De la passion à l’amour: quand le cerveau mène la danse

La passion ne vient pas que du cœur : c’est le cerveau qui guide nos sentiments et élans amoureux. D’après la neurobiologiste Lucy Vincent, comprendre ces mécanismes cérébraux aide à mieux suivre l’évolution du couple et à renforcer la relation.

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Stéphanie Wiélé Publié le 12/05/2025 à 18:55, mis à jour le 14/05/2025 à 10:28

L’amour, ce grand mystère qui fait battre nos cœurs, n’est pas seulement une affaire de poésie ou de destin. Derrière la magie des premiers regards, des papillons dans le ventre et de l’euphorie des débuts, se cache en réalité une mécanique cérébrale aussi précise que fascinante. Lucy Vincent, neurobiologiste et autrice du livre Le cerveau des amoureux (Odile Jacob), s’est donné pour mission de déconstruire les idées reçues : non, l’amour n’est pas qu’une histoire de hasard ou de romantisme, c’est avant tout un besoin biologique, orchestré par nos neurones et nos hormones.

Mais à quoi sert vraiment la passion des débuts? Pourquoi s’évapore-t-elle si vite ? Et surtout, comment transformer la connaissance de notre cerveau en conseils concrets pour faire durer le couple ? Lucy Vincent nous guide à travers les étapes de l’amour, du coup de foudre à l’attachement profond, et partage des astuces pour entretenir la flamme.

Le cerveau amoureux est un processus biologique orchestré par des mécanismes cérébraux et hormonaux qui favorisent le lien entre partenaires pour assurer la survie de la progéniture humaine. Comprendre ces mécanismes permet de dépasser les idées romantiques idéalisées et d’apprendre à entretenir la passion et l’attachement dans la durée. Photo IStock

Qu’est-ce qui se passe dans notre cerveau lorsque l’on tombe amoureux ?

Il traverse une véritable tempête chimique. À l’âge de la reproduction, les hormones sexuelles influencent la production d’ocytocine et de vasopressine, deux substances clés pour l’attachement. On devient alors particulièrement sensible à certains signaux sensoriels, comme une voix, un regard ou une odeur, que notre cerveau associe à la bienveillance.

Si la personne en face correspond à ces critères, ces signaux activent le centre de la récompense et déclenchent une libération massive d’endorphines: c’est l’euphorie et le sentiment d’addiction amoureuse. L’amygdale, une zone du cerveau impliquée dans la gestion des émotions, nous pousse à idéaliser l’autre et à ressentir parfois de la jalousie, autant de réactions qui renforcent le lien amoureux.

Cet amour naissant a-t-il une fonction biologique ?

Oui, tout à fait. L’amour passionnel des débuts de relation n’a pas pour objectif principal de nous rendre heureux, mais de favoriser la survie de notre progéniture. Cette phase intense pousse deux adultes à rester ensemble suffisamment longtemps pour que leur enfant devienne moins vulnérable. Lorsque celui-ci commence à marcher, à se débrouiller seul ou à attraper de la nourriture, vers l’âge de 3 ans, il atteint un seuil de viabilité où la présence d’un seul parent peut suffire. Il n’y a alors plus d’avantage évolutif à forcer deux parents à rester ensemble si ce n’est plus nécessaire pour l’enfant.

L’évolution ne se préoccupe pas de notre bonheur après la reproduction! Ce mécanisme, observé chez de nombreuses espèces monogames, explique pourquoi l’amour intense du début ne dure pas éternellement.

Cette passion éphémère signifie-t-elle la fin de l’amour ?

Non, bien au contraire. La phase passionnelle permet de créer un lien fort et de souder le couple. Une fois cette période passée, l’attachement prend le relais, fondé sur la complicité, l’amitié profonde et l’intimité.

Ce nouvel amour, moins exalté mais plus stable, offre de nombreux avantages: il favorise la santé, le bien-être et la longévité. Comprendre ce mécanisme aide à traverser les différentes étapes de la vie de couple sans douter de la relation lorsque la passion s’atténue. On peut alors se dire: "Nous avons franchi la phase où le cerveau est en ébullition, comment allons-nous écrire la suite de notre histoire?"

Peut-on entraîner son cerveau à aimer sur le long terme ?

Oui, et c’est tout l’enjeu! Les différentes zones du cerveau impliquées dans l’attachement peuvent être stimulées tout au long de la vie de couple. Il s’agit de réinventer la relation, de surprendre l’autre, de partager de nouvelles expériences et de cultiver l’intimité pour entretenir les circuits du plaisir et de l’attachement (lire encadré).

Chaque geste tendre, chaque moment partagé, qu’il s’agisse d’un baiser, d’une caresse, d’un rapport sexuel ou d’une simple conversation autour d’un dîner favorise la libération d’ocytocine. Cette hormone du bien-être apaise, renforce le système immunitaire et ralentit le rythme cardiaque, contribuant à une sensation de sérénité.

Les couples qui continuent à entretenir ces comportements amoureux voient leur relation durer plus longtemps. Ils ne vivent plus dans la dépendance passionnelle, mais dans un bien-être partagé.

Comment stimuler son cerveau?

Raviver les souvenirs heureux. "On peut ressortir des photos, revisiter les lieux marquants de l’histoire du couple, partager les souvenirs des premiers rendez-vous ou des moments forts. En effet, l’hippocampe, zone qui gère les souvenirs, est particulièrement réceptif à la stimulation par la mémoire émotionnelle partagée."

Entretenir la nouveauté et la surprise. "L’organisation de week-ends inattendus, la découverte de nouvelles activités à faire ensemble et la modification des routines sont recommandées. Le noyau accumbens, région du cerveau impliquée dans le circuit de la récompense, se stimule par la surprise ou le changement. Il réagit positivement à la nouveauté, ce qui a pour effet de relancer la motivation et l’excitation au sein du couple."

Multiplier les gestes tendres et sensoriels. " L’insula, qui traite les sensations, profite de nouveaux stimuli sensoriels. Les câlins, les massages, les regards tendres et les caresses sont autant de gestes qui renforcent l’intimité physique et émotionnelle."

Communiquer sincèrement et régulièrement. "La communication est également essentielle pour entretenir le lien et comprendre les besoins de l’autre. Elle permet d’adapter les comportements, de désamorcer les tensions et de stimuler les zones du cerveau impliquées dans l’attachement. Une parole sincère, des compliments réguliers, l’expression de ses envies et de ses frustrations : tout cela nourrit la complicité et renforce le lien amoureux sur le long terme."

Célébrer les succès et les petits bonheurs à deux. " Le partage de la joie favorise la libération d’ocytocine, l’hormone de l’attachement, et renforce la complicité."

Complimenter son partenaire. "Les compliments sincères stimulent la dopamine et la sérotonine, deux neurotransmetteurs essentiels au bien-être. La dopamine est souvent appelée « molécule du plaisir " car elle renforce la motivation et la sensation de récompense, tandis que la sérotonine joue un rôle clé dans la régulation de l’humeur et du sentiment de satisfaction. Leur libération favorise ainsi les sentiments positifs et la satisfaction au sein de la relation. »

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