" On ne ferme pas le livre, on ouvre juste un nouveau chapitre. " Quentin André vient de vivre sa première rentrée comme chef exécutif du Faventia, installé sur le domaine de Terre Blanche, à Tourrettes, dans le Var.
Habitué des cuisines de l’établissement une étoile, il marchait jusqu’à l’été dernier dans les pas du chef Christophe Schmitt.
Mais après le départ de ce dernier, il a pris lui-même les rênes du restaurant gastronomique entre septembre et octobre. Puis, pendant la fermeture annuelle, il s’est attelé à travailler sur la nouvelle carte proposée depuis fin avril.
" On avait sorti une première carte en septembre pour conserver notre étoile, mais depuis la fermeture, on s’est attelé à construire notre histoire ", confie Quentin André.
Alors, avec le chef pâtissier, la sommelière et le responsable de salle, ils se sont posé une question centrale: " Qu’est-ce qu’on veut raconter aux clients ? Qui sommes-nous, comment travaillons-nous? ", poursuit-il.
" Mettre l’humain au centre de l’assiette "
Pas question cependant de balayer ce qui a été fait par le chef Schmitt. " Je reste marqué par les chefs avec qui j’ai travaillé. De Christophe, on a gardé la rigueur, l’exigence. Il a donné un ADN à Terre Blanche. Nous, on a ajouté notre patte. "
En écrivant sa propre histoire, la brigade, dans le sillage de Quentin André, entend "se rapprocher des producteurs, de nos paysans, de nos pêcheurs ou cueilleurs, et mettre l’humain au centre de l’assiette ".
Pour être en accord avec ses convictions – et pourquoi pas pour décrocher une étoile verte – l’équipe du Faventia change également ses habitudes. Plus minutieuse sur le tri, la manière de consommer, de se faire livrer, de recycler: tout a été revu de A à Z.
Et sur la carte, cela se traduit par la présence d’une seule viande et d’un seul poisson. Pour ce dernier, l’équipe s’adapte à la pêche d’Olivier Bardoux, son fournisseur installé à Saint-Raphaël.
" Et derrière, on essaie de s’amuser avec du végétal ", sourit le chef. Un exercice de style pour ce petit-fils de bouchers. Au-delà de la qualité des produits de base, la plus-value vient des sauces, jus et condiments travaillés par Quentin André et sa brigade.
Balade des sens en Méditerranée
" C’est ce qui peut permettre d’amener un plat très loin, mais ça peut aussi le desservir. " Pour accompagner le thon servi lors de notre venue, le jus et le condiment transportaient le plat dans une autre dimension.
" On a un intitulé de menu qui s’appelle Sentiers Méditerranéens. On a voulu proposer une balade au cœur de ce sentier. Il me paraissait intéressant de faire passer le client par l’Estérel, au bout duquel on retrouve notre pêcheur. On a cherché quelque chose qui se rapproche de la couleur de la terre. On est allé vers des agrumes. "
Autre plat, autres saveurs. De la carte qu’il avait proposée de septembre à octobre dernier, Quentin André n’a gardé qu’un seul plat. De quoi ravir la sommelière Aurélie Deharbe. " C’est son plat signature, je voulais absolument qu’il le garde ", souffle-t-elle.
Dans cette assiette intitulée Garriga, le chef prépare les pleurotes de la Serre du Plan à la braise, accompagnés d’un crémeux de champignons et de champignons de Paris. De quoi mettre les papilles en émoi.
" C’est pourtant le plat sur lequel j’avais le moins de certitudes à la base. Je ne suis pas partisan de dire que c’est le chef qui choisit son plat signature. Ce sont plutôt les clients qui le désignent, même si je n’ai pas la prétention de dire que c’est le cas pour moi avec les champignons", confie le chef.
Et comme la différence vient également des détails, et avec l’appui de toute l’équipe, il mise aussi sur le boulanger du domaine pour offrir aux clients des accords "mets et pains" tout au long du repas.
" J’aime comprendre et analyser "
Avec sa cuisine, Quentin André s’est hissé à la hauteur de l’étoile. Une récompense pour celui qui a passé une partie de sa jeunesse en Corse et dont la destinée derrière les fourneaux ne faisait que peu de doute. " Je viens d’une famille avec des grands-pères bouchers et des grands-mères très bonnes cuisinières. Dans la famille, on a toujours eu un rapport à l’assiette assez développé. "
Et comme il confesse n’avoir jamais été très à l’aise sur les bancs de l’école et avoir eu l’envie de travailler de ses mains rapidement, il s’est vite orienté vers les cuisines. À 15 ans, il entre en CAP à Bastia, puis enchaîne huit ans d’écoles hôtelières, jusqu’au BTS.
"J’ai trouvé dans l’école hôtelière quelque chose qui m’a beaucoup plu. Une réflexion différente. J’aime bien comprendre et analyser les choses. Tout cela m’a donné des clés pour appréhender beaucoup d’aspects de ce métier."
Il s’est ensuite formé auprès de chefs comme Christophe Bacquié à Calvi, puis au Château de la Messardière, avant de partir à Courchevel et à l’étranger.
Jusqu’à sa rencontre à Perpignan avec Christophe Schmitt, et leur arrivée ensemble il y a cinq ans à Terre Blanche. Là où il s’est enfin posé et entend bien continuer son ascension.
>> Le Faventia, du jeudi au samedi de 19h30 à 22h. Menu dès 140 euros. Renseignements et réservation sur www.terre-blanche.com
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