Mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre: à quoi s’attendre dans les Alpes-Maritimes?
Le mouvement de contestation citoyenne "Bloquons tout", qui proteste contre les mesures budgétaires du gouvernement, ne s’arrêtera pas en cas de chute - probable - du Premier ministre ce lundi. De nombreuses actions sont prévues mercredi 10 septembre et même avant.
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Mathilde TranoyPublié le 07/09/2025 à 12:10, mis à jour le 07/09/2025 à 13:01
Sur les réseaux sociaux, des collectifs citoyens "Bloquons tout", "Indignons nous", "les Essentiels" invitent tous ceux qui se reconnaissent dans le mouvement à paralyser l’économie.Dessin Deligne
"Le 8 on fait tomber Bayrou, le 10 on fait tomber Macron." La colère gronde en France en cette rentrée. Depuis le mois de mai, un mouvement baptisé "Bloquons tout" appelle à une mobilisation générale à travers la France.
Né sur les réseaux sociaux, ce collectif citoyen sans structure hiérarchique revendique un "arrêt total et illimité" du pays le 10 septembre, pour protester contre les mesures budgétaires du gouvernement de François Bayrou, notamment la suppression de deux jours fériés, les coupes dans les services publics et le gel des prestations sociales.
Plus rien ne semble pouvoir l’arrêter. Quelle que soit l’issue du vote de confiance de l’Assemblée nationale auquel le Premier ministre se soumet ce lundi - vote qui devrait, sauf surprise, entraîner la chute de son gouvernement. Ce mouvement cristallise le rejet de sa politique budgétaire. Mais dans les slogans, c’est souvent le président Emmanuel Macron qui est visé, accusé d’imposer "toujours les mêmes sacrifices".
Sur les réseaux sociaux, des collectifs citoyens "Bloquons tout", "Indignons nous", "les Essentiels" invitent tous ceux qui se reconnaissent dans le mouvement à paralyser l’économie.
Des appels à vider son compte en banque, ne plus consommer ou ne plus payer par carte bancaire mais seulement en espèces, ne plus se déplacer se propagent.
Quelle sera l’ampleur de la contestation? Les services de renseignements sont sur les dents, les services préfectoraux dans l’expectative. Ces groupes, extrêmement bien préparés, contrairement au mouvement des "gilets jaunes", placardent depuis plusieurs jours des affiches pour appeler à passer à l’action, avec un QR code qui permet de rejoindre des communautés sur la messagerie. Des formations en ligne sont également dispensées (lire par ailleurs).
Dans les Alpes-Maritimes, le mouvement a reçu le soutien de la CGT et de La France insoumise.
Ce qui vous attend dans les Alpes-Maritimes
Dans les Alpes-Maritimes, plusieurs mouvements se sont déclarés. Tour d’horizon de ce qui vous attend ce mercredi 10 septembre. Des rendez-vous ont été pris aussi les jours précédent.
Lundi 8 septembre
À commencer par ce lundi soir, des "concerts de casseroles" sont prévus devant plusieurs mairies. À Antibes, pour le "pot de départ de Bayrou", un apéro et concert de casseroles est programmé devant la mairie à 19 heures.
À Cannes et Nice, ce "pot de départ", est signalé ce lundi, également, à 19 heures devant la mairie.
Mardi
Des organisations de jeunesse de Nice et de Menton appellent également à une assemblée générale étudiante et universitaire sur le campus de Carlone à Nice mardi 9 septembre à 17 heures. "Toute la communauté universitaire est conviée: étudiants, doctorants, professeurs, personnels, agents."
Mercredi
À Antibes, "une mobilisation pour faire bloc", est annoncée rond-point de Provence du grand Carrefour » à 8 heures. Une "assemblée générale citoyenne" se tiendra place De-Gaulle à 19 heures.
À Nice, le site indignonsnous.fr indique une "mobilisation citoyenne", prévue dans le Vieux-Nice, place Carlou-Aubert, à 11h30.
Une "assemblée citoyenne" est actée à 14 heures, devant le Palais des expositions.
Le Front Populaire Étudiant a appelé à la mobilisation à 14 heures, à Magnan, pour une marche jusqu’à la gare Thiers, dans le cadre de la dynamique nationale "On ne veut plus".
À Saint-Laurent-du-Var, à 10 heures, la CGT se rendra devant les locaux du Medef.
À Tende, à 14 heures, départ de la "Vélorution" depuis la gare de Tende, arrivée prévue vers 15 heures à Breil-sur-Roya.
À Touët-sur-Var, à 7 heures, au rond-point du Cians, "rendez-vous citoyen des vallées".
Trafic aérien: la CGT Air France prévoit aussi un appel à la grève les 10 et 18 septembre. Le syndicat minoritaire SUD Aérien appelle à la grève et au blocage des aéroports le 10 septembre, en rejoignant le mouvement national contre l’austérité. Le Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL), première organisation de la profession, a indiqué qu’il n’appellerait pas à la grève.
Le mouvement Bloquons tout du 10 septembre parviendra-t-il à mobiliser autant que celui des " gilets jaunes " de 2028?Photo Frantz Bouton.
Beaucoup d’inconnues
Mais l’opacité reste forte: blocages pressentis à l’aéroport de Nice ou sur la place Masséna, actions surprises inspirées des "gilets jaunes". Difficile pour les autorités d’anticiper.
Un collectif appelle au "blocage de tous les aéroports internationaux", dont Nice, les 10, 11, 12, 13 et 14 septembre, avec des consignes "d’opérations escargot", "de venir massivement à pied dans les aéroports pour embouteiller", "bloquer l’accès aux terminaux", et même "envahir le tarmac" et "faire voler n’importe quoi dans un rayon de 5km comme des ballons à l’hélium, des drones, attirer les oiseaux" pour empêcher les avions de décoller.
La force du 10 septembre dépendra de la capacité des organisations syndicales traditionnelles à rejoindre le mouvement sans le dénaturer.
À gauche, les partis oscillent entre soutien et méfiance, redoutant un débordement incontrôlable.
Ce flou est à double tranchant: il peut galvaniser une colère diffuse, mais aussi limiter la lisibilité de la mobilisation.
Et après?
Même si la journée du 10 reste incertaine quant à son ampleur, une autre échéance se profile: le 18 septembre. Les organisations syndicales appellent à une grève nationale. Si "Bloquons tout" s’essouffle, cette date pourrait relayer la contestation dans un cadre plus traditionnel. Si au contraire le 10 réussit, elle amplifiera une crise sociale durable.
Trois syndicats de la SNCF, CGT-Cheminots, Unsa-Ferroviaire et CFDT-Cheminots, ont appelé à la grève le 18 septembre dans un communiqué commun.
Plusieurs syndicats du secteur aérien ont aussi appelé à la grève le 18 septembre, dont le syndicat national des contrôleurs du trafic aérien (SNCTA), majoritaire. Il demande un "rattrapage intégral de l’inflation" en matière salariale, mais aussi une évolution de la gouvernance de la profession.
Chez Air France, Force ouvrière a aussi appelé à "combattre l’austérité" et déposé "un préavis de grève de 1 à 24 heures" pour le 18 septembre. La CFDT a aussi appelé "à la grève sur une journée, le 18".
Un mouvement extrêmement bien structuré
Contrairement au mouvement des "gilets jaunes" de 2018, "Bloquons tout" semble extrêmement bien structuré. Des réunions de calage ont été organisées tout le mois d’août dans des parcs et jardins publics, et même dans des campings, comme l’attestent les échanges sur le réseau Telegram.
Des affichettes, placardées sur les abris de bus et de tram et les panneaux d’affichage, invitent à scanner un QR code pour rejoindre ces groupes. Les journalistes ne sont pas les bienvenus et sont systématiquement exclus par les administrateurs.
Sur ce groupe, des kits de communication sont partagés: créer sa première assemblée générale, puis son assemblée populaire, comment réserver une salle, comment préparer ses réunions.
On y apprend à se répartir les rôles, certains jouant celui de "maître du temps", d’autres celui de "distributeur de parole", "rapporteur", "aigle" (celui qui, du coin de l’œil, observe), "facilitateur".
Des liens vers des formations en ligne sur une chaîne YouTube y sont fléchés. On y apprend comment aborder des passants en faisant du porte à porte, dans la rue, devant des magasins discount, pour les faire adhérer à la cause.
En leur posant trois questions: "Comment ça va (dans ta maison, ton quartier, ta ville)? Comment va la France? Qu’est-ce que tu es prêt à faire dans l’espace public?" "Répliquez ce type d’entretien. Ça fait du bien à ceux que tu aborderas", détaille le "formateur".
La rentrée sociale s’annonce intense en France avec des préavis de grève déposés les 10 et 18 septembre par plusieurs organisations syndicales. Photo Frantz BoutonPhoto Frantz Bouton.
Ingérence russe?
Bloom social analytics, start-up qui décrypte l’activité des réseaux sociaux, a étudié 1,5 million de documents autour de 10 septembre, qui ont généré 60 millions d’engagements et 500 millions de vidéos vues.
"On est quand même sur un sujet massif qui est en train de se développer", analyse Bruno Breton, fondateur de Bloom.
"On a les premières publications autour du 14 juillet, qui émanent essentiellement d’une communauté anti-système, ajoute Matthieu Ponzio, directeur des opérations chez Bloom. À partir de la prise de position de la gauche et notamment, le 16 août, de Jean-Luc Mélenchon, on voit une accélération des publications".
"Ensuite, on est allé regarder dans le détail les communautés qui se sont emparées du sujet, grâce à notre outil qui permet de typologiser les acteurs, les comptes qui prennent la parole sur un sujet. On est, aux deux tiers, sur une mobilisation issue du grand public. On peut dire que c’est un mouvement populaire", poursuit Matthieu Ponzio.
"On a un certain nombre de comptes proches du Kremlin, que l’on connaît bien, qui se sont activés. Certains utilisent des techniques de promotion artificielle de contenus. Mais cette ingérence russe ne représente pas plus de 3% aujourd’hui", veut rassurer Matthieu Ponzio.
Légende sur beaucoup de lignes jusqu’au haut de la photo. Photo Frantz Bouton
Photo Frantz Bouton.
Ils vont se mobiliser... ou pas
Michel, de Toulon, prendra part au mouvement "pour manifester mon mécontentement vis-à-vis des politiques appliquées qui n’ont pour but qu’asservir le peuple pour le bien-être des puissants qui ont perdu tous sens d’humanisme".
Andrée, de Hyères, exprimera son ras-le-bol mercredi: "J’ai 70 ans je suis obligée de continuer à travailler et je continue à payer des charges pour ne bénéficier de rien".
Mae a prévu de passer à l’action "parce que c’est toujours Nicolas qui paye! Parce que j’ai peur pour l’avenir pour mes enfants! Parce que je ne me sens plus en sécurité quand je sors! Parce que j’ai un ras-le-bol général de la vie en France! Parce que j’ai un pouvoir d’achat qui ne cesse de diminuer! Parce que tous les avantages que l’on a acquis et pour lesquels certains se sont battus risquent de disparaître! C’est un cri de colère contre ce gouvernement qui dit nous écouter mais qui n’entend rien! Réveillez-vous, on en peut plus!"
Cathy, de Nice, ne soutiendra pas le mouvement, mercredi, mais "je serai présente à la mobilisation intersyndicale du 18".
Nicolas, de La Seyne-sur-Mer, estime que "cela ne servira à rien mis à part déranger ceux qui ne peuvent pas se permettre de perdre un jour de salaire. Les politiques n’écoutent plus le peuple et font ce qu’ils veulent. Pour preuve le mouvement des « gilets jaunes" qui n’a servi à rien à part dégrader et donner une mauvaise image des grèves alors que nos anciens se sont battus pour ce droit ».
Daniel, de Nice, n’ira pas manifester car, estime-t-il, " rien ne le justifie".
"Le pays n’a pas besoin de ça!", ajoute Thibaud, de Fréjus.
Pour Marie, des Arcs-sur-Argens, c’est non aussi: "Le mouvement est repris voire accaparé par la gauche".
"C’est lancé par LFI, donc je suis contre", explique Gérard, de Cagnes-sur-Mer.
"Qui dit rassemblement dit police et oui j’ai peur des forces de l’ordre" après une mauvaise expérience pendant le mouvement des "gilets jaunes", explique Églantine, de Nice, qui ne participera pas.
"Je n’ai jamais manifesté Je n’ai jamais fait grève. Ceci est juste une lutte de pouvoir politique. Ce n’est en aucun cas une démarche citoyenne pour défendre nos droits, pense Philippe, de Nice. Pour mieux être défendu et être entendu, mieux vaut travailler, avoir une activité, être dans le monde réel. Penser à tous ceux qui n’ont pas la possibilité d’avoir une activité."
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