"Elle est dans ma tête, elle ne m’abandonne jamais, je la trouve encore plus belle, quand elle s’habille en reggae..." Nous sommes en août 2009 et un titre passe sur toutes les ondes radio: Lady Melody, d’un certain Tom Frager. ce vendredi soir, devant un public privilégié et dans un cadre idyllique, le chanteur était en concert à l’hôtel Cap Estel, à Èze, dans le cadre des Nuits Dime On. "Jouer sous les arbres, en plein air et près de l’eau, je pense que ça correspond bien à ce que je propose", confie-t-il. On pourrait penser que les paysages de la Côte d’Azur sont étrangers à cet ancien surfeur né à Dakar, passé par le Mali et la Guadeloupe avant d’atterrir dans le Sud-Est de la France, et pourtant.
L’école de la Pinède à Cagnes-sur-Mer et le surf à Cannes
"J’ai vécu pendant trois ans à Cagnes-sur-Mer avant de déménager en Guadeloupe", glisse l’artiste, une émotion dans la voix. "Je me souviens encore de mon école primaire, La Pinède, dans le centre-ville de Cagnes. J’en garde de très bons souvenirs, je faisais du tennis, je jouais au football dans le petit club de la commune et je faisais un peu d’Optimist [petit voilier souvent utilisé pour l’apprentissage de la voile chez les enfants, ndlr]."
Et sa relation avec la Méditerranée ne s’est pas limitée aux petits bateaux. L’ancien champion de surf garde un souvenir émerveillé d’une session historique près de Cannes: "J’étais venu pour un concert dans la région et des amis m’avaient dit d’emporter ma planche. Après quelques jours à attendre la houle... elle est arrivée. Des vagues magnifiques de plus de deux mètres aux îles de Lérins, comme il en existe, à mon avis, tous les dix ans ici!"
Le phénomène Lady Melody demeure le chapitre le plus étonnant de sa carrière de chanteur, un paradoxe vivant qui le poursuit autant qu’il le porte.
L’effet "Lady Melody"
"Je lui dois beaucoup parce que c’est elle qui m’a fait connaître", reconnaît-il avec gratitude. Le succès fut un véritable tsunami: 150.000 albums et 100.000 singles vendus, le titre devient l’un des tubes de l’été 2009. Pourtant, cette notoriété soudaine s’accompagne d’une certaine amertume: "Je n’ai pas eu la chance d’être relayé ensuite pour montrer que je ne suis pas l’auteur que d’une chanson, j’en suis à mon cinquième album."
Le plus ironique reste que "personne ne voulait de Lady Melody au début". Quinze ans plus tard, la chanson "est rentrée dans le patrimoine des chansons que l’on fredonne tous, un peu comme Il est libre Max ou Femme libérée! " Comme il l’a fait sur les vagues des îles de Lérins, Tom Frager continue de surfer sur le paradoxe de sa carrière, porté par une mélodie qui n’en finit pas de déferler. Mais son odyssée musicale n’est pas terminée, son prochain album sortira le 24 octobre (lire par ailleurs).
"Je me sens légitime pour parler des océans"
Pour Tom Frager, la protection des océans n’est pas une mode, c’est une vocation viscérale née de ses années de surf professionnel et de son attachement indéfectible à l’eau. "Moi qui ai grandi dans les vagues, je me sens légitime pour parler des océans", confie l’artiste qui a été ambassadeur de Surfrider Foundation et qui, depuis, a fondé sa propre association, Le Mouvement Bleu. Son engagement prend aujourd’hui une dimension nouvelle avec Septième Continent, son prochain album prévu pour le 24 octobre, dont le titre fait directement référence au continent de plastique flottant dans le Pacifique.
Particularité de ce projet: il s’agit d’un album intégralement constitué de collaborations.
Duos avec Hugues Aufray, Ben Mazué, Tiken Jah Fakoly... et ouverture de Paul Watson
Le chanteur s’est entouré d’artistes aux univers complémentaires, d’Hugues Aufray à Zaho en passant par Danakil, Ben Mazué, Guillaume Grand ou encore Tiken Jah Fakoly. Chaque featuring apporte sa couleur à l’ensemble, créant une mosaïque musicale allant "d’une chanson avec Hugues Aufray à la Bob Dylan, très seventies, à un morceau beaucoup plus actuel avec Zaho".
Symbolique forte, l’album s’ouvre avec la voix de Paul Watson, militant écologiste et fondateur de l’ONG Sea Sheperd. "Il a fait un discours, exprès pour l’album, que j’ai mis en musique, pour venir cautionner cette démarche." Une collaboration qui donne au projet une légitimité environnementale dépassant le simple geste artistique. "Personne n’a souhaité m’accompagner sur ce projet en tant que maison de disques", déplore l’artiste, qui a essuyé ces refus sans se décourager. Alors Tom Frager transforme sa notoriété en plateforme militante. Un cap qu’il maintient "contre vents et marées", comme il aime le dire, fidèle à cette connexion qui le lie à l’eau depuis ses premières navigations en Optimist, au large de Cagnes-sur-Mer...
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