Ils avaient de l’eau jusqu’à la taille au Lavandou: "C’était apocalyptique, on a cru qu’on allait mourir"

Mardi matin, Julie et Ulrich ont fui la résidence Les terrasses du Cavald’Or au Lavandou avec de l’eau jusqu’à la taille. Ils ont juste eu le temps de dire au couple tragiquement décédé de partir. "On est debout", témoignent-ils.

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Olivier Bouisson Publié le 24/05/2025 à 07:00, mis à jour le 24/05/2025 à 07:00
Julie et Ulrich ont perdu leur appartement dans les inondations, mardi. Ils sont les derniers à avoir vu les deux personnes décédées pendant les intempéries au Lavandou. Photo Camille Dodet

Ce vendredi est un jour heureux pour Julie et Ulrich, le couple à la tête du restaurant La Bonne aventure, situé sur l’artère principale de Cavalière, au Lavandou. Leur établissement n’ayant pas été inondé, ils ont pu rouvrir en cette belle journée ensoleillée qui annonce un week-end enfin radieux. Un des jours d’après l’orage, d’après le drame.

Mardi matin, Ulrich se réveille vers 8h30 dans son appartement de la résidence Les terrasses du Cavald’Or. Il soulève le store qui donne sur son jardin. Il constate qu’il pleut fort sans faire trop attention que la rivière "Quicule" (sic), située en face, est montée. Elle a même passé la haie qui leur coupe la vue. Quelques minutes plus tard, l’eau est encore montée, elle lèche la baie vitrée. Il ouvre la porte d’entrée, l’eau s’engouffre.

"On s’enfonçait, on luttait dans le courant"

"Il y a un problème, j’ai un mauvais pressentiment, on s’en va", lance-t-il à Julie qui préfère rester pour écoper. Ulrich prend soin de mettre sa box Internet en hauteur. L’eau monte très rapidement. Il comprend qu’il faut quitter l’appartement avant qu’il ne soit trop tard. "Finalement, on est parti en pyjama. On a juste eu le temps de prendre notre chien Muesli, rien d’autre". Il est 8h53 précises. Ils passent par la fenêtre de leur chambre. Ils ont de l’eau jusqu’à la taille et parcourent difficilement la cinquantaine de mètres qui les sépare de leur véhicule, situé plus haut. "On ne savait pas où on mettait les pieds, on s’enfonçait, on luttait dans le courant. C’était apocalyptique. On a cru qu’on allait mourir".

En chemin, ils croisent les voisins Philippe et Bernadette Bernard, qui regardent l’eau monter depuis leur salon. Ils leur crient de partir, vite. Sans pouvoir agir. Ils sont probablement les derniers à s’être adressés au couple de retraités octogénaires de l’Yonne, emporté quelques minutes plus tard par le torrent. Probablement entre 9h et 9h15, au pic de la crue. "Ils étaient d’une gentillesse! Sûrement les plus doux de la résidence. Toujours un mot pour nous, pour savoir si on travaillait bien", s’émeut Julie. Les rescapés trouvent refuge chez une amie sur les hauteurs de la commune.

"Comme dans une machine à laver"

Une fois la décrue amorcée, Ulrich retourne à la résidence en début d’après-midi. Un choc. "Je tremblais… J’ai réalisé que l’on aurait pu y rester et qu’on était vivant...". "On nous dit toujours de rester chez soi en pareil cas mais si on l’avait fait, on ne serait plus là", ajoute sa compagne.

Il fait le tour de l’appartement pour constater qu’il n’y a plus rien. Seulement les murs et le frigo couché au milieu du salon. "La cuisine a été arrachée, tout le mobilier a été emporté, même notre canapé lit qui pesait une tonne. Ça devait être comme dans une machine à laver." "Jamais on aurait pu imaginer une crue aussi intense, s’étonne Julie. On a déjà vécu des alertes rouges et la rivière n’avait même pas débordé alors on ne s’en inquiétait même pas." "Si je n’ouvre pas le store et qu’on prend vingt minutes pour se détendre, on aurait été emportés", rembobine Ulrich.

Plus tard, à une vingtaine de mètres de leur appartement, ils remarquent ensemble une silhouette familière qui émerge de la boue: une statuette colorée d’une vierge ramenée d’un voyage au Mexique. "Elle était sur une étagère au-dessus de notre lit...". La force des symboles.

"On est debout, on va bien"

Depuis la vague, le couple a reçu des dons de collègues restaurateurs, dix sacs d’habits donnés par un commerçant borméen et plein de solutions pour la nuit. L’agence immobilière de Cavalière leur prête actuellement une maison.

Depuis le drame, le couple dit se réveiller la nuit et y penser quand le ciel s’assombrit. Qu’il leur sera impossible de revenir vivre à Cavald’Or. Julie n’évacue pas la possibilité de se confier à la cellule psychologique mise en place par la Protection civile, qui a déjà recensé 25 personnes pour un suivi.

Elle sourit: "Mais ça va, hein! On est debout, on va bien. On a perdu notre appartement et nos affaires, on n’a pas perdu un membre de nos familles ou un ami. Ça va passer. On est là, hyper motivés pour faire la saison. On a la chance d’être hyper solidaires et main dans la main avec tous les commerçants de Cavalière pour faire savoir qu’on est prêt à accueillir les touristes!" La force de regarder devant.

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