"Ma fille est très fière de moi": rescapée de l’attentat du 14-Juillet à Nice, elle a choisi de côtoyer la mort pour mieux vivre

Laetitia Robbe était sur la Prom’, en famille, lors de l’attaque terroriste au camion bélier en 2016. Un choc. Une dépression. Et un changement de vie, comme une mission.

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Stéphanie Gasiglia Publié le 17/11/2023 à 08:00, mis à jour le 17/11/2023 à 09:34
Laetitia a décidé de se servir de son drame personnel pour aider ceux qui souffrent de la mort d’un proche. (Photo Cyril Dodergny)

Ce soir-là, Laetitia Robbe a enterré 38 ans de sa vie. Avec son ex-mari et sa fille, Ornella, alors âgée de 12 ans, elle est descendue sur la Prom pour admirer le feu d’artifice. Ce 14 juillet 2016, c’est un camion conduit par un terroriste qu’elle voit écraser la foule, sans pitié et avec détermination. "Je n’ai perdu personne, nous n’avons pas été blessés", dit-elle, 7 ans après, comme si elle ne se sentait pas encore légitime en tant que victime. "On a choisi de ne pas rentrer chez nous mais d’aider, sur place. Je me suis dit que si je devais pousser mon dernier souffle, j’aurai voulu que quelqu’un me tienne la main, même un parfait inconnu", chuchote Laetitia qui a fêté ses 45 ans. Quarante-cinq et une nouvelle vie. Une "chouette" nouvelle vie, confie-t-elle.

"Travailler avec l’humain dans la peine"

Après deux ans d’une sévère dépression, elle a plaqué son boulot de commerciale: "Un matin, je me suis dit: “Allez j’ai beaucoup de chance d’être en vie, je dois m’y accrocher". Pendant le Covid, j’ai travaillé au palais des Expositions pour la vaccination », raconte-t-elle. Un déclic. "J’ai su que je voulais travailler avec l’humain. Mais avec l’humain dans la peine", sourit Laetitia.

Elle regarde autour d’elle. Il y a des fleurs artificielles, des plaques funéraires: voilà la nouvelle vie de Laetitia. Côtoyer la mort et la souffrance de ceux qui ont perdu un proche.

Elle vient de prendre la tête des pompes funèbres PFG à Gorbella. Elle accompagne les gens dans le pire moment de leur vie: "Les gens ne trichent pas à ce moment-là".

"Ma résilience"

Ce métier, elle a embrassé comme une bouée de sauvetage. "C’est ma résilience à moi, un instinct vital. Une immense satisfaction: je me dis pour ce défunt, j’ai réussi à un peu soulager la famille, j’ai réussi à leur enlever un peu de contrariétés. Et j’aime bien savoir qui j’enterre, j’essaie de connaître un peu la personne, c’est important", argumente Laetitia. Qui ne leur parle jamais de l’attentat et de ce qu’elle a vécu. "Je ne suis pas plus légitime qu’une autre, mais je comprends par quoi ils passent et encore plus lorsqu’il s’agit de deuil particulier, comme les accidents. Ça me parle, ça résonne en moi, je sais que je rends service", confie la rescapée du 14-juillet. Ce 14-juillet qui la suivra partout, tout le temps. "Ce n’est pas parce que l’on s’en remet que l’on oublie", explique-t-elle.

"Ma fille est très fière de moi"

Le procès qui s’est tenu en fin d’année 2022, elle l’a suivi de loin, via la web radio. Sa fille, en revanche, a témoigné. Ornella a 19 ans aujourd’hui. "Passer à la barre a été un soulagement pour elle. Elle n’a pas voulu que j’entende son témoignage et j’ai respecté sa volonté", révèle Laetitia. "Ma fille est très fière de moi, de mon nouveau travail." Les pompes funèbres, tellement atypique pour se redonner goût à la vie. "Je sais", rigole la quadragénaire, "d’ailleurs cela ne me serait jamais venu à l’idée avant".

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