Incendies en série sur le pourtour méditerranéen: comment les Alpes-Maritimes se préparent à l’été à hauts risques?

Ils ont ravagé les collines marseillaises, menacé des habitations et plongé des quartiers dans l’inquiétude. Les incendies de ce début de semaine en périphérie de Marseille ont rappelé la brutalité du feu et sa capacité à se frayer un chemin jusqu’aux portes des villes.

Dans les Alpes-Maritimes, où l’urbanisation côtoie en permanence la forêt, ce risque existe aussi. "Notre département est très construit, avec une zone urbaine dense et une zone périurbaine qui nécessite une vigilance accrue" , a insisté Charles-Ange Ginésy, président du Département, en marge du lancement du dispositif estival de prévention et de lutte contre les feux de forêts, ce matin au Broc.

27 départs de feu depuis mars, une situation "tendue"

Le décor est planté : malgré un printemps humide et des sols encore chargés d’eau, l’été 2025 pourrait basculer à tout moment. "La saison a commencé très tôt, dès le mois de mars, avec un feu important dans la vallée de la Roya", rappelle Laurent Hottiaux, préfet des Alpes-Maritimes.

Au 8 juillet, on comptait déjà 27 feux pour 348 hectares brûlés, dont 308 rien que dans la Roya. À date équivalente, l’an dernier, seuls 14 feux avaient été recensés pour une surface totale de 23,5 hectares.

Alors, pas question de baisser la garde. "La vigilance reste notre première arme", martèle le contrôleur général René Dies, directeur du SDIS 06. Une stratégie à trois piliers : éviter l’éclosion des feux, réduire les surfaces brûlées et en limiter les conséquences.

Des moyens terrestres et aériens d'ampleur

Pour protéger les 236 000 hectares de couverture forestière du département, le dispositif s’annonce dense, coordonné, et surtout, renforcé par des moyens technologiques et aériens de tout premier ordre. Côté ciel, les Canadairs (12 CL-415), les Dash Q400MR (8 appareils) et les trois hélicoptères bombardiers d’eau départementaux sont mobilisables à tout instant.

Ces moyens ont déjà été engagés cette année à La Trinité, Saint-Auban et dans la Roya. À cela s’ajoute un Pélicandrome à Cannes-Mandelieu et une unité drone composée de 12 télépilotes, soutenue par deux appareils professionnels.

"Chaque feu fait l’objet d’une attaque rapide, massive et coordonnée" , insiste le préfet. "Ici, dans les Alpes-Maritimes, grâce au soutien du Département, on a cette capacité. Mais il faut rester humbles".

Sur le terrain, l’anticipation est la clé

Neuf vigies, réparties sur les hauteurs stratégiques du département, scrutent l’horizon à la recherche de la moindre fumée. En soutien, les caméras du réseau Central Vert, une quinzaine de patrouilles de Force 06, et plus de 200 pompiers en veille permanente, chiffre qui peut grimper à 400 selon les besoins.

"Le Conseil départemental investit 92 millions d’euros pour doter nos pompiers des outils nécessaires, afin d’intervenir le plus vite possible" , a précisé Charles-Ange Ginésy. Un effort qui s’inscrit dans un partenariat clair entre le Département et l’État, à travers le Réseau Forestier de Surveillance de l’Alerte (RFSA).

Et l'innovation s’invite désormais dans les cabines de commandement. "Grâce à la solution Speakylink, ce lien direct entre le terrain via les témoins sur place, et le centre opérationnel, est une révolution" , s’est réjoui René Dies. L’IA, bientôt intégrée au dispositif, permettra d’analyser en temps réel les données météo, les historiques d’intervention et même les recherches Internet pour prédire les zones à risque.

Une menace également urbaine

"On l’a vu à Marseille : les feux peuvent atteindre les zones habitées. Ce risque de feu urbain est bien réel dans les Alpes-Maritimes, où des zones conjuguent densité de population et forte végétation", souligne le préfet Hottiaux. D’où l’importance cruciale du débroussaillement, qui reste une obligation légale renforcée par les arrêtés municipaux. Des contrôles sont réalisés régulièrement, avec des sanctions à la clé.

"Un feu s’éteint avec un verre d’eau à la première minute, avec un seau à la deuxième, et avec une citerne à la troisième" , a rappelé Charles-Ange Ginésy. Une image choc pour marquer les esprits, et responsabiliser. Car dans 90 % des cas, le feu a une origine humaine : barbecues mal maîtrisés, mégots, travaux mal encadrés… "Le feu de forêt, c’est l’affaire de tous, mais surtout l’affaire de chacun" , conclut René Dies. Les Alpes-Maritimes sont prêtes. Mais face à un été qui a déjà mordu, face à une végétation densifiée par les pluies du printemps et desséchée par les premiers coups de chaud, chacun est appelé à la vigilance.