C’était une aberration de la loi 1.346 en date du 9 mai 2008. Jusqu’à présent en Principauté, les mineurs âgés de plus de 16 ans étaient en capacité légale d’acheter du tabac, quelle que soit sa forme, et la présence dans les fumoirs du pays ne leur était pas interdite.
Avec le vote du projet de loi n°1104 ce jeudi 15 mai au Conseil national, à l’unanimité des 18 élus présents (1), ce n’est désormais plus possible et le critère légal a judicieusement été rehaussé de deux années, soit l’âge de la majorité. Et ce, pour "protéger les mineurs des effets délétères du tabagisme", soutient Christophe Robino, conseiller de gouvernement-ministre des Affaires sociales et de la Santé.
Plus globalement, ce texte permet une vaste mise en conformité de la législation avec l’évolution du marché du tabac et les habitudes de consommation, compte tenu du foisonnement de produits connexes au tabac et de dispositifs électroniques. "On élargit la définition des produits du tabac. Plus question de laisser les industriels jouer avec les limites. Si un produit ressemble au tabac, agit comme du tabac, alors c’est du tabac et il sera encadré comme tel", a déclaré l’élu rapporteur, Roland Mouflard, qualifiant la nicotine de "poison".
Interdiction totale de la puff
Parmi les nouveautés sur le marché, les puffs, ces cigarettes électroniques jetables très prisées de la jeune génération (2) pour leur coût accessible, son marketing attractif et ses saveurs acidulées. Leur interdiction totale sur le territoire de la Principauté est d’ailleurs un point majeur du texte adopté, car elles constituent, aux yeux des autorités monégasques, "une porte d’entrée non désirable vers le tabagisme".
Cette prohibition, que les élus avaient appelée de leurs vœux dans une proposition de loi votée en octobre 2024, porte aussi bien sur la fabrication, la distribution, la vente, la consommation, la fabrication que l’offre à titre gratuit. Avec des peines d’amende graduées (jusqu’à 200 euros pour la consommation, 18 000 euros pour la vente et 90 000 euros pour la fabrication), selon un souhait de la Commission des Intérêts sociaux et des Affaires diverses.
"Le gouvernement a fait ce choix d’une position cohérente, responsable et résolument pionnière (...) en raison de leur attractivité pour les jeunes, des risques sanitaires qui en découlent mais aussi de leur impact environnemental préoccupant", justifie Christophe Robino.
De nouveaux lieux où il est interdit de fumer ou consommer du tabac
Enfin, le texte prévoit l’extension des lieux où la consommation du tabac est proscrite, avec ou sans dispositif électronique, dans une volonté affirmée de renforcer la lutte contre le tabagisme passif. "L’interdiction est aménagée pour certains lieux, tels que les plages du littoral et les piscines publiques [mais aussi les locaux commerciaux, ndlr] ; elle est générale pour d’autres, à l’instar des moyens de transport collectif, des aires de jeux ou des véhicules transportant des mineurs", détaille Christophe Robino.
Cette interdiction ne s’applique néanmoins pas aux tabacs à priser et aux produits à usage oral – comme les "pouches", ces sachets de nicotine à placer contre la gencive –, afin de "ne pas entraver les sevrages" chez les majeurs utilisant ces substituts dans "une démarche thérapeutique", nuance Roland Mouflard.
En revanche, ces produits sont bel et bien bannis des établissements destinés à accueillir des mineurs. "Il est apparu urgent de tenir compte de cette habitude alarmante de consommation et de renforcer la protection de la jeunesse", précise l’élu.
"Campagne de sensibilisation ambitieuse et ciblée"
Sur ce sujet qui a marqué une convergence de vues entre le gouvernement et le Conseil national, tous s’accordent à dire que la sensibilisation doit être au cœur de la lutte contre le tabagisme. "Cette loi ne pourra porter pleinement ses fruits sans une politique active de prévention (...) au moyen d’une campagne de sensibilisation ambitieuse et ciblée pour informer, alerter et responsabiliser l’ensemble de la population", conclut Nathalie Amoratti-Blanc.
(1) Étaient absents: Karen Aliprendi, Jade Aureglia, Christophe Brico, Mathilde Le Clerc, Fabrice Notari et Balthazar Seydoux.
(2) 18% des adolescents de 13 à 16 ans ont déjà utilisé de la puff et 34% d’entre eux ont commencé leur consommation de nicotine par ce produit, selon une étude menée en 2024 par l’Alliance contre le tabac et l’institut BVA.
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