"J’ai appris à être une enfant de la mer": l’Antiboise Alice Modolo raconte comment elle a découvert l’apnée avant de devenir une championne

Vigie de l’océan (6/10) L’apnéiste Alice Modolo, Antiboise d’adoption, n’était pas prédestinée à atteindre les 100 m la première, ni à ramener des profondeurs la Flamme olympique. à l’approche du sommet de l’ONU pour l’Océan, elle dit son amour pour cette mer si malmenée.

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Christophe Cirone Publié le 28/04/2025 à 08:45, mis à jour le 30/04/2025 à 11:36
Photo NM

Elle ouvre grand ses yeux bleu lagon, tandis que le bateau glisse le long des quais du port Vauban. "chaque fois que je vais en mer, j’ai l’impression de la découvrir pour la première fois", s’émerveille Alice Modolo. L’apnéiste antiboise, licenciée au Chango Diving à Nice, est pourtant dans son jardin. Première femme française à avoir franchi la barre des 100mètres, vice-championne du monde 2023, elle a coutume de briller dans les profondeurs de la mer. Mais c’est en voguant qu’elle a choisi de nous en parler.

Son ami Norman Pennachietti nous embarque à bord de Ty-Diabolo, le voilier de dix mètres de la Société des régates d’Antibes. Le Département y invite les personnes en situation de handicap à découvrir la mer. Des valeurs que partage Alice Modolo. Planète Urgence, Invincible, Grégory-Lemarchal... Les associations citées sur sa combinaison témoignent de son engagement. "J’ai tellement vu l’impact de la mer sur moi... Il faut que je partage ça."

Alice Modolo à bord de Ty'Diabolo, à quelques encablures des côtes antiboises. Photo Dylan Meiffret.

Sa volonté d’ouvrir la voie

Le destin d’Alice Modolo, 41 ans, s’est longtemps écrit loin de la Côte. Elle quitte Clermont-Ferrand pour Nice en 2013, elle l’Auvergnate qui, sans façon, suit le cap d’une carrière de chirurgien-dentiste. Le sport? "Une contrainte" à l’école. La natation? Pas son point fort. L’apnée va pourtant lui offrir un second souffle.

L'apnéiste enfile la palme qui l'accompagne au-delà des cent mètres de profondeur. Photo Dylan Meiffret.

L’élève en médecine a 23 ans quand elle croise la route d’un étudiant doublé d’un sportif brillant. Son exemple l’inspire. Elle observe alors les apnéistes enchaîner les longueurs de piscine. "C’est impossible!" songe-t-elle d’abord. Alors elle se jette à l’eau. Elle est "passionnée par le corps humain", a "fait un master sur la douleur".

Gérer la douleur, les femmes en savent quelque chose. Alice Modolo s’offusque que Le Grand Bleu et le monde de l’apnée les aient longtemps snobées. Elle veut "ouvrir aux femmes cette discipline qui fait appel à leurs compétences innées. C’est nous qui donnons la vie... Or la première qualité que requiert l’apnée, c’est le mental. "

"J'ai appris être une enfant de la mer", image joliment l'Auvergnate, Azuréenne d'adoption. Photo William Rhamey / Azur Diving.

Le sien l’aide à franchir palier après palier à partir de 2018. Elle collectionne 25 records de France, signe plusieurs perfs mondiales. Mais elle n’a pas fini d’explorer son terrain de jeu.

Son électrochoc salutaire

"Ma relation à la mer naît très difficilement, se souvient Alice Modolo, bercée par les vagues au large de la cité des remparts. Au début, c’est un élément perturbateur. J’ai la nausée, la combinaison me serre le cou, je ne suis pas bien... Je reste longtemps bloquée, jusqu’à ce qu’un apnéiste confirmé m’emmène à 50mètres. Et là, je n’ai plus peur."

La "femme-flamme", rayonnante, remonte la torche olympique à la surface, à Villefranche-sur-Mer, le 18 juin 2024. Photo DR.

Longtemps, sa vision de la mer se résume à longer un câble pour plonger dans le bleu profond. En 2019, première tentative de passer les 100mètres. échec. "Il y a un fort courant et je ne l’ai pas ressenti. Là, je me dis que je ne connais pas la mer. J’ai le sentiment qu’elle me met une gifle: « Hé, tu es chez moi, va falloir que tu connaisses un peu plus ce que je suis!" a a été un vrai électrochoc. »

Dès lors, la femme-sirène va passer six mois dans la rade de Villefranche-sur-Mer, "à barboter avec les posidonies et les petites castagnoles ". Elle s’y sent peu à peu "à la maison." C’est dans cette rade, le 18 juin 2024, qu’Alice Modolo ramène à la surface la Flamme olympique. "Un moment historique pour l’apnée! L’occasion de faire parler de ce sport qui nous ramène aux origines. L’eau nous porte, nous berce. J’ai appris à être une enfant de la mer."

Son inquiétude pour l’avenir

Aux yeux d’Alice, "il n’y a rien de plus puissant que la nature". Or cette nature est malmenée. Elle le voit bien d’une mer à l’autre, au fil de ses plongées. "L’eau se réchauffe. On voit davantage de méduses, car des prédateurs comme les tortues sont moins présents. Tout l’écosystème est bouleversé! La nature, elle va s’en sortir. C’est nous qui ne pourrons plus aller dans l’eau..."

La pollution plastique, la pollution en général sont évidents, quand "des plages doivent fermer parce que c’est trop toxique pour nous". Alors oui, il faut sensibiliser. La Conférence des Nations Unies pour l’Océan, attendue en juin à Nice, en est l’occasion. "Mais quand on parle d’écologie, il y a toujours une notion de contrainte. Pour moi, le meilleur moyen d’impliquer les gens, c’est de leur faire ressentir les bienfaits."

Photo NM .

Son invitation à respirer

Alors, pour prendre soin de la mer, Alice Modolo invite les humains à songer à... leur bien-être. "Si les gens sont stressés, sous pression, ils ont d’autres chats à fouetter. L’urgence, c’est de les ramener à eux". Reprends ton souffle: ainsi s’intitule sa méthode, qu’elle partage sur Instagram. "La respiration libère toutes les contractions dans le corps. C’est un reset. On remet les compteurs à zéro. Savoir respirer, c’est redonner du pouvoir aux gens."

Retour au port, après une respiration en mer. Alice Modolo savoure ces instants privilégiés, loin de "la quête du toujours plus. J’ai envie d’être toujours plus dans la nature. Et c’est capital de la préserver."

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