"Il y a une voie responsable, humaniste et gourmande": le chef triplement étoilé Olivier Roellinger s'associe avec l'Ifremer pour une pêche durable

Pêcher durablement, manger bon, voire très bon. Une génération de chefs cuisiniers a commencé à s’engager sur cette voie et trace le sillon d’une gastronomie alliée à une pêche durable. Leur parrain de cœur et de cuisine est le chef breton Olivier Roellinger, co-créateur d’un concours à son nom, où étudiants et professionnels travaillent poisson, crustacé, mollusque et algue, bref tout ce qui se mange dans la mer, à condition d’être prélevé de façon durable.

Trois étoiles au Michelin (il les a rendues), ce chef autodidacte a fait entrer en cuisine l’expertise scientifique, jonction inattendue entre la grande table et la recherche la plus pointue sur la vie marine, incarnée par l’institut français Ifremer, qui fête ses 40 ans cette année. "On peut écrire une autre cuisine de la mer, en prenant pleinement conscience des enjeux, s’enthousiasme Olivier Roellinger, à condition d’écouter les recommandations des chercheurs." Les enjeux sont aussi sociétaux, ajoute-t-il. "Il ne faut pas oublier nos amis, les pêcheurs artisans responsables." En France, 75% des produits de la mer consommés sont importés. Pour l’essentiel, nous en ignorons l’origine.

Trois critères d’une pêche durable

"Il y a trois critères d’une pêche durable, ce sont les scientifiques qui nous guident et nous aiguillent, énumère Olivier Roellinger. L’espèce est-elle en danger dans sa zone de pêche? La méthode de pêche est-elle impactante pour l’écosystème? La taille minimum du poisson est-elle respectée?" Il en va de sa capacité à se reproduire, avant d’être pêché, et du maintien des populations. Si les trois critères sont remplis, "alors nous avons une pêche durable".

"Cela peut paraître complexe pour le néophyte", admet volontiers le cuisinier, sauf que "nous avons un guide des espèces, édité et réactualisé tous les ans". Ce guide est le fruit du travail de l’association Ethic Océan, dont Olivier Roellinger est le parrain, en partenariat avec l’Ifremer, qui établit un diagnostic pour chaque espèce (lire par ailleurs).

"Mangeurs et mangeuses, cuisiniers et cuisinières, poissonniers, mareyeurs", déclame Olivier Roellinger avec gourmandise, chacun peut trouver les bons ingrédients, dans tous les sens du terme. "Quand les politiques depuis des années n’osent pas, nous, les cuisiniers, avons le pouvoir de choisir ce que nous mettons dans l’assiette."

Entre le je-m’en-foutisme et l’éviction totale des produits de la mer, "il y a une voie responsable, humaniste et gourmande".