L’Amadea, méga yacht à 225M€, pourrait être le premier "avoir russe" vendu au profit de l’Ukraine? Un designer niçois et un broker monégasque au cœur de l’enquête du FBI
Justice Le navire, appartenant, selon les États-Unis, au sénateur russe Suleyman Kerimov, pourrait être le premier bien saisi à des oligarques vendu aux enchères au profit de l’Ukraine.
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Eric GallianoPublié le 18/03/2025 à 07:00, mis à jour le 18/03/2025 à 17:17
L’Amadea, le méga yacht suspecté par la justice américaine d’appartenir au sénateur russe sous sanction Suleyman Kerimov.DR
L’Amadea, méga yacht saisi par les Américains dès mai 2022, sera-t-il le tout premier des "avoirs russes" vendu au profit de l’Ukraine? Un arrêt rendu la semaine dernière par la cour de New York ouvre la voie à la mise aux enchères de ce palace flottant. La décision du juge Dale Ho semble en effet clore le débat sur la propriété de l’Amadea, au terme d’une enquête à laquelle se sont retrouvés mêlés un designer niçois et une société de yachting monégasque.
Alors qu’il faisait escale dans les îles Fidji, ce yacht de 107mètres de long avait été appréhendé, quelques semaines seulement après le début de la guerre en Ukraine, à la demande du FBI. Les enquêteurs américains soupçonnent un oligarque placé sous sanction par Washington dès 2018 d’en être le véritable propriétaire. Le sénateur russe Suleyman Kerimov s’en défend... Tout comme il avait déjà, par le passé, contesté les accusations de la justice niçoise qui lui attribuait quatre propriétés de luxe au cap d’Antibes.
Le contrat à 1M€ d’un designer niçois
Photo NM.
Un autre oligarque, Édouard Khoudainatov, avait d’ailleurs volé au secours de Kerimov. Depuis plus de deux ans l’ancien P.-D.G. de Rosneft, une entreprise pétrolière russe, revendique devant la justice américaine la propriété de l’Amadea. Au terme de cette longue bataille judiciaire, la cour de New York vient donc de trancher, estimant qu’il n’était qu’un "propriétaire fictif" et qu’il n’avait donc "pas qualité pour contester la confiscation" de l’Amadea par le gouvernement des États-Unis.
Le témoignage d’un designer niçois n’aura pas donc suffi à convaincre le juge Dale Ho. François Zuretti, le fondateur du groupe éponyme spécialisé dans l’aménagement de yachts et de villas depuis près de 20 ans, a en effet été entendu dans le cadre de cette guerre de propriété. Lors de son audition, l’architecte d’intérieur azuréen a affirmé qu’il n’avait, pour sa part, eu affaire qu’à Khoudainatov, qu’il jure avoir rencontré "plus de dix fois". Dans le cadre des travaux de réaménagement de l’Amadea justement.
Le décorateur niçois à la réputation internationale s’était vu confier la mission de rendre "moins rigide, classique et conventionnel" ce palace flottant. Des plans avaient été établis. Et une coquette facture de 1 million d’euros émise par le groupe Zuretti. Il faut dire que les travaux préconisés étaient d’importance. Outre certains ornements jugés trop ostentatoires, il était question de supprimer le bar et le jacuzzi pour créer à la place une salle de sport. Un chantier qui aurait nécessité la mise à quai de l’Amadea durant sept mois!
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Le prête-nom monégasque
Mais pourquoi envisager de tels changements d’envergure sur un navire livré à peine 5 ans plus tôt par le prestigieux chantier naval allemand Lürssen? Simple caprice de milliardaire? Sauf que les experts américains sont formels, l’ex P.-D.G. de Rosneft n’aurait pas la surface financière suffisante. Contrairement au richissime Suleyman Kerimov. La nouvelle déco de l’Amadea pourrait bien être sa volonté. Elle a d’ailleurs été commandée après qu’un contrat de vente a été établi en septembre 2021. Ce document sur lequel le FBI a réussi à mettre la main fait cette fois intervenir un broker monégasque.
Evgeny Kochman est certes d’origine russe lui aussi, mais sa société de courtage, Imperial Yacht, est implantée en Principauté depuis 2004. Toutefois, le 8 septembre 2021, c’est la juridiction plus clémente des îles Caïman, que Kochman, le spécialiste du yachting basé à Monaco, choisit pour déposer les statuts d’une nouvelle entreprise nommée Errigal. À peine créée, Errigal s’engage six jours plus tard à acheter l’Amadea pour la bagatelle de 225 millions d’euros! D’ailleurs moins de 96 heures plus tard, un premier acompte de 45 millions est versé, suivi du solde de 180 millions d’euros payé rubis sur l’ongle le 27 octobre suivant.
Là encore, le broker monégasque pourrait n’être qu’un homme de paille. Car ces deux virements ne sont pas sortis de sa poche. Ils ont été émis depuis un compte que les enquêteurs américains attribuent à Alisa Gadzhieva qui n’est autre que... la nièce de Suleyman Kerimov. De quoi justifier la saisie de l’Amadea et peut-être, demain, sa mise aux enchères. Le congrès des États-Unis a en effet voté l’an passé une loi autorisant la vente au bénéfice de l’Ukraine de biens d’oligarques russes saisis. Mais c’était avant que Donald Trump ne se rapproche de Vladimir Poutine et que la cellule "Kleptocapture" créée du temps de son prédécesseur Joe Biden pour traquer les oligarques sous sanctions tels que Kerimov ne soit dissoute.
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