"Je ne sais même pas comment les salariés pourront accéder à la boutique. Alors les clients…" Jean-Pierre Roux est en colère. Le directeur général de la parfumerie Galimard, à Èze, est "obligé de fermer" dimanche 21 juillet. Conséquence de l’étape finale du Tour de France, qui "rend le village inaccessible" toute la journée.
"En plein pic saisonnier, assène le parfumeur, ça paraît incroyable de mettre en quarantaine la commune. On s’attendait à une petite coupure au passage des coureurs, pas à une journée complète de fermeture." Comble d’infortune pour le commerçant: il ne s’agit pas d’une étape "classique" avec passage de la caravane puis du peloton mais d’un contre-la-montre individuel avec départs échelonnés pendant quatre heures.
D’où les importantes restrictions: la Moyenne Corniche est neutralisée de 9 à 19 heures, comme la Grande Corniche, la route de La Turbie et le boulevard Maréchal-Leclerc. En clair, impossible d’entrer ou de sortir d’Èze village entre 9 et 19 heures. Sinon à pied, depuis le bord de mer, par le chemin Nietzsche. Une heure de marche.
"Personne ne va m’indemniser"
"On est tous contrariés, grommelle le maire, Stéphane Cherki. Une grande partie des accès seront fermés toute la journée. Pas simple à gérer pour les commerçants et les hôteliers… Ça fait suer tout le monde. Surtout que c’est une des journées les plus travaillées de l’année. Même pour nous, la commune: d’habitude, notre jardin exotique est bondé le dimanche; là, on reste ouvert mais on sait qu’on ne verra personne."
Dans les boutiques, le sentiment est effectivement répandu. "Je suis obligée de fermer. Ça ne m’arrive jamais: d’habitude, je suis ouverte tous les jours de février à novembre. Je perds un dimanche de juillet que personne ne va m’indemniser. Je suis une petite boutique indépendante; cette journée, j’en ai besoin", tonne Valérie Morize, de "Cuirs et compagnie".
La maroquinière s’agace aussi de la méthode: "Je suis en colère. Personne ne nous a demandé notre avis. Il n’y a pas eu de réunion d’information. On aurait pu chercher des solutions… Rien. On a juste reçu par communiqué la décision de la préfecture. C’est très cavalier."
"Inacceptable…"
La méthode exaspère aussi le directeur de la Chèvre d’Or, Thierry Naidu: "On n’a pas d’interlocuteurs. On cherche des solutions mais personne n’est en face pour en discuter. On a demandé si on pouvait mettre en place une navette pour acheminer nos clients: pas de réponse. C’est inacceptable de se comporter comme ça…"
Il a chiffré la perte de son établissement: elle est colossale. "On doit fermer deux de nos trois restaurants, dont le gastronomique. On a eu des dizaines d’annulations après l’annonce des restrictions, assure-il. Nos pertes sur la journée, c’est au moins 50.000 euros. Et les autres hôteliers, avec qui j’échange beaucoup, sont dans la même situation."
À Château Eza (14 chambres), on a enregistré deux annulations après avoir informé les clients. "Cela perturbe l’activité et le séjour de nos clients mais pas notre taux de fréquentation", indique l’établissement.
"On ne va pas cracher dans la soupe"
Parmi les commerçants que nous avons contactés, rares sont ceux qui positivent. Mais c’est le cas de Séverine Egea, directrice de la boutique Fragonard, située place De-Gaulle: "On s’adapte. Moi qui vis à Nice, je dormirai la veille chez ma collègue, à Eze. Et on verra bien comment se passera la journée… Je ne sais pas combien on aura de clients mais on ne va pas cracher dans la soupe. Ce genre d’événement fait venir des touristes sur plusieurs jours. Ce qu’on va perdre sur une journée, on le rattrapera les autres jours."
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