Homicide raciste, acte terroriste? C'est une première: pourquoi le parquet national antiterroriste est saisi du crime de Puget-sur-Argens

C'est la première fois depuis sa création le 1er juillet 2019 que le parquet national antiterroriste est saisi pour un homicide raciste lié à l'extrême droite. La compétence du parquet de Draguignan a été écartée.

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Peggy Poletto Publié le 04/06/2025 à 19:38, mis à jour le 04/06/2025 à 19:43
Sur les réseaux sociaux, Christophe B. parlait d'armes à feu, sans avoir de nombreuses interactions avec ses 111 "amis" Photos Facebook

Le parquet de Draguignan n'était-il pas compétent pour prendre en charge le suivi judiciaire du meurtre à connotation raciste d'Hichem Miraoui, qui aurait été commis le 31 mai par Christophe B., un voisin dont les références xénophobes pullulaient sur son compte Facebook? 

Le dimanche 1er juin 2025, Pierre Coutennier, procureur de Draguignan communiquait sur le drame survenu la veille, en fin de soirée à Puget-sur-Argens. Une femme avait signalé que son compagnon Christophe B., un tireur sportif de 53 ans, chaudronnier de profession, venait de tirer sur un voisin. 

Le procureur de Draguignan évoque les vidéos de revendication

Les militaires de la gendarmerie nationale avaient constaté sur les lieux le décès d’une première victime, mortellement blessée par balle, ainsi qu'une seconde personne, également touchée par balle au niveau de la main.

Il était fait état de deux vidéos diffusées avant et après son passage à l’acte: "deux vidéos sur son compte d’un réseau social au contenu raciste et haineux", indiquait le représentant du parquet de Draguignan.

Interpellé par les effectifs de l'antenne du GIGN d'Orange, avec dans son véhicule plusieurs armes de type pistolet automatique, fusil à pompe et arme de poing, le suspect faisait l'objet d'une procédure d'enquête de flagrance des chefs de "meurtre commis en raison de l’appartenance ou de la non appartenance, vraie ou supposée de la victime à une ethnie, une nation, une prétendue race ou religion déterminée commis en concomitance avec un autre crime et de tentative de meurtre commis en raison de l’appartenance ou de la non appartenance, vraie ou supposée de la victime à une ethnie, une nation, une prétendue race ou religion déterminée commis".

Ce que dit le code pénal

La découverte des vidéos de revendications, la personnalité de l'individu qui ne cachait pas sa haine des étrangers et sa passion des "calibres" ont conduit le parquet national antiterroriste à reprendre la main sur les investigations. 

Créé le 1er juillet 2019, le Pnat intervient dans trois hypothèses en matière de crimes et délits, comme le précise le site du gouvernement:

- les crimes et délits terroristes ainsi que certaines infractions visant des personnes mises en cause pour des actes de terrorisme;

- les crimes et délits relatifs à la prolifération des armes de destruction massive;

- les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité relevant auparavant de la section A3 du parquet de Paris.

Quid de l'affaire concernant la tuerie de Puget-sur-Argens? 

Comme le souligne le journaliste spécialiste du suivi des affaires criminelles et des mouvances d'extrême droite, Paul Conge, la définition du terrorisme découle de l'article 421-1 du code pénal: "Les infractions commises intentionnellement, en relation avec une entreprise individuelle ou collective, ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur, constituent des actes de terrorisme".

Les messages haineux propagés sur les réseaux sociaux par Christophe B. et les deux vidéos postées sur son compte Facebook avant et après son acte où il mentionne "Ce soir, on fait un carton, ce soir on va s'amuser, ce soir je vais mourir, j vais crever. 

Moi, y a pas d'allégeance à Al-Qaida ou quoi que ce soit, moi, c'est l'inverse, c'est l'allégeance au bleu-blanc-rouge", ainsi que des éléments saisis par les enquêteurs ont conduit au dessaisissement du parquet varois, au profit du Parquet national antiterroriste (Pnat) dès le lundi 2 juin. 

Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau s'est d'ailleurs exprimé au lendemain du meurtre raciste d'Hichem Miraoui, sur ce qui demeure une potentielle attaque terroriste. Le premier policier de France a confirmé que le "Pnat s'est saisi parce qu'il considère qu'il y a une dimension terroriste". Il a évoqué un crime "prémédité et signé", "c’est un crime raciste au vu des éléments que nous avons", a précisé en début de semaine. 

La suite de la procédure

À l'issue d'une garde-à-vue qui peut être prolongée jusqu'à 96 heures en matière de terrorisme, le Varois sera-t-il mis en examen d'homicide portant sur le caractère terroriste et raciste des faits? 

S'agit-il du comportement haineux d'un homme isolé, anti-système, antivax, anti-police, anti-tout, à la dérive? S'agit-il d'une forme de paranoïa qui a conduit le quinquagénaire passionné d'armes, fan du film Fightclub, détestant l'étranger à "passer à l'action" comme nous l'a suggéré un psychiatre? "Comme s'il était seul contre tous...". 

Selon un communique de Julie Lechanteux, la députée RN de la 5e circonscription du Var, dans laquelle se trouve la commune de Puget-sur-Argens, cet assassinatse situe dans un contexte "d’ensauvagement" et de « violences » dont la France serait, selon elle, le théâtre. 

Mis en examen pour quels motifs?

Elle a déclaré au Monde que Christophe B. ne figure pas dans les adhérents du Rassemblement national. "Il a aucun lien et aucune cohérence idéologique, c’est juste quelqu’un d’isolé. On ne peut pas être rendu responsable des dingueries de certaines personnes qui adhèrent à nos idées avec extrémisme". 

La personnalité et l'état psychiatrique du mis en cause devraient permettre de connaître les motivations réelles de cet individu. Son sort judiciaire et, le cas échéant, les motifs de mise en examen doit être connu dans les prochaines heures.

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