"Ici, elles sont protégées": rencontre avec les anges gardiens des deux tortues marines du Musée océanographique de Monaco
Le Musée océanographique, c’est 650.000 visiteurs par an et une organisation réglée comme du papier à musique. Pendant 24 heures, Monaco-Matin s’est immiscé dans le quotidien des salariés et dans les secrets d’un lieu dont la renommée n’est plus à prouver.
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Sacha TisicPublié le 29/07/2024 à 17:52, mis à jour le 29/07/2024 à 17:52
reportage
Au Musée océanographique, une attraction ou plutôt deux attirent particulièrement le regard des curieux: les tortues marines. Le musée en compte deux. Une en aquarium extérieur, celle dite Caouanne de Méditerranée. Et une autre dans le grand aquarium de 6 mètres de hauteur, en intérieur, la tortue imbriquée des tropiques.
Elles ont la chance de recevoir une fois par an un traitement aux petits oignons réalisé par une équipe de six soigneurs dévoués. Et le bilan annuel de santé se déroulait cette année le mardi 23 juillet, en pleine période touristique.
Tout commence tôt, dès 8 heures 30. Car une véritable course contre-la-montre s’engage pour que les manipulations, du moins pour l’aquarium extérieur, puissent être terminées avant l’ouverture des lieux.
Un travail d’orfèvre
Combinaison enfilée et rinçage effectué, c’est Olivier Brunel, chef de service aquarium, qui se lance dans le grand bain pour récupérer la tortue Caouanne, aussi appelée Samy la tortue. Le but: sortir de l’eau cette tortue qui a 13 ans et pèse 115 kg pour commencer les premiers contrôles.
"On sait que globalement, la tortue se porte bien mais on se fixe une échéance d’au moins une fois par an pour faire un contrôle général. Le reste de l’année, on surveille qu’elle s’alimente bien, qu’elle n’ait pas de blessure, et on fait des examens visuels. Il peut y avoir un peu d’entretien de temps en temps... des algues peuvent se poser sur la carapace, alors, on les nettoie", introduit celui qui travaille pour le musée depuis neuf ans.
Le professionnel installe le matériel, le palan, une sorte de grue pour soulever l’animal, et un brancard, adapté pour soulever la tortue en toute sécurité... et pour elle et pour les soigneurs. Et plouf, Olivier est dans l’eau et Samy la tortue, réputée pour sa curiosité et sa sympathie, se fait un peu prier avant de rejoindre de bon cœur les bras de son partenaire préféré.
"Il n’y a pas spécialement de difficulté à sortir la tortue de l’eau. C’est une manipulation assez simple mais il faut faire attention à ses doigts lorsqu’on est soigneur, car la tortue Caouanne touche avec son bec. Et elle a un bec puissant qui peut sectionner un doigt sans problème. Puis, on fait attention à ce qu’elle ne tombe pas et ne se blesse pas, pour la sécurité de tous", développe-t-il, estimant avoir le "privilège de travailler avec cet animal".
Brancard attaché au palan... Olivier Brunel est prêt à plonger pour récupérer la tortue Caouanne.Photo Jean-François Ottonello.
Mais il ne faut pas trop s’attarder. Car l’heure tourne et les "checks" doivent être réalisées au plus vite, afin que Samy puisse regagner son habitat le plus rapidement possible. Nicolas Martinez, vétérinaire à la clinique Lingostière de Nice, qui vient épauler les équipes du musée, effectue une prise de sang et des échographies.
"L’échographie, c’est pour voir les organes internes. Sur une tortue, on a 10 zones qu’on appelle des fenêtres acoustiques et qui vont permettre de voir une partie des organes. La fenêtre cervicale dorsale, la ventrale pour voir l’œsophage et le cœur, la zone auxiliaire gauche et droite où l’on va voir l’estomac..." D’autant que son travail est facilité par le suivi quotidien du Musée océanographique. "Ici, les tortues sont protégées. On est au courant des moindres détails, ce qui permet d’intervenir dans de meilleures conditions."
De l’aquarium au laboratoire
Examens accomplis, retour dans l’eau pour Samy, toujours avec l’aide d’Olivier Brunel qui remplit sa mission: remettre la tortue dans son habitat avant 9h30 et l’ouverture au grand public.
Le sort de la tortue Caouanne ne s’arrête pas là. Il se poursuit dans le laboratoire du musée, où Stéphanie Orengo, responsable vétérinaire, prend le relais du chef de service aquarium. Armée de son microscope et d’un ordinateur spécifique, le J-Stat, elle étudie le sang de la tortue qu’elle dépose sur de fines lames de verre.
"Avec le sang extrait, on procède à une partie des analyses sur place et on fait des comptages cellulaires. On mesure les gaz du sang... une donnée qui doit être mesurée en 15 minutes et qui nécessite donc une analyse sur place. Puis, on envoie d’autres échantillons à différents laboratoires à l’aide de notre centrifugeuse. On fait aussi une analyse biochimique pour avoir des informations sur les cellules sanguines, c’est-à-dire les globules rouges et blancs", expose-t-elle avant de dresser un premier état des lieux.
Deux tortues en pleine forme
"En l’occurrence, il y a l’hématocrite, qui est le taux de globule rouge dans le sang, qui est un peu élevé, moins que la dernière fois, mais rien d’inquiétant. Si la valeur est trop élevée, souvent, il faut réhydrater la tortue. Oui, ça peut paraître étonnant pour une tortue. On peut voir qu’il y a également peu de globules blancs, ce qui veut dire qu’il n’y a pas d’infection."
Stéphanie Orengo traite les prélèvements au labo.Photo Jean-François Ottonello.
Une carapace peut en cacher une autre... à peine Samy examinée qu’il faut cette fois-ci s’occuper de la tortue imbriquée dans le grand aquarium de l’espace tropical.
Un animal dont l’espèce est en voie d’extinction, qui a été retrouvé dans une valise à l’aéroport de Nice, et qui fête ses 30 ans cette année.
Rebelote donc, il faut remouiller la combinaison. C’est cette fois-ci les aquariologistes Laëtitia Cluzel et Quentin Melinon qui s’en chargent. Le processus ne change pas, du plongeon à l’analyse.
Et que les esprits suspendus aux diagnostics des soigneurs soient soulagés: les deux tortues du Musée océanographique sont en parfaite santé.
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