Airbus et Boeing, équipent les hélicoptères des Spetsnaz, les commandos russes, engagés en Ukraine. Telle est la conclusion d’une enquête menée par un consortium de journalistes européens, Investigate Europe, et le média Disclose. Ces derniers ont mis au jour une filière d’approvisionnement qui permet à la machine de guerre du Kremlin de se fournir, en dépit des sanctions, en pièces détachées auprès des deux leaders mondiaux de l’aéronautique.
Cette chaîne logistique fantôme passe par la Principauté. Héli Air Monaco, tout comme Harmony Aerospace France à Toulouse ou encore Satair, filiale d’Airbus, ont ainsi livré du matériel à des sociétés, le plus souvent indiennes, sans imaginer qu’elles servaient en fait de "faux nez" à UTair, une compagnie aérienne russe très proche du pouvoir moscovite.
Contacté par une société indienne
UTair Airlines est soupçonnée de fournir une aide logistique à l’armée de Poutine, notamment en acheminant des troupes en Ukraine. En décembre dernier, cette compagnie a été ajoutée à la liste noire de l’Europe. Deux mois plus tôt, fin octobre 2024, un de ses partenaires commerciaux avait déjà été mis sous sanctions par le Trésor américain. Il s’agit de la société indienne Agrim Aviation.
Le P.-D.G. d’Héli Air Monaco explique avoir été "directement contacté par cette entreprise", comme par beaucoup d’autres. "Nous sommes sur le marché depuis 40 ans, plaide Jacques Crovetto. Nous avons une bonne réputation professionnelle dans le monde entier, aussi bien en matière de transport de passagers que de vente de pièces détachées".
Héli Air est en fait l’un des concessionnaires attitré du géant européen de l’aéronautique Airbus. C’est à ce titre que l’entreprise monégasque s’est vue passer commande de pièces par Agrim Aviation. "Principalement des rondelles et des joints. On ne parle pas d’hélicoptères entiers", relativise Jacques Crovetto, néanmoins furieux d’apprendre que Delhi n’était pas la destination finale de ces marchandises sensibles. "Ils se sont permis de les revendre à la Russie, gronde-t-il. On ne pouvait pas savoir."
Huit mois avant les sanctions
Les transactions auraient eu lieu bien avant que la société indienne ne soit démasquée. "La dernière commande remonte à décembre 2023", précise Me Dominique Anastasi, avocat de la société Héli Air Monaco, soit près d’un an avant les sanctions. En outre, le matériel livré ne serait pas d’un grand intérêt stratégique à part quelques pompes à carburant.
L’affaire est néanmoins prise très au sérieux, tant à Héli Air Monaco que chez Airbus qui a renforcé ses process de vente. Elle démontre, les efforts déployés par la Russie pour contourner les mesures internationales qui pénalisent à la fois son économie et son entreprise de guerre contre l’Ukraine..
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