"Les urines montrent une sur-imprégnation aux pesticides": vivre à proximité de vignes expose adultes et enfants, même à plusieurs centaines de mètres, selon une étude
Air ambiant, cheveux, urine et poussières… Une étude de grande ampleur révèle l’exposition des riverains aux pesticides liés à la viticulture. La Croix-Valmer (83) et Cassis (13) font partie du protocole.
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Sonia BonninPublié le 16/09/2025 à 05:15, mis à jour le 16/09/2025 à 05:15
Vivre à proximité de vignes peut entraîner une sur-imprégnation de l’organisme aux pesticides, selon l’étude Pestiriv.Photo So.B.
Vivre à proximité de vignes, entraîne la "sur-imprégnation" de son organisme aux pesticides, et plus encore "pendant les périodes de traitement [du vignoble]". Voilà le premier et principal enseignement de l’étude Pestiriv, menée par Santé publique France et l’Anses (1), rendue publique ce lundi 15 septembre.
Menée dans six grandes régions viticoles de France, dont Provence-Alpes-Côte d’Azur, l’étude démontre quels sont les deux critères les plus significatifs de l’exposition aux pesticides. D’une part, la proximité entre le lieu d’habitation et le champ de vigne, d’autre part la quantité de pesticides utilisés.
Mais il y a des nuances. Si "une proximité inférieure à 50m entraîne une sur-imprégnation, l’impact des traitements [de la vigne] est observé jusqu’à plusieurs centaines de mètres", souligne le rapport. Décryptage d’une étude ambitieuse, malgré des aspects décevants.
Pourquoi avoir choisi la viticulture?
La vigne fait partie des cultures qui ont le plus recours aux produits phytosanitaires, indiquent les auteurs, "tant en fréquence qu’en quantité de vente de ces traitements". C’est aussi une culture pérenne, située sur la même parcelle chaque année. En France, 4% de la population vit à proximité d’un champ de vigne. L’étude permet de produire des données chiffrées, une première sur le sujet.
Il n’est quand même pas possible d’en faire une généralité absolue. Le printemps et l’été 2022, couverts dans la période étudiée, ont été marqués par la chaleur et un déficit de pluie, "ce qui a pu limiter le nombre de traitements nécessaires pour les vignes".
Des données solides dans toute la France
L’étude "répond à un besoin crucial de santé publique, de disposer de données fiables, robustes, sur l’exposition en vie réelle des populations aux produits phyto-pharmaceutiques et de les croiser avec des données environnementales", décrit le docteur Caroline Semaille, directrice générale de Santé publique France.
Avec 250 communes dans six régions et 56 pesticides recherchés (fongicides, herbicides et insecticides), l’étude offre "une photographie précise des expositions des personnes", une transparence que "les riverains appellent de leurs vœux" et "qui peut être bénéfique pour la profession", estime Benoît Vallet, directeur général de l’Anses.
Dans notre région, six sites ont été choisis, dont La Croix-Valmer (Var) et Cassis (Bouches-du-Rhône). Mais il y a aussi le Vaucluse et Port-Saint-Louis-du-Rhône (site autre que viticole).
Près de 2.000 adultes et 750 enfants
Mesures de l’air ambiant, poussières, urines, cheveux. Près de 2.700 personnes ont participé à l’étude, 1.946 adultes et 742 enfants (entre 3 et 17 ans).
Chaque participant a été suivi pendant deux semaines. "Une mèche de cheveux reflète l’imprégnation moyenne sur les 3 derniers mois" et "un échantillon de poussières [a été] recueilli par aspirateur pour refléter la contamination moyenne du logement".
Principaux résultats
Infographie Santé publique France.
"Les pesticides recherchés dans les urines (au nombre de 12) ont été retrouvés dans la quasi-totalité des échantillons", détaille Clémence Fillol, responsable de l’unité surveillance des expositions, Santé publique France. L’imprégnation urinaire est de 15% à 45% plus élevée, que dans les zones éloignées de toute culture. Quant à la contamination des poussières, elle peut être exponentielle (jusqu’à +1.000%)
Pour les cheveux et l’air intérieur, les pesticides recherchés sont "plus fréquemment présents dans les échantillons recueillis en zones viticoles par rapport à ceux des zones éloignées de toute culture". Dans l’air ambiant (extérieur), sur 39 substances recherchées, 33 étaient détectées, dont 5 "dans plus de la moitié des échantillons" (souffre et cuivre, mais aussi le glyphosate et le folpel, typique des traitements de la vigne contre le mildiou).
Plus vulnérables, les enfants sont plus exposés
Pour l’essentiel, les résultats sont similaires pour les adultes et les enfants, sauf les plus jeunes, de 3 à 6 ans pour lesquels "l’imprégnation est plus élevée que le reste de la population". Il y a des raisons matérielles à cela. "Ils sont davantage en contact avec le sol, avec plus de contact main bouche et plus contaminés que les plus âgés", répond Santé publique France.
Vu les modalités de prélèvements des échantillons, notamment d’urine, il n’a pas été possible d’inclure les nourrissons dans l’étude, qui sont susceptibles d’être encore plus vulnérables.
L’étude n’établit pas un niveau de risque sanitaire
C’est un aspect décevant de l’étude, qui ne dit pas quelles sont les conséquences sanitaires de cette exposition aux pesticides. "ce jour, ces résultats ne permettent pas de conclure, sans analyse complémentaire, quant à l’existence de risque pour la santé des personnes vivant en zones viticoles." De même, aucune distance de précaution n’est établie.
Si des mesures sont bel et bien citées, elles en restent à "la recommandation, en priorité, de limiter l’utilisation des produits phytopharmaceutiques au strict nécessaire". C’est en tout cas le principal levier d’action cité, et cela concerne la profession viticole.
Mais le rapport écrit très clairement que "les connaissances sont déjà suffisantes pour guider des actions de prévention". "Une absence de mise en évidence [de la toxicité associée] ne [doit] pas être interprétée comme une non-association avérée."
1. Agence nationale de sécurité sanitaire
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