L’achat de chiots au "Salon des animaux de compagnie et leur bien-être" tourne au cauchemar à Cagnes-sur-Mer

Le "Salon des animaux de compagnie et leur bien-être", organisé les 10 et 11 mai à Cagnes, est pointé du doigt par des familles qui ont adopté des chiots et dénoncent de graves manquements.

Article réservé aux abonnés
Grégory Leclerc Publié le 23/05/2025 à 06:45, mis à jour le 23/05/2025 à 06:58
Ce chiot bouledogue français était toujours, hier, entre la vie et la mort après avoir été touché par la parvovirose au salon de Cagnes-sur-Mer. Photo DR

"On vend du rêve aux gens avec un titre de salon qui parle de bien-être animal, mais en fait ce n’est que du mercantilisme."

Marc (1) est en colère. Il a acheté un chiot au "Salon des animaux de compagnie et leur bien-être", organisé les 10 et 11 mai à Cagnes-sur-Mer. Son bouledogue français est depuis hospitalisé, entre la vie et la mort, dans une clinique vétérinaire. Il est atteint par le très contagieux virus mortel de la parvovirose, une gastro-entérite hémorragique grave qui tue près de 90% des chiens non traités. Provoquée par un parvovirus très résistant, transmise par simple contact, elle est très virulente chez les chiots.

Quatre chiots morts dans des cliniques azuréennes

Marc, en entrant le salon avec ses enfants, leur avait clairement indiqué qu’il ne fallait pas acheter un chiot en salon. Il est pourtant ressorti avec une boule de poils dans les bras, pour la somme de 2.000 euros. Et a déjà dépensé depuis plus de 1.000 euros en frais de vétérinaire pour tenter de le sauver. Il garde un goût amer du salon. "Certains stands étaient sérieux avec un accès très réglementé aux animaux. Mais sur d’autres, c’était à faire peur. Je voyais bien que ce n’était pas normal que les gens caressent les chiots à tour de bras, et fassent des selfies avec."

Nous avons recensé quatre chiots morts dans des cliniques niçoises, laurentine, ou de la vallée du Paillon. Les organisateurs, la société "Salons du sud" réfutent et évoquent deux morts. Mais admettent n’avoir aucun moyen de recensement. Sur un rapport que Nice-Matin a pu consulter, une clinique vétérinaire indique avoir reçu à elle seule cinq chiots venant de ce salon, qui ont dû être hospitalisés, atteints par le parvovirus.

Depuis le 1er janvier 2024, la vente de chiots et de chats est interdite dans les animaleries.

"Mais les salons sont passés au travers des mailles du filet, regrette le docteur Jean Marc Roullet, vice-président de l’ordre des vétérinaires des Alpes-Maritimes. Tout chiot qui arrive dans un salon doit être correctement vacciné. Il ne devrait être manipulé par personne, mais les vendeurs ont une fâcheuse tendance à vous le coller dans les bras." Une technique de vente émotionnelle qui fonctionne bien. 200 chiots ont été vendus selon les organisateurs de Cagnes-sur-Mer, sur les 410 chiens et 117 chats présentés.

"Nous sommes très affectés, indique l’organisateur, et nous confirmons, en effet, avoir été informés de six cas de parvovirus canin chez des chiots ayant été présents au salon." Salons du sud évoque 2 décès, 2 sauvés et 2 encore hospitalisés. "Ces cas, bien que regrettables, sont malheureusement des risques qui peuvent survenir malgré toutes les précautions prises. Nous tenons à rappeler que tous les animaux présents sur le salon ont été examinés par notre vétérinaire sanitaire agréé (...), conformément aux règles sanitaires en vigueur."

Ce que confirme la vétérinaire du salon que nous avons jointe, via une de ses responsables, Emmanuelle Bouillet. Elle réfute tout manque de rigueur et affirme que les chiots n’étaient pas directement accessibles. Elle estime que les éleveurs "devront payer" les frais médicaux colossaux - jusqu’à 2.000 euros - engendrés. Lesquels organisateurs n’ont pas tous été alertés directement par l’organisateur de l’épidémie de parvovirose en cours, comme nous avons pu le constater. Une éleveuse, Rachel Lephay, de l’élevage "La vallée des Cèdres bleus", présente à Cagnes, nie tout manquement à l’hygiène sur le salon: "Il faut arrêter d’accuser les éleveurs, les chiots étaient à un mètre des clients", affirme-t-elle.

Des documents officiels trafiqués

Selon plusieurs témoignages que nous avons recueillis, un autre problème s’est posé. Pour éviter l’adoption "coup de cœur", qui amène souvent à des abandons précoces, les clients doivent désormais signer un "contrat d’engagement". Il doit être signé sept jours avant la remise de l’animal. "J’ai bien signé le contrat, indique un des adoptants. Mais pour me remettre le chiot, l’éleveur l’a antidaté…" Cette pratique semble avoir été répandue lors du salon. Marc, qui prie pour que son chiot survive, envisage de créer un collectif. L’association UPA 06, basée à Nice, a lancé un appel à témoignages sur sa page Facebook pour recenser tous les cas issus de ce salon. Elle a déjà recensé quatre cas de parvovirus et deux cas de giardiose. Elle déplore aussi une tentative de vente d’un des chiots malades sur Le Bon Coin, annonce vite supprimée. C’est sur la page Facebook de l’UPA 06 que quiconque ayant un chien malade depuis le salon de Cagnes peut se signaler.

1. Son prénom a été modifié pour préserver son anonymat.

Sur la publicité mise en ligne par l’organisateur, un enfant touche un animal, ce qui est très dangereux pour les chiots présentés en salon. (Capture écran Salons du sud).

L’organisateur déjà épinglé à Aubagne

L’organisateur, Salons du sud, s’il n’avait jamais eu de problèmes en douze éditions à Cagnes, a déjà été épinglé. En novembre dernier, à Aubagne (Bouches-du-Rhône), au moins quatre chiots sont morts de la parvovirose, après un salon qu’il a organisé. Là aussi, Salons du sud avait réfuté toute responsabilité, rappelant que les chiots avaient été contrôlés par un vétérinaire.

Henry-Jean Servat demande l’arrêt du salon

Grand défenseur de la cause animale, Henry-Jean Servat réclame l’arrêt du salon de Cagnes-sur-Mer. Le conseiller municipal niçois, qui s’était vu retirer sa délégation animalière par le maire de Nice en juin 2023, reste respecté dans le milieu de la défense animale. "Les salons du chiot, ça ne devrait pas exister. J’avais proposé de les interdire à Nice. Et Christian Estrosi, dont je peux parfois dire du mal, quand il le faut, mais aussi du bien quand c’est juste, avait suivi et validé." Henry-Jean Servat pointe la responsabilité du maire de Cagnes-sur-Mer, et de son conseil municipal: "Je les avais alertés solennellement sur ce salon en 2023. Ils savent les dangers que ça occasionne. Je demande solennellement au maire de Cagnes d’arrêter de les accueillir."

L’écrivain, journaliste, va au-delà et réclame qu’une loi passe pour que la vente de chiots, interdite en animalerie, le soit aussi dans ces salons. Et milite toujours pour un ministère de la Condition animale en France.

“Rhôooooooooo!”

Vous utilisez un AdBlock?! :)

Vous pouvez le désactiver pour soutenir la rédaction du groupe Nice-Matin qui travaille tous les jours pour vous délivrer une information de qualité et vous raconter l'actualité de la Côte d'Azur

Et nous, on s'engage à réduire les formats publicitaires ressentis comme intrusifs.

Si vous souhaitez conserver votre Adblock vous pouvez regarder une seule publicité vidéo afin de débloquer l'accès au site lors de votre session

Monaco-Matin

Un cookie pour nous soutenir

Nous avons besoin de vos cookies pour vous offrir une expérience de lecture optimale et vous proposer des publicités personnalisées.

Accepter les cookies, c’est permettre grâce aux revenus complémentaires de soutenir le travail de nos 180 journalistes qui veillent au quotidien à vous offrir une information de qualité et diversifiée. Ainsi, vous pourrez accéder librement au site.

Vous pouvez choisir de refuser les cookies en vous connectant ou en vous abonnant.