Stéphane Valeri, nouveau président de la Société des Bains de Mer à Monaco, dévoile sa feuille de route
Le nouveau président-délégué de la Société des Bains de Mer prend pour la première fois la parole pour évoquer sa feuille de route à la tête de la première entreprise de la Principauté. Et dévoile ses ambitions en Principauté, et ailleurs dans le monde.
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Propos recueillis par Cédric VERANYPublié le 13/05/2023 à 11:55, mis à jour le 13/05/2023 à 12:19
Stéphane Valeri est officiellement le président-délégué de la Société des Bains de Mer depuis le 24 janvier 2023.Photos Cyril Dodergny
Ça ne s’invente pas. C’est dans le salon "Sincerity" du Monte-Carlo Bay que Stéphane Valeri recevait la presse ce vendredi matin. Pour sa toute première prise de parole depuis sa nomination le 24 janvier dernier, le président-délégué de la Société des Bains de Mer était donc apte au dialogue sincère pour tracer les grandes lignes de sa feuille de route.
Et il s’est montré plutôt à l’aise dans ses mocassins de patron de la première entreprise du pays. Au fait des dossiers et des attentes, rappelant plusieurs fois que la "barre est haute, le défi est difficile" au cours d’un échange d’une heure avec les journalistes.
"Nous sommes au complet"
Cet exercice de présentation de la stratégie de l’entreprise pour les mois et les années à venir, Stéphane Valeri s’y était déjà livré ce mercredi devant quelque 800 collaborateurs de la SBM pour dévoiler sa vision et son équipe.
En effet, dès sa prise de fonctions, l’ex-président du Conseil national, qui a quitté la politique en septembre dernier, a voulu revoir complètement ou presque, la gouvernance de la société. Le comité exécutif a été ainsi renouvelé aux deux tiers, et étendu. Passant de six à neuf membres.
"Il me fallait quelque temps pour constituer cette nouvelle équipe dirigeante. Aujourd’hui, nous sommes au complet avec une nouvelle impulsion pour développer notre activité et les défis toujours plus grands de la SBM", explique le président-délégué, plaidant qu’il s’appuiera "sur tout le travail qui a déjà été accompli jusque-là sous la présidence de Jean-Luc Biamonti. Mais qui dit nouvelle présidence, dit aussi forcément nouvelles ambitions, nouveaux projets".
En avril dernier, le président Valeri a choisi à ses côtés Albert Manzone. Ce Monégasque, à la carrière internationale, passé notamment chez Pepsi, Davidoff ou Novartis est de retour au bercail pour prendre le poste de directeur général et assurer la coordination de l’entreprise, qui comptera, au plus fort de la saison, près de 5.000 collaborateurs.
Ensuite, Stéphane Valeri a confié le poste de secrétaire générale à sa fidèle collaboratrice Virginie Cotta, qui fut sa cheffe de cabinet au Conseil national.
Numéro 3 de l’entreprise, elle chapeaute la direction juridique, la gestion des actifs immobiliers, la politique RSE. Mais aussi la préservation du patrimoine. Une notion qui importe au nouveau président-délégué qui l’a rappelé plusieurs fois hier.
"Quand on voit le prix qu’attachent certaines marques nouvelles à acheter des marques anciennes qui ont une histoire, une valeur patrimoniale, nous sommes à la Société des Bains de Mer, les héritiers de 160 années d’histoire qu’il faut valoriser". Une volonté qui passera par des nouveaux locaux, des équipes renforcées, un soin apporté à la conservation des archives iconographiques de l’entreprise. Et leur mise en valeur dans des expositions, comme celle en préparation à Monte-Carlo, cet automne, pour raconter en images, un siècle d’histoires et de transformations de la place de Casino.
C’est d’ailleurs là que s’écrit l’histoire immédiate de la nouvelle équipe dirigeante. Qui prévoit d’ouvrir fin octobre, avec trois mois de retard sur le planning initial, le nouveau Café de Paris. Un bâtiment repensé avec plusieurs restaurants, des boutiques. Et le retour du Moods!
"Se donner les moyens de réussir"
L’ambition de Stéphane Valeri dépasse aussi les frontières monégasques. Plusieurs fois la SBM a essayé d’installer ses marques et ses concepts dans d’autres pays, sans y réussir.
Désormais, la volonté est affichée d’investir dans des établissements hôteliers hors de la Principauté pour y proposer le savoir-faire et l’hospitalité made in Monaco. Un changement de braquet osé, dans lequel le président-délégué voit "un grand potentiel de croissance" et pour lequel il a entièrement dédié une équipe de sa gouvernance, pour éviter les échecs passés dans ce domaine, au Maroc ou au Moyen Orient. Désormais en ordre de marche, la Société des Bains de Mer, sous l’ère Valeri, entend se donner les moyens de réussir.
Le secteur des Jeux devrait s’exporter.Illustration Jean-François Ottonello.
"Nous étudions la possibilité d’acquérir un établissement hôtelier dans les Alpes"
Les ambitions internationales de la SBM sont affichées. Envisagez-vous d’exporter la marque et d’ouvrir des établissements hors des frontières monégasques ? Malgré les échecs de projets au Maroc ou aux Émirats arabes unis dans la dernière décennie ?
En effet, la SBM bénéficie d’une grande notoriété et d’une expertise reconnue mondialement dans le domaine de l’hôtellerie de luxe et des jeux. Pour autant, ce potentiel levier de croissance n’a jamais été développé jusqu’à ce jour, en dehors de certaines participations financières dans des sociétés à l’international. Il s’agit désormais de doter la SBM d’une équipe chargée de préparer son développement à l’étranger, de façon ciblée et dans le cadre d’une stratégie très précise. Cette équipe sera dirigée par Pascal Camia.
En plus du développement de sources de profits futurs, cette évolution permettra d’assurer une formation de certains membres du personnel dans plusieurs pays et de proposer des carrières internationales aux salariés de l’entreprise. L’attractivité professionnelle de la SBM en sera renforcée.
Des projets sont déjà identifiés ?
La direction du développement international est chargée d’étudier les opportunités de créations, de rachats ou de partenariats commerciaux (hôtels, restaurants, casinos) afin de développer notre clientèle internationale. Elle pourra aussi exporter à l’international des marques créées par nous en Principauté. Parmi les priorités, nous avons demandé à Pascal Camia d’étudier, pour commencer, la possibilité d’acquérir un établissement hôtelier dans une station de prestige des Alpes. Stratégiquement, nous devons être là où nos clients se déplacent, avec une offre complémentaire à celle que nous avons aujourd’hui à Monaco. Ce serait également l’opportunité de fidéliser nos saisonniers, été comme hiver.
Toujours à l’international, le Café de Paris à Macao existe-t-il toujours ? Quid du groupe chinois Galaxy, a-t-il toujours des actions dans la SBM ? Quelles actions sont envisagées entre vos deux groupes ?
Oui, en effet le Café de Paris Monte-Carlo existe toujours au cœur du Resort Galaxy à Macau, mais le résultat n’est pas au rendez-vous. Pour autant, Galaxy Entertainment Group [deuxième groupe chinois de casinos N.D.L.R.] fait plus que jamais partie de nos actionnaires et nous continuons ensemble nos discussions, pour envisager à l’avenir des développements à l’international dans le secteur des Jeux.
Nous envisageons une joint-venture pour créer un casino à l’international. Peut-être au Japon ou aux Émirats arabes unis qui sont en train d’ouvrir des licences. Nous nous appuierons sur l’expertise de nos amis chinois qui, eux, sont à la recherche de la légende de Monaco, qui parle plus dans le monde que Galaxy.
En parallèle, Troy Hickox qui représente le groupe Galaxy au sein du conseil d’administration de la SBM et qui est un grand homme d’affaires, un vrai décisionnaire et un partenaire très sympathique est en train de chercher un chef cuisinier qui aurait, à la fois la culture gastronomique chinoise et occidentale pour nous permettre d’ouvrir un restaurant chinois en Principauté.
A 61 ans, l’ex-président du Conseil national entame un nouveau chapitre professionnel.Photo Cyril Dodergny.
"Diriger cette grande maison est et sera un défi passionnant"
Votre nomination en janvier dernier a marqué un tournant dans votre carrière après plusieurs décennies dans la vie publique et politique. Comment l’avez-vous appréhendé au plan professionnel, mais aussi personnel, car votre histoire familiale est liée à celle de la SBM ?
Cette nomination à la tête du fleuron économique de la Principauté est pour moi une immense fierté. La confiance que j’ai reçue du Prince souverain m’honore et m’oblige. Sur le plan plus personnel, la Société des Bains de Mer fait partie de l’histoire de ma famille depuis plusieurs générations. Comme je l’ai confié aux salariés mercredi lors d’une grande réunion de présentation au Grimaldi Forum, devant plus de 800 d’entre eux, mon arrière-grand-père, qui était employé de Jeux, a reçu en 1913 la médaille du 50e anniversaire de la création de la SBM. Mon père, comme mon grand-père, a fait lui aussi, toute sa carrière au sein du Casino. Diriger cette grande maison est et sera un défi passionnant dans lequel je placerai toute mon énergie. J’y appliquerai les méthodes de management que j’ai déjà éprouvées dans mes précédentes fonctions, comme l’écoute, la concertation, l’importance de l’humain, la réflexion stratégique et la capacité à décider avec pragmatisme, pour la recherche de la plus grande efficacité.
Pourquoi avoir choisi de réactiver le poste de directeur général, non occupé de longue date dans l’entreprise ?
J’ai en effet souhaité pourvoir le poste de directeur général, laissé vacant depuis près de douze ans, pour me seconder dans la supervision de la plupart des directions opérationnelles de l’entreprise. Albert Manzone se consacre donc principalement à leur gestion quotidienne. Il assure la mise en œuvre des activités de l’entreprise. Il va nous faire bénéficier par ailleurs de sa grande expérience internationale. Cela me donnera plus de temps pour me consacrer à la stratégie et au développement de notre groupe.
"J'ai l'impression que la greffe prend"
Les salariés de nationalité monégasque sont pour la première fois majoritaires dans l’état-major de l’entreprise. Avez-vous cette volonté de recruter davantage de nationaux dans toutes les structures de la SBM ?
Oui en effet notre nouveau comité exécutif (Comex) est désormais composé de neuf membres dont six monégasques : Albert Manzone, directeur général ; Virginie Cotta, secrétaire générale ; Sophie Vincent, directrice des ressources humaines ; Pascal Camia, directeur du développement international ; Rudy Tarditi, directeur des Casinos et moi-même. Mais je tiens également à la complémentarité et à la diversité des cultures professionnelles et des expériences internationales. Nous avons donc recruté à l’international de grands professionnels dans leur domaine d’expertise, tous issus de grands groupes : Vincent Bouvet, directeur administratif et financier ; Julien Munoz, directeur marketing et digital, et à venir en juillet notre nouveau directeur des systèmes d’information.
Une nouvelle page s’ouvre pour les équipes, quel est le moral des troupes ?
Franchement, lors de notre présentation mercredi soir, j’ai vu des gens vraiment enchantés ! J’ai l’impression que la greffe prend. La DRH fait un travail remarquable et notre modèle social, auquel je tiens beaucoup, est unique. En période de forte inflation, tous les trois mois, les salaires sont indexés sur le coût de la vie. C’est un dispositif unique dans le secteur privé, qui a permis une augmentation de 2 % ces trois derniers mois. Le maintien du pouvoir d’achat est assuré. Nous avons aussi un intéressement sur les résultats de l’entreprise pour les salariés, ce qui cette année, devrait représenter une prime de 2000 euros versée à tous les collaborateurs. On peut toujours mieux faire, mais globalement les gens sont conscients qu’ils ont des avantages sociaux exceptionnels, le terrain de la contestation est limité. Et les bases sont sereines pour ouvrir cette nouvelle page.
"Le Café de Paris ouvrira ses portes fin octobre 2023"
Le chantier du Café de Paris a pris du retard, quand pourra-t-il ouvrir ? Certains pensent que les deux restaurants (la Brasserie et Amazonico) auront du mal à remplir toute l’année. La transformation du bâtiment a-t-elle été vue trop grande ?
Le Café de Paris ouvrira ses portes fin octobre 2023. L’ouverture d’Amazonico Monte-Carlo est quant à elle prévue pour avril 2024. Les deux restaurants seront totalement complémentaires. Le Café de Paris incarne la tradition, le savoir-faire SBM. Une brasserie devenue au fil du temps une véritable institution monégasque, passage presque obligé de tout visiteur et point de repère des Monégasques et des résidents. Amazonico est quant à lui un concept international prisé de la clientèle internationale en quête d’expérience lifestyle, de divertissement, qui rencontre beaucoup de succès notamment à Dubaï et à Londres. Pour des raisons de saisonnalité, Amazonico aura une période de fermeture de deux mois en hiver. Le nouveau complexe du Café de Paris, avec en plus sept nouveaux commerces de prestige, va former un nouveau pôle d’attractivité exceptionnel.
Le chiffre d’affaires de l’entreprise bénéficie des bons retours de l’hôtellerie, des Jeux mais aussi des locations immobilières. Est-ce un domaine que vous entendez doper ?
L’immobilier est devenu au fil du temps notre troisième métier, sous l’impulsion de mon prédécesseur Jean-Luc Biamonti. Mon objectif est désormais de poursuivre et de développer encore la valorisation de notre foncier, en créant de nouvelles surfaces de résidences, de bureaux et de commerces.
Avez-vous d’ambitieux projets immobiliers pour la SBM ? Notamment sur la presqu’île du Larvotto ?
En effet la restructuration du complexe du Sporting d’été, fait partie de nos réflexions, car c’est une source importante de profits futurs. C’est aussi essentiel pour y développer un secteur majeur de notre activité : l’entertainment. Car nous devons continuer à entretenir la légende de Monte-Carlo, avec des stars et des spectacles enviés et recherchés par notre clientèle. Enfin, nous ne pourrons bien sûr pas être absents du dossier du Méridien. C’est également un défi à relever pour nous.
Il a dit
"Le groupe LVMH, actionnaire minoritaire de la SBM, a beaucoup des marques et de potentiel. J’ai rencontré Bernard Arnault pour penser synergie et nous étudions, ensemble, des possibilités."
"Nous travaillons avec Jessica Sbaraglia qui nous a trouvé un grand terrain agricole à Beausoleil que nous allons acheter ou louer pour produire une partie importante de nos légumes, de nos œufs, et fournir un maximum de produits biologiques à nos chefs."
"Je n’étais pas particulièrement satisfait de la décoration de la place du Casino l’an dernier pour les fêtes de fin d’année. Je n’ai pas fait waouh. Et j’ai demandé aux équipes que la place cette année, soit un lieu de décor de rêve pour retrouver cette magie de Noël."
"La nature humaine, les inimitiés, les conflits de pouvoir font que parfois les gens travaillent plus dans la rivalité que l’esprit d’équipe. J’ai compris depuis longtemps que si on veut réussir, c’est l’inverse qu’il faut faire. Et je me suis attaché à être très bien entouré."
"Décider c’est prendre des risques. Je n’ai qu’une boussole: l’intérêt de la Société des Bains de Mer. J’ai la passion de ce que je fais et je pense encore assez d’énergie".
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