remettre ces sommes en numéraires, il doit se rendre en Espagne ou les retraits de montants en liquide sont autorisés…"
Au fil de l’instruction de l’affaire, la destination des fonds se révèle tout autre. Que nenni de la structure de CBD, d’un restaurant ou d’une création de société de sport, comme avancé depuis le box par l’étrange personnage. En fait, les fonds sont destinés principalement à commanditer le train de vie de l’individu sans profession, sans compte bancaire et utilisant des cartes de crédit qui ne lui appartiennent pas. Entre autres, location d’une berline luxueuse, vêtements et accessoires de marques prestigieuses… Voire à subsidier sa cavale! Car d’après son conseil, il resterait à purger à son client "une peine de 4 ans et 7 mois de prison de l’autre côté de la frontière".
Au président de renchérir sur le passif pénal: "Dix-sept condamnations de 2010 à 2021! Ça commence à faire beaucoup d’années en taule! Pour vols, outrages, extorsions, dégradations, effractions, violences aggravées avec arme, séquestrations, trafic de stupéfiants, évasion…"
"Refaire sa vie dans les règles"
La chronologie du 77 à Monaco en passant par l’Espagne est reprise par la rigoriste partisane du Parquet général, où blanchiment, mode de conditionnement de l’argent, circuit financier, cavale, faux papiers, armes et mensonges complètent ses réquisitions. "C’est une géographie très stupéfiante aux conditions inquiétantes dressée par un voyou chevronné à l’intention létale. Il a fermé toutes les portes de la vérification en cassant son portable et son réseau fonctionne à merveille. Je requiers deux ans ferme, le maintien en détention, une amende de 5.000€, la confiscation de la somme transportée et dix ans d’interdiction de territoire."
La défense cherchera à émouvoir par un retour décidé à la vie rangée et aux fonctions bénéfiques du cocon familial. "Mon client a fait preuve de respect, annonce à haute voix Me Eva Barilaro-Fabre. Il vous a donné les détails des sommes et avoué la totalité des infractions. Il veut agir! Refaire sa vie dans les règles! Se rapprocher de sa fille. Des attestations où ce père est apprécié sont jointes au dossier. Je suggère d’amoindrir les sanctions réclamées par une amende et du sursis." Le tribunal suivra les réquisitions du ministère public.
* Assesseurs: Patrice Fey et Maxime Maillet.
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