"Notre aventure aura duré pendant quatre ans et on aura joué devant des milliers de gens." Lorsque Gérard Lanvin fait ce constat, il semble toujours en être agréablement étonné.
Si l’idée d’une collaboration musicale avec son fils Manu (Emmanuel) Lanvin, producteur et musicien qui s’est très tôt épanoui dans le blues et le rock, flottait déjà dans les esprits du célèbre acteur et de son fils, elle ne se serait peut-être pas concrétisée sans une circonstance bien particulière: le confinement, en 2020.
"On a été bloqués à Paris et on a profité de ce moment de calme, parce que lui est souvent sur les tournages et moi, sur les routes", développe Manu Lanvin.
"J’avais déjà repéré la vraie capacité de mon père à écrire des textes qu’il a travaillés pour d’autres: Paul Personne, Bernie Bonvoisin… Il a la manière, je pense, de trouver des formules pour des refrains."
"Il ne faut surtout pas écouter les maisons de disques!"
Parce que s’il est comédien, Gérard Lanvin a également toujours écrit, sous différentes formes. De la musicalité des paroles d’une chanson à l’oralité d’un dialogue de film, en passant par l’imprévisibilité comique d’un sketch, nourri par des paroles glanées dans la rue ou au zinc des comptoirs.
"J’ai toujours, comme le faisait Michel Audiard, été attentif aux réflexions de la rue. J’ai fait les brèves de comptoir avant l’heure pour Coluche. Je lui ai ramené de quoi fabriquer des sketches, des chutes. Il m’a appris à composer des histoires avec tout ce que je notais dans mes cahiers", se souvient l’acteur de 75 ans. Manu, lui, connaissait bien les cahiers de son père, qui lui envoyait des possibilités de refrains, des chansons.
Et en 2021, Gérard Lanvin sort un album, Ici-Bas. "C’est un mélange de mon répertoire et du sien, constate Manu Lanvin. Mon père y parle de ses points de vue sur la société, sur les valeurs humaines. Ce sont des thèmes assez récurrents chez lui, lorsqu’on en discute ou même lors de nos réunions familiales. Je trouvais intéressant qu’il les mette en paroles. Et moi, je les ai mis en musique. Ça s’est passé assez simplement. Au début, on l’a fait pour nous."
Une fois l’album prêt, les maisons de disques le refusent. "Je l’ai donc sorti en indépendant avec mon distributeur, raconte Manu Lanvin. On est rentré cinquième des ventes la première semaine. Cette aventure prouve qu’il ne faut surtout pas écouter les maisons de disques!"
En mai 2022, le duo père/fils et ses musiciens vont faire leur premier Olympia. L’exercice du concert est totalement nouveau pour Gérard Lanvin. "Ça a été assez particulier comme première date, faire l’Olympia tout de suite, devant 2500 personnes… Dans mon travail d’acteur, une fois que le film sort, je ne vais pas dans les salles pour savoir si ça fonctionne. Mais ça s’est tellement bien passé avec ces super musiciens, qui sont devenus des amis maintenant! Il n’y a pas d’a priori, pas de technique de chant. Il y a ce qu’on est ensemble et ça fonctionne très bien."
Plutôt que de travailler la technique, Manu a conseillé à son père "des intentions". "C’est particulier, parce que c’est un feeling qui se passe sur le moment. Et comme on fait pas mal de prises, comme au cinéma, Manu choisit le meilleur moment d’un mot, d’une intonation. En tant que producteur, il fabrique à sa manière", raconte Gérard.
"Ce sont justes des moments de vie heureux"
Ce long voyage, fait de milliers de bornes et de nombreuses scènes, prendra bientôt fin pour Gérard Lanvin. Père et fils donneront un dernier concert commun pour ouvrir un festival sur la côte Atlantique, au mois de novembre.
Puis Manu Lanvin, qui vient de sortir un nouvel album, Man on a mission, reprendra la route de son côté, avec une première date au Bataclan à Paris en novembre. Gérard Lanvin, lui, va retrouver les plateaux de cinéma.
"À mon âge, il faut des emplois qui vous permettent encore de vous amuser. C’est ça l’important. On n’a plus rien à espérer, à prouver, ni un parcours à assumer ou à faire. Ce sont juste des moments de vie heureux où vous pouvez pratiquer votre travail et partager des émotions avec des acteurs de la nouvelle génération, formidables, et des metteurs en scène qui ont du sang neuf. J’ai fait le tour de tous les autres. Il y a un moment où, tant que c’est possible, il faut le faire."
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