"Tu regardes les courses seulement pour les pilotes": dans la Fan zone, ces jeunes femmes passionnées de F1 combattent les stéréotypes

Parce que oui, parfois, être une femme, c’est devoir être incollable sur le sport qu’on aime sous peine d’être disqualifiée d’office.

Erine Blache Publié le 23/05/2025 à 13:00, mis à jour le 23/05/2025 à 13:00
Pour Federica et Valeria, la F1 est une passion transmise de génération en génération Photo: Jean François Ottonello/Monaco Matin

 "Alors explique-moi ce qu’est le DRS. " Voilà le genre de questions qu’une fan de Formule 1 peut se voir poser dès lors qu’elle évoque sa passion. Parce que oui, parfois, être une femme, c’est devoir être incollable sur le sport qu’on aime sous peine d’être disqualifiée d’office. Là où un homme pourra se contenter d’être un passionné de football, une femme devra citer une dizaine de joueurs et expliquer la règle du hors-jeu pour être prise au sérieux. Et sans surprise, la F1 subit le même sort.

Pourtant, elles étaient nombreuses ce jeudi, à la Fan zone, à porter cette passion en elles. "Je m’intéresse à ce sport depuis que je suis toute petite, car chez nous, c’est un peu une tradition. Tous les dimanches, on regardait la F1. Que ce soit la vitesse, le bruit, l’adrénaline : tout me plaît dans cette pratique sportive", confie Federica, 25 ans. Accompagnée de son amie Valeria, elle est venue de Sicile spécialement pour assister au Grand Prix.

Une passion souvent décrédibilisée

La ferveur qui l’anime semble indéniable et pourtant… "Lorsque je parle avec des femmes de l’amour que j’ai pour ce sport, il n’y a aucun problème. Mais dès que j’en discute avec des hommes, ils s’amusent, presque systématiquement, à me poser tout une série de questions techniques. Ils cherchent à me tester. " C’est presque comme si, pour certains, être une femme et aimer un sport automobile étaient deux choses complètement inconciliables.

"Pour eux, je regarde la F1 parce que les pilotes sont beaux." Une remarque qui l’agace, tout autant que son amie : "Ils nous disent cela alors qu’on ne voit même pas les visages des pilotes quand ils concourent ! C’est ridicule… d’autant plus qu’on se lève à 5 h du matin pour regarder les courses", rétorque Valeria, pour qui les beaux yeux de Charles Leclerc ne sont clairement pas une raison suffisante pour sacrifier quelques heures de sommeil.

Les pilotes féminines encore trop souvent invisibilisées

Si, pour Federica et Valeria, la F1 est une passion transmise de génération en génération, pour d’autres, c’est une découverte récente. Ces dernières années, le nombre de fans féminines a littéralement explosé et Netflix n’y est pas étranger. Lancée en 2019, la série documentaire Drive to Survive a grandement contribué à accroître la popularité de la Formule 1 à l’échelle mondiale. En offrant aux spectateurs un regard de l’intérieur sur les pilotes et les écuries, elle a très rapidement séduit un large public.

Mais malgré cette croissance, les pilotes féminines restent invisibilisées au grand dam de certaines amoureuses de ce sport. "C’est regrettable qu’il n’y ait jamais eu de femmes à temps plein en F1. Elles sont pourtant nombreuses à avoir prouvé qu’elles en étaient capables. Je pense bien évidemment à Susie Wolff mais aussi à toutes ces pilotes incroyables de la F1 Academy (*) comme Doriane Pin ou Abbi Pulling. Malheureusement, il existe toujours cette barrière alimentée par la misogynie", déplore Ana Paula, une Mexicaine de 26 ans.

Elle aussi est très régulièrement ciblée par des stéréotypes. "La première réaction des hommes quand je leur parle de ma passion c’est de dire ‘‘Tu regardes les courses seulement pour les pilotes. Parce que tu les trouves sexy‘‘ alors que j’aime ce sport parce que, à mes yeux, il représente le summum de l’ingénierie et de la prise de risques."

"Je combats la sexualisation des pilotes "

Ces remarques sont fréquentes et Etel, une Ukrainienne de 16 ans les trouve particulièrement dérangeantes : "Je combats assez fermement la sexualisation des pilotes. À cause des femmes qui font une obsession sur certains pilotes, les gens pensent que toutes les fans féminines de sport auto sont des groupies. Et, en tant que passionnée de Formule 1, ça me dérange que de nombreuses personnes parlent du physique des sportifs avant de parler du sport en lui-même. Alors, bien évidemment, j’aimerais qu’il y ait plus de pilotes féminines en F1 mais je crains les réactions des spectateurs… Si les mecs sont autant sexualisés, je n’ose pas imaginer ce que ce sera pour les femmes."

Pour autant, la F1 Academy a été lancée en 2023. Elle permet à des pilotes féminines de s’affronter entre elles. Une avancée majeure pour un sport qui a longtemps été dominé par des hommes. "C’est super d’avoir créé cette compétition mais ce serait encore mieux si elles pouvaient participer aux courses de F1 avec les autres pilotes masculins", souligne Vanessa. Cette Hongroise de 25 ans est, à l’image de nombreux fans, venue de loin pour assister à cet événement mythique qu’est le Grand Prix de Monaco.

*F1 Academy : série de courses monoplaces exclusivement féminines.

 

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