Des centaines d’étudiants de Monaco plongés dans un escape game lors d’une soirée de fête qui se termine en drame

Un scooter accidenté, des rubalises estampillées "police", des effets personnels éparpillés au sol. Et dix jeunes enquêteurs, gilet pare-balles bien en évidence, déterminés à comprendre comment Thomas, la vingtaine, a été plongé dans le coma au Centre hospitalier Princesse-Grace après une nuit de fêtes. A-t-il consommé à outrance de l’alcool, voire pris de la drogue? Allait-il trop vite au guidon de son deux-roues? A-t-il grillé un feu rouge?

Le mystère demeure entier.

On vous rassure d’emblée, cette scène plus vraie que nature ne s’est pas jouée dans les rues de la Principauté – théâtre, on le sait, de trois accidents mortels depuis janvier 2023 – mais dans les anciens locaux de la Direction de l’Éducation nationale de la Jeunesse et des Sports à l’Annonciade, à la faveur d’un escape game géant orchestré par la Croix-Rouge monégasque, Fight Aids Monaco et Be Safe pour les jeunes de la Principauté.

Format rythmé et interactif

Ainsi, jusqu’à la semaine prochaine, des centaines d’élèves de Seconde et d’étudiants de l’International University of Monaco sont sensibilisés sur "les dangers festifs" et les bonnes attitudes à adopter en soirée ou sur les lieux d’un accident. "On a pensé un format immersif, ludique, fun et non moralisateur, pour accrocher les jeunes générations et que les informations soient mieux assimilées. C’est une autre manière de faire de la prévention", confie Quentin Matton, directeur et fondateur de l’association niçoise G-Addiction Jeunesse citoyenne, mandatée par les trois associations à la suite des deux graves accidents routiers survenus à la mi-décembre 2024. Le gouvernement princier avait, quant à lui, annoncé l’intensification des contrôles de police et le dépôt prochain d’un projet de loi sur la sécurité au Conseil national.

Ici donc, sur ce plateau immersif de 100m², les participants ne demeurent pas passifs mais sont acteurs pendant une heure. Deux équipes s’affrontent et, pour garder concentrées les troupes et les tenir en haleine, le format se veut interactif et rythmé.

Toutes les 15 minutes, nouvelle pièce et nouveau décor: les enquêteurs passent des lieux de l’accident au commissariat de police avant de pénétrer dans l’appartement de la jeune victime – où Thomas et sa bande d’amis se sont ambiancés – puis se rendent à la discothèque. Les participants fouillent tous azimuts, soulèvent des objets, dénichent des indices, déchiffrent des énigmes, ouvrent des coffres grâce à des combinaisons chiffrées, assemblent les pièces d’un puzzle.

"Quand on aime une personne, on prend soin d’elle"

Au fil des minutes, les messages de sensibilisation sont subtilement amenés. "On parle des risques liés à la consommation d’alcool et de stupéfiants – un cocktail explosif qui multiplie par 29 le risque d’accident; des solutions à Monaco pour rentrer à la maison en toute sécurité; des gestes qui sauvent lorsque l’on arrive sur un accident; de la notion de consentement en soirée; de la prise de risques lors de relations sexuelles non protégées; de la vitesse et des équipements obligatoires et recommandés à deux-roues", égrène Quentin Matton.

Mais aussi, et surtout, du rôle primordial de l’entourage: familial, pour ce qui a trait à l’éducation aux bons comportements, et amical pour la surveillance en soirée. "Quand on aime une personne, on prend soin d’elle surtout si elle est dans un état de vulnérabilité. Quitte à se disputer très forts avec ses amis, il vaut mieux qu’ils ne prennent pas la route en ayant bu", estime Camille Gottlieb, présidente de l’association Be Safe, dont les navettes gratuites ramènent à bon port les noctambules de Monaco et de son pourtour.

En l’occurrence, dans le scénario de l’escape game, les jeunes enquêteurs découvrent la défaillance du cercle d’amis qui a couvert la victime auprès de sa petite amie, inquiète, en lui envoyant la photo d’un éthylotest négatif. "Il faut que tout le monde prenne conscience que ça n’arrive pas qu’aux autres. a n’arrive pas qu’aux jeunes non plus, mais aussi à des personnes plus âgées qui sont censées être sensibilisées à cette question. On pense que l’alcool rend invincible, intouchable, mais en réalité, on n’est jamais aussi vulnérable", conclut Camille Gottlieb.