"La scène doit être un moment d'expression de la liberté et de communion": on a rencontré le chanteur sénégalais Faada Freddy aux Nuits du Sud

Juste avant de faire danser la foule venue l’écouter aux Nuits du Sud, à Vence, le chanteur sénégalais Faada s’est livré sur son rapport très organique à la musique.

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Mathieu Faure Publié le 18/07/2025 à 13:00, mis à jour le 18/07/2025 à 13:00
Faada Freddy, ce jeudi, peu de temps avant de monter sur la scène des Nuits du Sud, à Vence. Photo Franz Bouton

Un concert du chanteur sénégalais Faada Freddy est une expérience à part entière. Le public vencois des Nuits du Sud en a eu la preuve ce jeudi.

En 2014, par exemple, alors que l’un de ses concerts parisiens touche à sa fin, le chanteur décide de continuer son show... dans le métro.

"On a un droit à la folie, aujourd’hui la folie ne doit pas être l’objet d’une marginalisation, aujourd’hui la folie c’est pour moi une thérapie, c’est l’expression de la liberté sans pour autant avoir peur du regard des autres, confesse Faada Freddy. Le régisseur de la salle voulait fermer mais je sentais que le public en voulait plus, alors on est tous allés dans le métro, en chantant. Au bout de deux stations, le conducteur du métro n’en pouvait plus, il nous a mis dehors. On est sorti dans la rue, on a continué à chanter, c’est l’un des plus beaux souvenirs de ma vie."

"On a créé la machine mais la machine ne crée pas l’homme"

Il faut voir son visage s’illuminer d’un sourire en rembobinant. À Vence, pas de métro mais l’envie d’improviser est toujours là. "Je ne fais que ça, improviser. Mes musiciens, je leur fais confiance parce qu’ils comprennent quand la transe arrive, ils comprennent quand le moment de la liberté d’expression arrive, parce que si la scène est une prison, ça ne vaut pas la peine, il vaut mieux juste s’arrêter à écouter un album, poursuit-il. La scène doit être un moment d’expression de la liberté et surtout de communion, où on peut entendre le cœur des uns et des autres battre, où c’est le moment d’accéder à la thérapie musicale et je laisse libre cours à ceci."

Vous l’aurez compris, le musicien aux inspirations multiples - soul, hip-hop, jazz - aime communiquer en musique. "Avoir un micro et ne pas parler des vrais problèmes qui nous entourent, c’est du gâchis", aime-t-il répéter. C’est pourquoi, dans son combat contre une musique "polluée", Faada Freddy a fait de son corps un instrument. C’est ce qu’il appelle de la musique organique.

Percussions corporelles, claquements de mains, bruits de bouches, tout est bon pour rythmer ses titres. "Je pense qu’il est important de faire une musique organique, pour rappeler qu’on a créé la machine, mais la machine ne crée pas l’homme. C’est la raison pour laquelle je retourne à une musique très simple, qui défie un peu la machine".

Il a mis près de dix ans entre son premier album et son deuxième, Golden Cages, sorti l’an dernier, parce qu’il parcourt le monde, scrute, discute, écoute. Surtout, l’enfermement créatif dans un studio l’oppresse. Son truc, c’est la scène. "Je ne suis pas maître de ce qui arrive sur scène, je suis juste le canal de ce que je ressens, de ce que les musiciens me donnent et je suis juste là pour le dialogue de cœur à cœur. Le plus important pour moi, c’est que chacun sorte des concerts plus allégé, apaisé, avec la conscience qu’on appartient tous à la famille de l’humanité".

Il y a des rencontres, dans une carrière, qui marquent un peu. Et on peut ranger le chanteur sénégalais dans cette case.

Faada Freddy surplombant la scène vençoise. Photo Frantz Bouton.

Souvenir de son concert vençois peut après l'attentat de 2016

23 juillet 2016, Faada Freddy est l’une des têtes d’affiche des Nuits du Sud de Vence. Mais à cette époque, la Côte d’Azur est sonnée, choquée, meurtrie. Le 14 juillet, un camion a emporté la vie de 86 victimes sur la Promenade des Anglais. Une horreur sans nom. Mais la vie, autour, continue.

"Après les attentats de Nice, il y avait plutôt un climat de méfiance qui régnait. Et la seule chose dont je me rappelle, c’est que quand je jouais, j’avais l’impression que les gens avaient ‘‘oublié’’ ce qui s’était passé, se souvient l’artiste sénégalais. Et c’est ça le rôle de la musique, de nous rappeler que nous avons le droit d’espérer, nous avons le droit de rêver. Dans un monde où la guerre est devenue un gros business, de rappeler qu’on peut encore avoir foi en l’humanité, une humanité qui se regroupe autour de valeurs qui nous unissent: mettre de côté les problèmes de religion, de nationalité, du passeport et de savoir que la paix c’est l’outil premier pour vivre ensemble."

Sa voix calme, douce, permet de prendre son message d’espoir en plein cœur. Faada Freddy est un pacificateur et quand il monte sur scène, il espère donner quelque chose d’intense.

"C’est ça le rôle de la musique: nous rappeler que nous avons le droit d’espérer"

Ce n’est pas un hasard si son dernier album, Golden Cages, appelle à s’ouvrir aux autres. "On vit dans des cages dorées, où on est dans un confort, où finalement notre confort est devenu notre propre prison. On ne peut plus se défaire de notre confort. Par exemple, au début, on avait créé la machine pour aller plus vite, pour être plus rapide, pour communiquer. Aujourd’hui, les couples sont ensemble dans le même lit, ils ne parlent même pas, chacun est sur son téléphone, et on s’est enfermés dans ce qu’on a créé, c’est une prison dorée. Je pense que c’est mon titre préféré dans l’album, raison pour laquelle cet album s’appelle ainsi, c’est une chanson qui appelle à la liberté de l’esprit car la liberté ça commence dans la tête ", conclut le chanteur.

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