"La coercition est un très mauvais message"
"Une pénurie de médecins, même potentiellement régulée, reste une pénurie"… Hervé Caël, président de l’Ordre régional des médecins, aime citer cette phrase de Yannick Neuder, le ministre chargé de la Santé et de l’Accès aux soins. Une phrase prononcée début avril qui veut tout dire, argumente le médecin urgentiste niçois. "Faut-il faire quelque chose? Oui. Par la contrainte? Non", lance Hervé Caël. "On ne peut pas dire de moi que je suis contre Bayrou, j’ai même conduit une liste de son parti à Nice, mais là, j’ai envie de lui dire: “François tu déconnes" », souffle le docteur, qui est également conseiller municipal à Nice.
Aujourd’hui, selon lui, il n’y a plus cette caricature d’une France urbaine d’un côté avec assez de professionnels de santé, et la France rurale de l’autre qui en manque cruellement. " Il n’existe plus de territoires surcotés", jure le docteur Caël. Il y a des territoires en difficulté et d’autres en grande difficulté. La faute, dit-il, à des décisions politiques qui datent des années 1990. Pour lesquelles il a été fait quelque chose depuis, mais on en verra les effets que dans "10 ou 15 ans". "Il y a quelque temps on formait 3.500médecins en France, aujourd’hui 11.000. À terme, la situation va donc s’améliorer, le système va s’autoréguler. D’ailleurs, en 2024, pour la première fois, le nombre de médecins a été stable", décrypte-t-il.
Mais en attendant, il faut bien évidemment, trouver des solutions. Le docteur Hervé Caël n’en manque pas. "Dans cette période, il ne faut pas en envoyer des messages de coercition, c’est un très mauvais message mais il faut travailler sur l’attractivité", avance-t-il. Pourquoi ne pas inciter des médecins partis faire leurs études à l’étranger, à revenir en France et travailler aussi sur l’attractivité des territoires? "Il faut être inventif, inventer de nouveaux systèmes", argumente Hervé Caël. "Par exemple, mettre à disposition un local, et un médecin peut venir assurer quelques demi-journées par semaine et, en même temps, développer la téléconsultation en accord avec le microcosme du territoire, afin de ne pas le fragiliser", propose le médecin niçois. Qui évoque aussi la place de l’infirmière. Elles peuvent prendre plus d’ampleur dans l’offre de soins, "sans être la porte d’entrée des soins, bien sûr", détaille-t-il. "En cas d’hypertension, le médecin pose le diagnostic et prescrit le traitement. Le suivi peut être réalisé par une infirmière, qui doit cependant toujours avoir la possibilité de se tourner vers un docteur en cas de doute", ajoute le docteur Hervé Caël.
Enfin, il pense aux médecins seniors, à la retraite. Pourquoi ne pas les autoriser à continuer à exercer en temps partiel? " Il faut autoriser le cumul emploi-retraite". Et pour les jeunes médecins, envisager la défiscalisation totale des actes s’il accepte d’aller dans les secteurs particulièrement tendus…
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