"Continuer à se souvenir de Dilara et Ayana": ils se sont réunis à Monaco en mémoire des deux étudiantes mortes dans un accident en 2023

Ce jeudi à la sortie du tunnel Millenium, à Monaco, un hommage a été rendu à Dilara et Ayana, deux étudiantes de l'IUM qui avaient péri dans un accident de la route fin 2023. Famille et amis témoignent de cette incommensurable peine.

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Thibaut Parat Publié le 19/09/2025 à 04:15, mis à jour le 19/09/2025 à 04:15
Ayana et Dilara (à droite). Photo Cyril Dodergny

En silence, ils traversent la route, bouquets de fleurs en mains, avant de les déposer délicatement sur le muret situé à la sortie du tunnel Millenium. Entre les roses et les pivoines, les portraits de deux jeunes femmes au visage angélique ont été disposés: celui d’Ayana et Dilara. C’est ici que ces étudiantes de l’International University of Monaco, qui avaient pris place dans l’Audi RS4 d’un camarade fortement alcoolisé au volant, ont été victimes d’un terrible accident de la route, le 17 décembre 2023 vers 4h30 du matin. Un impact sur le muret à 107km/h qui a tué sur le coup la première et blessé grièvement la seconde, laquelle a succombé à ses blessures trois jours après. Deux autres étudiantes présentes dans l’habitacle cette nuit-là, Francesca et Dzana, ont certes survécu mais sont marquées à vie. Tant physiquement que psychologiquement.

"Chaque nuit, dans mes rêves, je les vois mourir"

Photo CyriL Dodergny.

"Chaque nuit dans mes rêves, je les vois mourir. Et être là, cela rend la chose encore plus réelle", témoigne, tremblante, Dzana. Présente ce jeudi aux côtés d’une quinzaine de proches amis des défuntes ainsi que de la famille de Dilara, venue d’Azerbaïdjan et à l’origine de la commémoration, l’Américaine de 22 ans avait à cœur de surmonter son traumatisme. "Il faut continuer à se souvenir des filles. Elles étaient mon tout, mes meilleures amies. Tout ce que je faisais à Monaco, c’était avec elles", sourit-elle.

Après l’accident et six mois de rééducation aux États-Unis, Dzara a bien tenté de revenir sur les bancs de l’IUM. Mais tout était différent. "Dilara et Ayana n’étaient plus là, je n’arrivais pas à me concentrer, on parlait dans mon dos, on regardait mes cicatrices sur mes jambes", témoigne-t-elle, en tenant fermement la main de son compagnon Maximilian avec qui elle vit à Monaco. Autrefois gymnaste et sportive accomplie, Dzana a désormais tiré un trait sur toute activité sportive. "Avant, j’étais capable de faire des sauts périlleux. Maintenant, je souffre quand je mets mes chaussures, quand je m’accroupis, quand je marche plus de 10 minutes. Je ne peux plus courir."

La date du procès fixée

Photo CyriL Dodergny.

Le récit de cette funeste nuit, elle le réserve pour le procès de Mirco P., le conducteur finlandais âgé de 22 ans au moment des faits, prévu le mardi 16 décembre. La date de son jugement a été annoncée récemment aux familles. "Enfin", saluent celles-ci. En juillet, Vugar Akhundov, père de Dilara, avait transmis à Monaco-Matin une lettre ouverte à l’attention de la société monégasque pour réclamer justice et dénoncer "une attente insupportable" [lire notre édition du 31 juillet]. "Nous refusons que cette tragédie devienne une normalité. Je ne veux pas que la mort de ma fille soit juste une statistique, un fait divers oublié", écrivait-il alors.

Digne dans sa peine, Vugar Akhundov a martelé un discours similaire, ce jeudi, lors de ce rassemblement autorisé par les autorités monégasques. "Cette action doit pouvoir attirer l’attention, marquer les esprits sur les conséquences que peut avoir un accident. Nous pensons aux enfants d’autres familles. Plus personne ne doit subir cela", insiste-t-il, se faisant également le porte-parole de la mère d’Ayana, trop meurtrie par la disparition de sa fille unique pour faire le déplacement depuis le Kazakhstan.

L’homme se dit profondément reconnaissant de la présence des amis, aussi étudiants à l’IUM. "En les rencontrant et en leur parlant, on récupère une petite partie de notre fille. Pendant deux ans, ils ont partagé des moments de vie." Parmi ces proches, il y a Lara, une Niçoise de 21 ans, en 3e année de marketing et communication. "Ayana est une des premières personnes que j’ai rencontrée sur Monaco. Avec une personnalité aussi pétillante, ça a tout de suite matché. J’ai moins connu Dilara, mais les deux étaient pleines de vie, de rêves, toujours rayonnantes et de bonne humeur. Des personnes solaires. Quand elles étaient là, on sentait leur présence", décrit-elle.

"Je viens ici pour la sentir"

Près de 25 personnes étaient présentes ce jeudi après-midi sur les lieux de l’accident, dont l’une des victimes survivantes Dzara et les parents de Dilara. Photo CyriL Dodergny.

Cette puissante présence, la maman de Dilara aspire à la re(trouver) dès lors qu’elle se rend en Principauté. "Ma fille était tellement attachée à Monaco. Cela lui donnait des ailes, de l’inspiration lorsqu’elle composait des poèmes. Cela peut sembler bizarre mais je viens ici pour la sentir. Je me rends dans la cour où elle habitait, je parcours le chemin qu’elle empruntait, je fréquente les mêmes cafés, explique Nargiz Akhundova. C’est précieux pour moi qu’on ne l’oublie pas. J’ai peur de cet oubli." À l’image du chef étoilé Yannick Alléno, dont le fils a été mortellement fauché en mai 2022 par un chauffard ivre, la famille de Dilara entend mener son devoir de mémoire avec un mantra: "Plus jamais".

Très active pour faire vivre la mémoire de Dilara et Ayana, les deux étudiantes de l’International University of Monaco disparues dans un accident de la route à Monaco, fin 2023, la famille de cette première est soutenue dans ses démarches par l’Association d’aide aux victimes d’infractions pénales dirigée par Valérie Campora-Lucas. Ce vendredi, au lendemain d’une commémoration sur les lieux de l’accident , elle rencontrera le conseiller de gouvernement-ministre de l’Intérieur, Lionel Beffre pour, entre autres, solliciter son appui pour la plantation de deux arbres en leur mémoire à Monaco.

Les parents de Dilara ont aussi découvert un clip de prévention routière réalisé par Gianni Angelini, au cœur duquel leur fille, ressuscitée grâce à l’intelligence artificielle (IA), est le personnage central, fait le récit de l’accident et appelle à la prudence sur les routes. Le film de 2 minutes, que Monaco-Matin a pu visionner, se veut "choc". "Nous prévoyons de le diffuser via Instagram, TikTok et Facebook puis j’ai envie de le montrer dans les cinémas avant les films, confie Vugar Akhundov, le papa. Je veux mettre fin aux accidents mortels sur les routes de Monaco et les rendre plus sûres. La vie de ces filles comptait. Elles ne sont pas devenues victimes de cette tragédie en vain. Avec l’IA, il est très difficile de transmettre des émotions mais je pense que nous y sommes parvenus avec ce film."

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