TÉMOIGNAGE. Manipulation, insultes, violences... Comment Marie a trouvé la force de quitter son "mari idéal"

Quelques jours après la mise à mort d’une jeune fille de 21 ans à Cagnes-sur-Mer, rouée de coups, son corps abandonné sous des détritus, un "Grenelle des violences conjugales" débute ce mardi sous la responsabilité de la secrétaire d’État à l’égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa. Ce témoignage illustre une situation dramatique pourtant très classique.

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Franck Leclerc Publié le 03/09/2019 à 07:10, mis à jour le 03/09/2019 à 14:27
Il y a dix-huit mois, Marie, une Niçoise de 48 ans, se séparait du père de sa fille. En ouvrant les yeux sur des signes qu’elle n’avait jamais voulu voir. Après une gifle de trop et des années de cauchemar. F. L.

Rendez-vous dans un local discret de l’Abri Côtier. Un centre d’accueil de jour, créé en 2013 par le CCAS de Nice, où Marie a trouvé réconfort, écoute et soutien. Comme 200 à 250 autres femmes qui, chaque année, y sont prises en charge après avoir subi des violences conjugales.

Pour cette Niçoise de quarante-huit ans, la vie de couple avait commencé quasiment sans nuages. Avec un homme rencontré en 1995, épousé le 1er janvier 2000. Mais le jour même de la cérémonie, son attitude ambiguë à l’égard d’une jeune nièce aurait dû l’alerter. "Je n’ai pas voulu voir", se reproche Marie. "Ayant reçu une éducation stricte, j’avais des valeurs." 

Malgré tout, une union sans histoires pendant quelques années: "C’était un homme parfait. Gentil, bienveillant, attentionné. Et un père exemplaire."

De "petit apéro" en tournée générale, "l’alcool mauvais" a commencé à faire sentir ses effets. Très vite, la manipulation, les insultes, la jalousie et une forme de soumission.

Précipitant Marie, déjà victime de harcèlement moral au travail, dans une dépression suffisamment lourde pour justifier une hospitalisation de six semaines dans une clinique psychiatrique.

Volage et voleur

De son côté à lui, les tromperies se seraient répétées. Le mari volage l’aurait également dépouillée: "Il m’a volé de l’argent, mais là encore j’ai fermé les yeux, décidément très naïve."

Marie qui, selon une circonstance manifestement aggravante, gagnait plus que lui, a vu pour mille autres raisons son union partir à vau-l’eau. "J’ai mis ma vie de femme entre parenthèses. Je n’ai pas su partir, j’ai eu peur." 

Dans l’intervalle, quelques états de grâce. Et même des élans irraisonnés: "Pour mes quarante ans, il a organisé une super fête avec DJ, boule à facettes et voyage en Floride."

Idem pour le sac Vuitton ou le permis de conduire offerts à sa fille "avec de l’argent qu’il n’avait pas", le tout à crédit.

Marie, passée un temps de 93 à 57 kg, a fini par rencontrer un collègue, elle qui se disait "ne plus croire aux hommes". L’estime de soi est revenue. Et un peu d’assurance.

"Je me suis promis de quitter mon mari s’il lui prenait encore l’envie de me rabaisser." Ce qui n’a pas manqué de survenir. Le 4 février 2018, pour un motif futile et dans les vapeurs de l’alcool, une bordée d’injures et une claque.

"Ma bonne fée"

Marie a tenté de sortir de la pièce. "Il s’est dénudé, m’a empêché de passer et m’en a remis une."

La décision était prise. "Je l’ai prévenu que j’allais voir la police. Il a essayé de faire basculer l’aquarium et a bousculé l’un de mes chiens. Pour me faire reculer." 

Marie, en pyjama et claquettes, n’a eu que le temps d’attraper son portable et ses clés. "J’ai sonné chez mes voisins en hurlant. Étant nu, mon mari n’a pas pu réagir."

Sa plainte enregistrée, Marie s’est réfugiée chez ses parents, contrainte de laisser à cet homme l’appartement dont elle était pourtant seule propriétaire. "Il l’a occupé pendant un an à titre gratuit, et c’est moi qui ai dû payer les charges." 

Ce n’est pas tout: "Il m’a dérobé 7.000 euros. A escroqué ma mère sur des chèques emploi-service. Et s’est retrouvé avec 32.000 euros de dettes."

Tout en le jugeant malade, Marie culpabilise. D’avoir notamment occulté ce qu’elle décrit aujourd’hui comme un véritable "cauchemar". Le divorce n’est pas encore prononcé mais le dénouement se rapproche.

La police l’a mise en relation avec une assistante sociale qui, en "bonne fée", l’a aidée.

À l’Abri Côtier, elle a bénéficié d’un accompagnement complet et a rencontré d’autres femmes avec lesquelles s’est constitué "un noyau".

Certaines, parmi elles, sont encore sur le chemin. Un seul conseil: "Partir." Malgré les épreuves à venir, dont la précarité et les amis qui vont fuir, "partir au plus vite".

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