"C’était l’âge d’or de la Formule 1": on a rencontré le pilote Franck Montagny dans le paddock du Grand Prix de France Historique au Castellet

Pilote d’essai Renault de 2003 à 2005, Franck Montagny souffle ce week-end au Castellet les 20 bougies du sacre suprême de la firme au losange en reprenant le volant de la R25, son "bébé".

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Gil Léon Publié le 27/04/2025 à 16:09, mis à jour le 27/04/2025 à 16:29
Le moteur V10 de la Renault R25 cravaché par Franck Montagny: un spectacle son et lumière que l’on n’oubliera pas de sitôt. Photo Florian Escoffier

Si on ne devait retenir qu’un seul son, un seul frisson, de la 7e édition du Grand Prix de France ayant fait le plein comme jamais, ce serait sans doute la mélodie du bonheur puissamment jouée par le moteur V10 de la Renault R25 ex-Fernando Alonso venue au Castellet célébrer en mode parade rugissante le vingtième anniversaire du premier sacre du constructeur français en tant qu’écurie complète. À l’instar des fans qui en prennent plein les yeux et les oreilles, Franck Montagny n’oubliera pas de sitôt cette parenthèse enchantée. Venu avec femme et filles, l’ancien pilote d’essai du losange reconverti consultant télé au sein de l’écurie Canal + a retrouvé son "bébé". Interview cash entre deux piqûres de rappel en piste...

Franck, vous vous souvenez de la dernière fois où vous avez cravaché cette R25?

Ah oui! Vingt ans déjà, mais je m’en rappelle comme si c’était hier parce que j’avais tapé Alonso et Schumacher ce jour-là. Il s’agissait un test collectif à Jerez, avant le Grand Prix du Brésil. Je roule le matin. À midi, je suis en haut de la feuille des temps. Alonso pète un câble: il fait chausser trois trains de pneus neufs d’affilée pour tenter de me dépasser. En vain car la piste est moins rapide l’après-midi...

Comment le feu vert s’est-il allumé pour cette célébration?

Via un ami de mon papa, on noue un contact avec Gilles Meriadec, le directeur de la collection Renault. Et quasiment au même moment, je reçois un appel d’Enstone (l’usine anglaise de l’écurie Alpine F1, ndlr) qui me propose le roulage anniversaire au Grand Prix de France Historique. Reprendre le volant de ce joyau, cette F1 championne du monde, c’est un vrai kif. Une belle histoire, super chouette, d’autant que je retrouve ici les mécaniciens qui s’occupaient de moi à l’époque.

Vous vous êtes entraîné un peu, beaucoup ou pas du tout?

J’ai perdu dix kilos en six mois! Je suis allé à la salle de gym trois fois par semaine. Pas pour claquer un chrono. Juste pour savourer l’instant présent à fond. Cette auto, je la connais. On a fait plus de 35.000 bornes ensemble. Je sais qu’elle va me mettre la misère. Donc régime, sport... À 47 ans, comme un gamin! Je veux profiter de l’opportunité. Il n’y en aura pas beaucoup d’autres.

Et alors?

Quel plaisir de rouler au volant de cette caisse! Dès que je m’installe dans le cockpit, des tas de souvenirs refont surface. Et une fois en piste, je ne vous raconte pas... Allez, je vous avoue juste que je ne négocie pas la courbe de Signes au taquet comme autrefois. Pas envie de passer de héros à zéro. Pas le moment, ni l’endroit. Mais bon, franchement, quand je vois cette auto, petite, fine, efficace, et ce moteur V10, je ne peux pas m’empêcher de dire que c’était l’âge d’or de la Formule 1. Aujourd’hui, elles pèsent 200 kilos de plus, elles sont deux fois plus larges, trois fois plus longues. On dirait des tanks! Moi, je préfère ma R25, mon bébé.

Ces trois ans dans la peau d’un pilote d’essais Renault F1 n’ayant pas abouti à la titularisation escomptée, bon ou mauvais souvenir?

Super! À quoi bon être aigri? Pourquoi se prendre la tête? OK, je n’ai pas décroché de titre. Pas de victoire, ni de podium. Mais j’ai beaucoup roulé. Plus de 50.000 kilomètres parcourus au total (en ajoutant les sept GP disputés en 2006 avec la modeste écurie japonaise Super Aguri). Chez Renault, entre chaque Grand Prix, il y avait trois jours d’essais où je développais le châssis, les pneus. C’est moi qui choisissais les gommes pour la course d’après. Et le gars pour qui je travaillais (Alonso) est devenu champion du monde. Il a détrôné Schumacher et Ferrari. Donc j’ai fait le job!

Mais le test comparatif avec Jacques Villeneuve pour finir la saison 2004 à la place de Jarno Trulli, vous l’avez quand même gardé en travers de la gorge, non?

Bien sûr. J’essaie toujours d’avaler la pilule, d’ailleurs. C’est dur. Il avait 10 kilos d’essence dans le réservoir et moi 70... Honnêtement, j’aurais préféré qu’on me dise: "Villeneuve, c’est un champion du monde (1997), nous le voulons dans la voiture". Cet argument, je l’aurais compris, accepté. Mais qu’on me la fasse à l’envers de la sorte, ça m’a saoulé.

Justement, le récent retour aux affaires chez Alpine de votre ancien patron Flavio Briatore, vous l’avez vu venir?

Pas du tout. Surprise totale! On s’est retrouvé... et on s’est frité d’entrée, l’an dernier. Les Alpine souffraient. Moi, je disais ce que je pensais au micro de Canal +, comme d’hab’. J’y allais un peu trop fort, sans doute, car c’est une écurie française. Je suis une grande gueule, que voulez-vous? On ne me changera pas. Donc il y a eu de l’électricité dans l’air. Mais tout va bien maintenant. Je suis très content de le revoir dans le paddock F1.

La décision de remplacer le moteur Renault par un bloc Mercedes à partir de 2026, vous la comprenez?

Ouais même si c’est un choix difficile politiquement. Dans l’usine de Viry-Châtillon, il y a 1000 personnes qui fabriquent des moteurs. Bientôt, cette F1 n’aura de français que le nom. Mais voilà: Renault, Alpine, ça fait huit ans qu’ils nous annoncent leur retour au sommet et qu’ils n’y arrivent jamais. Remuer une soupe quand elle n’est pas bonne, ça ne sert à rien. Les nouveaux patrons, Luca Di Meo et Flavio, ont décidé de changer quelque chose parce qu’ils veulent atteindre leur objectif. Je les comprends.

Alpine qui se bat pour la victoire l’an prochain et pour le titre en 2027 comme l’annonce Briatore, vous y croyez?

Oui, vraiment! Flavio, c’est un malin assis sur une immense expérience. Le mec, il a décroché des titres à la tête de Benetton, de Renault, partout où il est passé. En changeant le moteur, il abat un joker. Le pilote (Pierre Gasly), il est bon. Les ingénieurs, la structure, aussi. Il y a de l’argent. Alors avec un moulin qui cause et un châssis efficace, on peut y croire.

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