A Monaco, le monôme des lycéens fêté dans un climat de tension
Ce lundi 26 mai, les lycéens d’Albert-Ier ont fêté la fin des cours en organisant le traditionnel monôme. Une édition 2025 qui s’est déroulée dans une atmosphère crispée entre élèves et direction de l'établissement (tract anonyme, pétards, fouilles des élèves...).
Article réservé aux abonnés
Thibaut ParatPublié le 29/05/2025 à 10:25, mis à jour le 29/05/2025 à 10:33
Oeufs, farine, ketchup, mousse à raser, confettis mais aussi fumigènes et pétards ont été utilisés par les lycéens.DR
Au lycée Albert-Ier, le montage vidéo navigue de téléphone en téléphone depuis ce lundi 26 mai, jour où le monôme a été déclenché. Sur l’air de musique classique de Johann Strauss, Le Beau Danube bleu, on y voit 100 à 200 lycéens prendre part à ce charivari étudiant destiné à célébrer la fin des cours en Principauté avant les épreuves imminentes du baccalauréat.
À la récréation de 10 h 15, les festivités ont démarré dans l’enceinte scolaire avant de se propager sur le parvis du Musée océanographique où les élèves ont dégainé tout l’attirail : œufs, farine, ketchup, mousse à raser, confettis mais aussi fumigènes et pétards, ainsi qu’une bâche avec l’inscription "monôme 2025" et le portrait de… la conseillère principale d’éducation du lycée. Puis, comme il est de coutume et sous escorte policière, ils ont pris la direction de la plage du Solarium pour un plongeon dans la Méditerranée.
L’ambiance a priori "bon enfant" a néanmoins été entachée par l’interpellation par la Sûreté publique de deux jeunes scolarisés à Albert-Ier et par des chants vindicatifs et noms d’oiseaux à l’égard de la nouvelle direction.
Les lycéens n’ont, semble-t-il, pas digéré qu’on tente de les empêcher, ces derniers jours, de perpétuer cette tradition vieille de plusieurs décennies à Monaco, certes tolérée par les autorités mais pour autant interdite dans le règlement intérieur de l’établissement (chapitre II, article 14).
"Une surenchère alimentée par les réseaux sociaux"
Un climat tendu qui a démarré le vendredi 16 mai, après la tenue d’une réunion de sensibilisation et de prévention par la direction et deux agents de la Sûreté publique auprès des Terminales. "L’objectif était de prévenir tout incident grave en soulignant l’importance de leur propre sécurité. Il s’agissait de faire prendre conscience aux jeunes que la fête ne justifie pas la mise en danger de soi ou des autres, et qu’il y a une certaine limite aux comportements les plus agressifs", explique le Département de l’Intérieur (DENJS/Sûreté publique), sollicité hier sur ce dossier.
Selon le gouvernement princier, le monôme a pris, ces dernières années, "une ampleur préoccupante" avec une "surenchère entraînant des risques inconsidérés, alimentée précisément par les réseaux sociaux où la recherche d’‘‘exploit’’ prime sur la sécurité."
Et l’exécutif d’énumérer une série de faits constatés lors de l’édition 2024 : "Dégradations dans l’établissement, escalades dangereuses côté Musée, élèves cagoulés, présence de pétards, parfois blessures, y compris parmi les personnels, avec des ITT à la clef."
Une crainte accentuée par les rumeurs qui couraient parmi les lycéens d’une volonté d’organiser "le monôme du siècle" avant la délocalisation provisoire du lycée dans l’ex-collège Charles-III à l’Annonciade.
"Se recentrer désormais sur les objectifs de fin d’année"
Le jour même de la réunion, et dans le même esprit, la direction du lycée Albert-Ier s’est fendue d’un message sur la plateforme Pronotes à destination des élèves de tous niveaux mais aussi des parents. Avec un flyer rappelant les dangers physiques – en cas d’escalade ou d’usage d’engins pyrotechniques – mais aussi les peines de prison et d’amendes encourues au pénal pour certaines infractions. "Il convient désormais de se recentrer sur les objectifs de cette fin d’année : la préparation des examens, la clôture des enseignements et l’anticipation de la rentrée prochaine", concluait alors la direction.
Une communication à laquelle n’ont guère goûté certains lycéens qui, dès le lundi 19 mai, ont lancé dans la cour de récréation, depuis les hauteurs de l’établissement, un tract virulent évoquant "un État policier" et appelant les élèves à se dresser face à celui-ci. Le tout accompagné d’une lettre ouverte aux lycéens.
Dans cet écrit, ils jugent l’argumentaire déployé lors de la réunion du 16 mai "complètement disproportionné et inadéquat à la pratique du monôme". On peut aussi y lire les termes : "Répression démesurée et totale" ou encore "Non, nous ne sommes pas des menaces. Nous ne sommes pas, non plus, des terroristes. Non, nous ne méritons pas un tel traitement".
Selon le Département de l’Intérieur, dont les services n’ont pas cherché à identifier les auteurs de ce tract, cet écrit "montre bien une certaine absence de nuance".
"On avait l’impression d’être criminels"
Les trois jours précédant le Grand Prix, du lundi 19 au mercredi 21 mai, des agents de la Sûreté publique se sont déployés aux abords de l’établissement pour prévenir toute amorce de monôme. Les sacs étaient contrôlés et des fouilles corporelles ont également eu lieu.
Les 20 et 21 mai, au moment de la récréation du matin, plusieurs pétards ont explosé au sein de l’établissement. "J’aime aller au lycée d’habitude, mais le climat durant ces trois jours n’était vraiment pas agréable, confie Olivia*, 17 ans, élève en Première. On avait l’impression d’être des criminels. Vouloir interdire le monôme alors que c’est une tradition et que ça a toujours été fait dans les règles de l’art, c’est un peu exagéré. On sait qu’on doit faire attention."
Finalement, on l’a dit, le monôme a eu lieu ce lundi malgré la présence policière.
"Il y avait des policiers partout devant. On ne pouvait rien faire, il y a eu une bousculade pour sortir de l’établissement et faire le monôme", explique Alexandra*, elle aussi en Première.
Maxime*, son camarade, embraye : "La présence policière a tendu la chose, ça nous a stressés (...) Le monôme était moins bien cette année. Le problème, c’est qu’ils ont essayé de nous empêcher de le faire mais de la mauvaise façon. Les flics sont toujours là d’habitude mais juste pour sécuriser au cas où quelqu’un se blesse, et c’est normal. Là, ils ont interpellé un Terminale et l’ont plaqué un sol. Ça nous a choqués."
Selon le Département de l’Intérieur, il s’agit d’un "meneur" d’un "groupe d’environ 150 personnes qui a tenté de pénétrer dans l’enceinte de l’établissement". "Celui-ci n’a pas été blessé et n’a lui-même blessé personne. Il n’a pas été menotté mais extrait du groupe et conduit jusqu’à la loge des surveillants où il a été identifié."
Ce lycéen d’Albert-Ier a été laissé libre de quitter les lieux, sans autres formalités, "même si une prochaine convocation à la Sûreté publique reste envisageable au regard de son comportement."
Un second a été interpellé pour usage de pétards et a été conduit à la Sûreté publique pour une simple vérification d’identité.
(*) Les prénoms ont été modifiés à leur demande.
Les élèves ont "forcé" le dispositif de sécurité pour se rendre sur le parvis du Musée océanographique.DR.DR.Une bâche avec le portrait de la conseillère principale d'éducation du lycée Albert-Ier a été exhibée.DR.Le monôme s'est clôturé par un plongeon depuis la plage du Solarium.DR.
commentaires
ads check
“Rhôooooooooo!”
Vous utilisez un AdBlock?! :)
Vous pouvez le désactiver pour soutenir la rédaction du groupe
Nice-Matin qui travaille tous les jours pour vous délivrer une
information de qualité et vous raconter l'actualité de la Côte d'Azur
Et nous, on s'engage à réduire les formats publicitaires
ressentis comme intrusifs.
Si vous souhaitez conserver votre Adblock vous pouvez regarder une seule publicité vidéo
afin de débloquer l'accès au site lors de votre session
Nous avons besoin de vos cookies pour vous offrir une expérience de lecture optimale et vous proposer des publicités personnalisées.
Accepter les cookies, c’est permettre grâce aux revenus complémentaires de soutenir le travail de nos 180 journalistes qui veillent au quotidien à vous offrir une information de qualité et diversifiée. Ainsi, vous pourrez accéder librement au site.
Vous pouvez choisir de refuser les cookies en vous connectant ou en vous abonnant.
commentaires