Sclérose en plaques: une désescalade thérapeutique?

Avec les progrès dans la prise en charge de la sclérose en plaques (SEP), les médecins font désormais face à des patients âgés, stabilisés, pour qui se pose la question de la poursuite des traitements. Explications.

C. Martinat Publié le 02/06/2025 à 13:30, mis à jour le 03/06/2025 à 12:40
Les médecins sont confrontés à une nouvelle interrogation: faut-il poursuivre des traitements certes très efficaces, mais dont les risques d’effets secondaires augmentent avec l’âge? Photo Pexels

Les progrès très importants réalisés en termes de diagnostic, et les nouveaux médicaments apparus ces dernières décennies, ont profondément modifié l’histoire de la sclérose en plaques (SEP). Mais ils suscitent également de nouvelles interrogations. Face à une première génération de patients âgés, indemnes de séquelles handicapantes liés à la maladie, et avec une activité inflammatoire au point mort depuis de nombreuses années, les médecins s’interrogent: faut-il poursuivre des traitements certes très efficaces, mais dont les risques d’effets secondaires augmentent avec l’âge?

Au lendemain de la journée mondiale de la SEP, le Pr Jean Pelletier, président du Comité médico-scientifique de France sclérose en plaques (1), détaille deux arguments principaux qui motivent les nombreuses études destinées à apporter des réponses à cette nouvelle interrogation.

Le vieillissement du système immunitaire

- Le constat

"On a des éléments pour penser qu’au fur et à mesure du vieillissement, le système immunitaire vieillit lui aussi – c’est l’immunosénescence. La SEP, qui est une maladie auto-immune, devient moins active, avec moins de poussées et moins d’activité inflammatoire. Ces éléments font penser que la poursuite du traitement n’est peut-être plus indispensable chez des patients parfaitement stabilisés depuis de très nombreuses années", explique en préambule le Pr Pelletier.

Ce n’est encore qu’une théorie, mais des études randomisées réalisées auprès de patients de plus de 50 ans montrent que dans une majorité des cas, ceux qui arrêtent le traitement ne rechutent pas dans les trois à cinq ans qui suivent. L’activité inflammatoire ne reprend que pour 5 à 10% d’entre eux.

- Recherches: identifier des éléments prédictifs de la reprise de la maladie

"Plusieurs études sont en cours pour identifier les éléments qui vont contribuer à la reprise de cette inflammation, indique le Pr Pelletier. Ces critères prédictifs permettraient de déterminer chez quels patients il est possible, ou pas, d’envisager l’arrêt du traitement."

De nombreuses pistes sont explorées. "Le premier élément qui pourrait être décisif et qu’on a tendance à oublier, c’est l’histoire du début individuel de la maladie. Il faut se souvenir comment les choses ont évolué avant la mise en place du traitement: ceux qui avaient une activité inflammatoire plus intense sont peut-être ceux qui ont le plus de risques de rechute. On a le sentiment qu’il y a une forme de mémoire immunologique de la maladie qui fait que quand elle reprend, elle reprend de la même façon qu’elle évoluait auparavant."

Les chercheurs tentent d’identifier des facteurs soit cliniques (fréquence des poussées antérieures, niveau de handicap…), soit radiologiques (charge lésionnelle au niveau du cerveau ou de la moelle épinière, niveau d’activité inflammatoire avant le traitement…) qui constituent des éléments prédictifs d’une non-reprise de la maladie, ou au contraire, d’un risque réel de relance de l’activité inflammatoire.

Des traitements plus risqués avec l’âge

- Le constat

Les médicaments les plus récents, (traitements hautement actifs) ne sont pas dénués de risques, en particulier pour les patients âgés. Au fur et à mesure du vieillissement, les comorbidités (risque cardiovasculaire, diabète, cholestérol…) augmentent en fréquence.

"Ce sont des portes d’entrée pour les effets secondaires liés aux traitements, par exemple les infections, qui peuvent devenir plus fréquentes chez certains d’entre eux. On peut estimer qu’il est déraisonnable de poursuivre un traitement qui est très efficace mais qui pourrait présenter pour le patient, en raison de ses comorbidités et de son âge, des risques supplémentaires sans lien avec la maladie traitée. Se poser la question de la poursuite du traitement permet de mieux appréhender l’approche de la balance bénéfices-risques", commente le Pr Pelletier.

- Pistes de recherche: arrêt ou désescalade thérapeutique?

Dans cette optique, une situation intermédiaire à l’arrêt du traitement est également discutée: la désescalade thérapeutique. "Cela consiste à passer d’un traitement très efficace à un autre considéré comme moins efficace, mais qui présente moins de risques, voire qui est indemne de tout risque d’effets secondaires. Quand la maladie est moins agressive, cette option permet de poursuivre une médication suffisamment efficace, sans risquer des effets secondaires graves." Là aussi, il reste à identifier des critères prédictifs de reprise ou de non reprise de la maladie. Et donc matière à recherches…

1. www.france-sclerose-en-plaques.org

Une maladie auto-immune évolutive

La sclérose en plaques (SEP) est une maladie auto-immune du système nerveux central (le cerveau et la moelle épinière). Le système de défense (système immunitaire), habituellement impliqué dans la lutte contre les virus et les bactéries, s’emballe et attaque la myéline, la gaine protectrice des fibres nerveuses qui jouent un rôle important dans la propagation de l’influx nerveux du cerveau aux différentes parties du corps. Les symptômes sont variés et parfois invisibles (fatigue, troubles de la motricité et de l’équilibre, de la sensibilité, problèmes oculaires…).

La SEP est le plus souvent diagnostiquée chez l’adulte jeune (entre 25 et 35 ans), des femmes dans les trois quarts des cas. Sans diagnostic précoce et traitement, les poussées inflammatoires provoquent séquelles et handicap.

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