Comment vous êtes-vous retrouvé dans ce film d’action danois? Une démarche assez atypique...
J’ai reçu un mail du réalisateur Frederik Louis Hviid avec le scénario, écrit en pensant à moi pour ce rôle. On s’est rencontrés en visio, puis à Copenhague pour une journée d’échanges. J’ai ensuite découvert son premier film, Shorta, dont j’ai aimé l’approche sensorielle et visuelle. Cela m’a donné envie de me lancer dans une aventure à l’étranger, dans une autre langue, avec une manière différente de faire du cinéma.
Quelle est la principale différence dans l’approche de ce film d’action?
Notamment dans des choix formels audacieux, comme le plan-séquence d’ouverture, où je mène l’attaque d’un fourgon blindé. La caméra reste à l’intérieur, sans coupe, ce qui est rare et excitant pour un acteur, surtout dans une scène d’action avec des voitures et des coups de feu. On a cherché la prise parfaite. Rien que pour ce passage, nous avons passé une matinée à répéter la chorégraphie. C’est rare d’avoir autant de temps pour répéter, mais c’était nécessaire pour que tout fonctionne.
Avez-vous parlé de l’esthétique dès votre première rencontre avec Frederik Louis Hviid?
Pas forcément d’emblée. La première fois, j’écoute surtout l’origine du projet, pourquoi il m’a choisi, ce qu’il veut raconter. Là, il m’a parlé d’un fait divers réel au Danemark, un braquage qui a choqué par son audace dans une société confiante. Les pays scandinaves valorisent le civisme et, à l’époque, il y avait une forme de naïveté avec peu de sécurité. Cet événement a bouleversé cette confiance. Nous avons donc discuté de la réalité avant d’aborder la fiction.
Votre personnage, le redoutable Slimani, est inspiré du véritable braqueur, l’avez-vous rencontré en amont du tournage?
Non, je n’en avais ni besoin ni envie. Je ne sais pas ce que l’avoir rencontré m’aurait apporté pour le jouer. J’ai surtout été intéressé par la richesse du rôle et non par son côté "méchant". Les personnages complexes, avec des facettes sombres, sont intéressants. Une scène violente avec sa femme m’a questionné, mais elle reflète la réalité du braqueur, loin de l’image romantique des bandits. Le film montre des criminels structurés dans leur travail, mais sociopathes dans leur vie, ce qui est fascinant.
Jouer une scène violente, loin de l’image humaniste que vous dégagez, c’était quand même particulier?
Jouer la violence demande une grande confiance avec les partenaires et le réalisateur. Avec ma partenaire, tout était cadré, coordonné avec le directeur des cascades. On représente la violence, mais dans un cadre sécurisé, pour pouvoir s’investir pleinement.
Vous êtes également passé derrière la caméra avec Sur un fil, qui parlait du rire médecin. Ce projet a-t-il changé votre rapport au métier d’acteur et envisagez-vous de repasser derrière la caméra?
Disons que désormais, je suis plus empathique avec les réalisateurs. Je comprends mieux leurs préoccupations. J’ai également appris que le tournage fournit la matière, mais le film se construit aussi au montage. Pour l’instant, je n’ai pas d’autre projet comme réalisateur, mais j’aimerais retrouver une histoire aussi forte que Sur un fil. Cela viendra peut-être dans six mois, un an, ou plus tard… En attendant, je suis occupé comme acteur au cinéma – on me retrouvera dans le prochain Jean-Paul Salomé – ainsi qu’au théâtre.
Notre avis
Une équipe de braqueurs chevronnés prépare méticuleusement un gros coup. Un braquage rapide, brutal, sans bavure et sans trace. Mais une erreur va tout changer. Il faut tout abandonner, disparaître. Maintenant…
Fer de lance de la nouvelle génération scandinave spécialisée dans les films musclés, Frederik Louis Hviid s’était fait remarquer avec le polar Shorta en 2021, articulé autour de deux policiers pris dans des émeutes. Tout aussi nerveux, L’Ultime Braquage revient sur une histoire vraie qui avait défrayé la chronique au Danemark et qui montrait les limites du système de sécurité.
Un point que soulève intelligemment le cinéaste, qui n’oublie pas, entre une attaque de fourgon, une course-poursuite et un vol spectaculaire, d’entrer dans le quotidien de ces malfrats. Lorsqu’ils sont en bande et s’attellent au travail, bien sûr, avec leur complicité mais aussi leurs désaccords, ainsi que dans leur vie privée, auprès de leur famille. Une partie dramatique qui, sans éviter certains écueils, a le mérite de développer a minima les psychologies et de différencier cette production de la masse. Les prestations efficaces de Gustav Dyekjær Giese, qui parvient à faire jaillir l’humanité de son personnage, et de Reda Kateb, dans le rôle d’un meneur imprévisible, ne sont pas étrangères à ce rendu. Un film bien mené donc, qui, sans atteindre la perfection du modèle Heat, saura divertir les amateurs du genre et les tenir en haleine lors de quelques moments joliment mis en scène.
DE FREDERIK LOUIS HVIID (Danemark/France), avec Gustav Dyekjaer Giese, Reda Kateb, Amanda Collin... Action. 1h50. Notre avis: 3/5.
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