"Ce n’est pas une victoire mais une avancée": 57 ans après le crash de la Caravelle Ajaccio-Nice, le nouvel espoir des familles des victimes
Cérémonie particulière, ce mardi à Nice, pour le 57e anniversaire de la catastrophe aérienne qui fit 95 morts en 1968. Avec les recherches en mer imminentes, les familles endeuillées espèrent toucher enfin au but.
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Christophe CironePublié le 09/09/2025 à 20:45, mis à jour le 09/09/2025 à 21:16
Florence Palmieri, Louis Paoli, Mme Camilli et Catherine Abbé honorent la mémoire des victimes, ce mardi, devant la stèle du souvenir sur la promenade des Anglais.
Photo Jean-François Ottonello
Le protocole est inchangé. Les rares visages encore fidèles au rendez-vous sont familiers. Mais les perspectives sont bien différentes, cette année, à l’heure de célébrer le 57e anniversaire du crash de la Caravelle Ajaccio-Nice.
Ce mardi midi à Nice, devant la stèle du souvenir érigée à l’entrée de la promenade des Anglais, les regards ne se tournent pas seulement vers le passé, mais vers un futur proche. C’est acté: des recherches sous-marines vont être menées par la justice, d’ici peu, au large du cap d’Antibes, par 2.300mètres de fond. Objectif: ausculter la carlingue de l’appareil qui s’est abîmé en mer, le 11 septembre 1968, avec ses 95 occupants à son bord.
L’annonce date de vendredi. Une juge d’instruction pilotera ces opérations, suivant deux options. Première étape: d’ici fin 2025, "une campagne de trois jours sur une zone identifiée de 8km2, pour localiser les débris de l’épave de la Caravelle et, le cas échéant, réaliser des photographies sous-marines, explique au micro Mathieu Paoli, président de l’association des familles de victimes. En cas d’échec, mi-2026, de nouvelles opérations seront réalisées sur une zone plus large, avec des moyens techniques très importants."
Espoir et lucidité
Mathieu Paoli, président de l'Association des familles des victimes de la catastrophe de la Caravelle Ajaccio-Nice, souhaite que celles-ci participent à la campagne en mer.Jean François Ottonello / Nice Matin.
"C’est une avancée. Pas une victoire, une avancée", se satisfait Catherine Abbé, 57 ans, "l’âge de l’accident". Elle est née cinq mois après la mort de son père, Michel Gérard, le chef de cabine. "Il avait 29-30 ans. Un jeune homme..." Les lunettes noires de Catherine laissent deviner son regard déterminé. "Il y a de l’espoir, mais aussi de la lucidité. Dans le passé, des promesses n’ont pas été tenues. Là, il y a un calendrier et des moyens. C’est la justice qui met en demeure l’Etat, et donc l’Armée, de faire ces recherches - ce qui n’est pas rien!"
Florence Palmieri, 77 ans, a perdu son frère Jean-Pierre à bord du vol AF 1611. Son père, "qui était un grand avocat parisien, a su tout de suite que c’était un missile parti d’une base militaire dans le Var. à l’époque, il avait contacté M. Messmer, alors Ministre des Armées... qui ne lui a jamais répondu. Moi, je n’avais que 20 ans. Mais j’ai toujours été convaincue que c’était un missile."
Sauveur Filippeddu, même âge que Florence, partage sa conviction. Le crash, qui a coûté la vie à son père Jean-Dominique et sa sœur Martine, serait dû à un tir accidentel. "Nous savons. Tout le monde le sait. Ce n’est plus un secret pour personne. Néanmoins, nous n’avons pas la reconnaissance officielle de l’État. Comment voulez-vous penser que c’est un simple feu qui est parti des toilettes?"
Les réacteurs au cœur des recherches
Jean François Ottonello / Nice Matin.
Tel était le scénario officiel retenu en 1972. Mais l’information judiciaire ouverte à Nice en 2014 pour soustraction de documents et dissimulation de preuves (un délit non prescrit), à l’origine des prochaines recherches en mer, pourrait livrer une tout autre lecture du drame. D’où l’intérêt "que l’on voie les réacteurs, s’ils ont été touchés. Que l’on voie l’impact du missile qui a malheureusement amené la caravelle à la catastrophe", soupire Sauveur Filippeddu.
Ces réacteurs reposent-ils toujours de par le fond, du reste? Ou ont-ils "déjà été remontés et déposés à l’arsenal militaire de Toulon", comme le pense Mathieu Paoli? La question intrigue les familles. Quatre campagnes sous-marines ont déjà été menées entre 1968 et 1971. Elles avaient permis de remonter 15% des débris. Mais pas les réacteurs, a priori.
"Libérer nos esprits"
Florence Palmieri se félicite que les opérations soient menées par la Marine. Même si, ironie de l’histoire, elle investiguera sur une bavure militaire présumée. "Maintenant, peut-être qu’on va savoir. Il faut avoir beaucoup de patience. Peut-être qu’à force de faire brûler des bougies à l’église, on nous entend! Il faut toujours dire la vérité. ça sert à quoi de cacher les choses? ça ressort un jour ou l’autre... Il faut y aller."
Avant cette ultime étape, Catherine Abbé salue l’opiniâtreté des frères Mathieu et Louis Paoli qui, avec leurs avocats, les "ont emmenés dans cette aventure de quête de vérité". Quoi qu’il advienne désormais, ce combat judiciaire et médiatique aura permis d’aller au fond des choses, au sens premier du terme.
Et si cette campagne en mer, même avec les moyens modernes, laissait un goût d’inachevé? Sauveur Filippeddu ne l’envisage pas. "ça coûte de l’argent. Si on fait l’effort d’aller jusque-là, c’est peut-être aussi pour, enfin, libérer nos esprits. Nous ne voulons pas des indemnités. Nous voulons la vérité, c’est tout. Pour faire enfin notre deuil."
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