"L’écologie est un sujet qui concerne toute l’humanité": marraine de la nouvelle exposition du Musée océanographique, Mélanie Laurent se confie à Monaco
Marraine de la nouvelle exposition du Musée océanographique, Mission Polaire, l’actrice et réalisatrice Mélanie Laurent évoque son combat et la façon dont il faut sensibiliser les plus petits.
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Thibaut ParatPublié le 02/06/2022 à 13:53, mis à jour le 02/06/2022 à 13:54
Mélanie Laurent est une fervente militante pour la protection de l’environnement.Photo Jean-François Ottonello
User de sa notoriété pour prêcher la bonne parole environnementale. Pour Mélanie Laurent, actrice césarisée (N.D.L.R.: meilleur espoir féminin pour son rôle dans "Je vais bien, ne t’en fais pas".) et réalisatrice reconnue, cela coule de source.
Et tous les supports sont bons pour évoquer l’inéluctable dégradation de la planète provoquée par la main de l’Homme mais, surtout, les solutions nous permettant d’entrevoir un monde meilleur.
Son documentaire Demain, couronné d’un César en 2016,recense dix initiatives dans dix pays pour répondre aux défis environnementaux et sociaux. Son conte pour enfants Les Larmes d’Eugénie, tout aussi poétique qu’écologique, aborde la surpêche, l’un de ses chevaux de bataille.
Celle qui a milité aux côtés de Greenpeace et joué sous les ordres de Quentin Tarantino dans Inglourious Basterds est désormais marraine de l’exposition Mission Polaire au Musée océanographique. Inaugurée ce mercredi par le prince Albert II, celle-ci ouvrira ses portes au public le 4 juin, pour deux ans, et proposera une immersion au cœur de l’Arctique et l’Antarctique (nous y reviendrons plus en détail dans une prochaine édition).
À cette occasion Mélanie Laurent nous a accordés une interview. Un autre support pour clamer qu’il faut agir, et vite.
Quelles sont les raisons qui vous ont poussé à devenir marraine de l’exposition Mission Polaire?
C’est très difficile de refuser un tel honneur. J’ai l’impression qu’on va faire de très belles et grandes choses ensemble. Je suis aussi excitée, heureuse et, surtout, très impressionnée par le travail qui est réalisé ici, à l’Institut océanographique: d’éducation, d’éveil, d’émerveillement. En tant que metteuse en scène, je suis curieuse de voir tous les vecteurs possibles, de création et de mise en scène, que l’on peut utiliser pour essayer de toucher les gens.
On dit souvent que de la bonne santé des pôles dépend l’équilibre de la planète Terre. Malheureusement, ces zones sont de plus en plus fragilisées…
Cela m’inspire beaucoup de tristesse. On est en train de faire fondre les pôles, de faire disparaître des espèces et les coraux, de faire brûler nos poumons… On entend de moins en moins les oiseaux chanter et on continue à se quereller pour des bêtises, à s’émerveiller pour des choses absurdes, à se détester très facilement. Il y a des matins, on se dit "à quoi bon?". Et puis d’autres matins, la plupart pour moi, je me dis que ça va être la fin d’un monde, en espérant que ce ne soit pas la fin du monde. S’il y a un nouveau monde à créer, on peut le faire avec créativité, espoir, solutions…
"On a besoin d’être bousculé, de passer par la période de l’horreur pour avoir envie de changer"
Dans le documentaire "Demain" coréalisé avec Cyril Dion, vous aviez justement pris le parti de vous focaliser sur ces solutions plutôt que de verser dans le catastrophisme… Pourquoi?
Il y a beaucoup de documentaires catastrophistes et ils servent à quelque chose. Quand on voit un documentaire très choquant, on repart toujours différemment. On a besoin d’être bousculé, de passer par la période de l’horreur pour avoir envie de changer. Sauf que, depuis des années, on ne nous propose pas beaucoup de solutions. "Demain" était l’un des premiers documentaires à vouloir montrer la société et le monde qui peuvent exister demain, avec la proposition de solutions partout, plutôt que de dire à quel point on ne va pas s’en sortir.
Le GIEC (N.D.L.R.: Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), à travers ses rapports successifs, ne cesse de nous alerter avec la projection de scénarios cataclysmiques mais, pourtant, on a l’impression qu’on continue à foncer droit dans le mur. Les États n’en font-ils pas assez ou bien est-ce une responsabilité collective: les politiques, les particuliers, le monde économique?
Le débat est complexe. Quand on ne donne aucun moyen aux citoyens de se défendre ou de faire mieux, je trouve cela injuste de leur dire que c’est à eux de changer. Il y a un pouvoir individuel, c’est sûr. L’éveil des consciences peut se faire par une vague, un mouvement, une manifestation. Au niveau des chefs d’État, quand je vois le pouvoir des lobbys, je me dis que c’est compliqué. Je suis un peu pessimiste là, non? [rires]. Ce qui me rend triste, c’est de ne pas avoir de leader. J’ai l’impression que l’écologie est devenue la mode dans certains programmes politiques ou qu’on s’en sert pour essayer de capter des gens. Il n’y a pas vraiment de programmes très concrets. Pourtant, c’est le seul sujet au monde qui concerne toute l’humanité. Le manque d’eau et la montée des océans toucheront tout le monde, riches comme pauvres, et tous les pays. Personne ne pourra aller se planquer quelque part.
"Je suis beaucoup
plus poussive avec mes enfants"
Le prince Albert II a visité, hier soir, cette nouvelle exposition en compagnie de Mélanie Laurent, marraine de celle-ci.Photo Jean-François Ottonello.
D’où est né cet engagement pour la préservation de l’environnement?
C’était plutôt de l’éducation logique, sans que ce soit du tout activiste, poussif et énervé. L’écologie, finalement, c’est revenir à la logique des choses.
On ne laissait pas l’eau couler car cela nous paraissait déjà absurde, on ne gâchait pas, on éteignait les lumières. Des choses simples. Il y avait aussi le rapport avec la nature, la poésie dans les histoires que l’on raconte à des enfants. Je suis beaucoup plus poussive avec mes enfants. Ma fille de deux ans et demie fait des bisous aux arbres. Mon fils, sur le chemin de l’Institut océanographique, me disait "Maman, tu crois que ça sert à quelque chose tout ça?". Il se demande déjà, à neuf ans, si les solutions qu’on apporte vont servir à quelque chose…
En 2021, vous avez écrit un conte écologique et poétique Les larmes d’Eugénie pour aborder la problématique de la surpêche. C’est quoi la bonne manière pour parler aux enfants de protection environnementale?
Elle est sans limites. Cela peut être à travers un livre, un film, un dessin animé, une chanson, un institut, une exposition. Tout est une bonne excuse pour essayer de les toucher. La clef, c’est l’émotion. Avant 7 ans, ils sont dans une espèce de bulle où ils ont le sentiment qu’il y a encore des choses merveilleuses qui existent. Ils ne sont pas encore trop abîmés. C’est à ce moment-là qu’il faut les émerveiller, leur dire qu’il faut protéger le merveilleux car il est en train de disparaître. Sans leur faire peur. C’est une tâche assez complexe.
"On est la génération culpabilisée qui prend de plus
en plus conscience des dégâts"
Vous disiez aussi qu’on ne devrait pas mettre trop de pression sur cette nouvelle génération en lui disant qu’elle est la seule à pouvoir nous sauver car ce serait une histoire trop culpabilisante, trop violente…
Depuis peu, la génération au-dessus de nous commence à dire ‘‘pardon’’. Nous, on est la génération culpabilisée qui prend de plus en plus conscience des dégâts et on est en train de dire à nos enfants de devenir avocat et de défendre la planète, qu’il ne faut pas jeter un papier par terre, qu’il ne faut pas polluer les océans. Dans la classe de mon fils, en CE2, les enfants parlent de politique et d’engagement, ils ramassent les papiers par terre et s’insurgent quand quelqu’un ne le met pas à la poubelle… Je me dis, quand même, qu’ils ont déjà une vie avec beaucoup de pression sur leurs épaules. Notre travail à nous, c’est de leur trouver des solutions.
Votre engagement ne date pas d’hier. Regrettez-vous que les personnalités n’usent pas assez de leur notoriété pour sensibiliser sur ce sujet?
Je le déplore même. Je ne comprends pas qu’on ait accès aux médias et qu’on ne s’en serve pas. Quand on voit la portée que les personnalités peuvent avoir, ça me dépasse complètement.
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