Ces dernières semaines, et même ces derniers mois, une guerre de territoires a éclaté à Nice, à l’Est et à l’Ouest de Nice. Les groupes de narcos tentent de s’approprier le juteux trafic des stupéfiants.
Les tentatives de reprise des points de deal ont été violentes. Ces épisodes laissent les habitants toujours plus inquiets. À quand le premier mort collatéral de cette guerre des narcos?
Des mercenaires "low cost" et recrutés sur Snapchat
La nouveauté, c’est que les équipes recrutées pour reprendre en main les points de deal des résidences Roquebillière sont constituées de mercenaires "low cost". Selon le procureur de la République, certains ont même été embauchés via Snapchat. Recruter des guetteurs, ou des vendeurs sur les réseaux sociaux, cela existait déjà. Mais un cran inquiétant a été franchi. On demande désormais à cette main-d’œuvre venue de Nice, Marseille ou du Val-de-Marne, de lancer des opérations éclair, kalachnikov en main. "Il y a des offres de service et des offres d’emploi sur les réseaux sociaux. Ils sont ensuite mis à la disposition du réseau, pour des petits boulots ou des actions de reprise en main", confirme le patron de la PJ, Eric Antonetti. Parfois, les réseaux utilisent des petites mains endettées et redevables. Eric Antonetti s’inquiète de cet "amateurisme" et de ces jeunes qui se retrouvent avec une arme de guerre. "C’est extrêmement dangereux."
Un point de deal à 600.000€ par mois
Pourquoi ces regains de tension dans les quartiers? Paradoxalement, parce que la justice et les services de police ont frappé fort, très fort ces derniers mois. Mais comme la nature, et les narcos, ont horreur du vide, ils profitent qu’un réseau soit à terre, et en prison, pour tenter de récupérer ces supermarchés de la drogue à ciel ouvert. On en veut pour preuve l’énorme coup de filet sur le point de deal de la Laverie, le 13 novembre dernier. Dès le lendemain, le 14 novembre, une nouvelle équipe tentait d’en prendre le contrôle, en tirant à la kalachnikov.
Un point de deal qui rapporte jusqu’à 600.000 euros par mois, ça aiguise les appétits... Un autre exemple? Le 25 juin, vaste coup de filet aux Résidences Roquebillière, à l’est de Nice. Une opération de police mène à la saisie de 42 kg de résine de cannabis, 330 g de cocaïne, 735 g d’herbe, 40.000 euros, douze armes dont un fusil-mitrailleur kalachnikov et un pistolet-mitrailleur Uzi. Dix personnes sont mises en examen.
Là encore, même scénario qu’aux Moulins. Moins d’une semaine après, le 1er juillet, une équipe de narcos tente de reprendre le point de deal en rafalant à la kalachnikov de nuit, dans le quartier. Deux interpellations à la clé. Ce qui n’empêchera pas une autre équipe de tenter de nouveau sa chance le lendemain. "On est de Marseille, on vient récupérer le point de deal", ont-ils hurlé au pied des barres d’immeubles le 2 juillet, en plein après-midi. Sidérant. Cette fois, huit interpellations ont suivi.
Inefficacité du "tout répressif"
Comment sortir de cet engrenage? Un chercheur varois, Sebastian Roché, pointe du doigt l’inefficacité du tout répressif. Les syndicats, eux, réclament plus de moyens. Le procureur de la République de Nice, de son côté, se désole que la demande des consommateurs soit toujours aussi forte. Il entend continuer à s’en prendre à eux, mais aussi aux dealers, aux circuits financiers, tout en menant une politique de harcèlement quotidien.
Une guerre sans fin? "Il faut être modeste, il est impossible de mettre totalement fin au trafic, répond Damien Martinelli. Ce que je sais de manière certaine, c’est où on en serait si on ne faisait pas. Si on ne faisait pas, les gens n’appelleraient plus la police. C’est un véritable indicateur. Cela veut dire que les gens pensent encore que l’État à une réponse à apporter."
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