C’est le paradoxe tragique de cette affaire.
La famille de Salomé Garnesson est rongée par la culpabilité de ne pas avoir vu qu’elle était en danger de mort alors que l’accusé semble le spectateur détaché de son procès.
Patrick, le père, est hanté par la photographie de son enfant défigurée, abandonnée dans une impasse à Cagnes-sur-Mer. "Ma fille ne savait pas ce qu’était la violence. On l’a élevée dans la liberté", témoigne Muriel, sa mère. Amin Mimouni, 29 ans, l’accusé, lui, reste impassible depuis trois jours malgré les torrents de larmes sur les bancs des parties civiles qui lui font face. Il s’estime injustement détenu. Il a multiplié les demandes de liberté depuis trois ans et demi. Ne s’est-il pas étonné dans un courrier adressé à la juge d’instruction de l’importance donnée à cette affaire? "D’autres choses sont bien plus graves dans ce pays de merde", écrit-il.
L’avocat général Fabien Cézanne s’est chargé jeudi après-midi de lui rappeler la gravité de son crime, un "meurtre par concubin" d’une rare sauvagerie, "une exécution". Le magistrat de l’accusation a requis la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une peine incompressible de vingt-deux ans. "Salomé est un prénom qui signifie la paix. Ce prénom évoquera pour nous celle qui a été battue à mort par son partenaire, retrouvée morte sous un tas d’immondices", ajoute le magistrat.
Le représentant de la société n’élude pas "les négligences professionnelles" d’un policier stagiaire qui ont fait perdre de précieuses minutes à la patrouille de nuit, au moment de l’agression. Mais il rappelle que l’accusé est le seul responsable de la mort de Salomé. En cette Journée internationale des droits des femmes, Fabien Cézanne veut croire que la justice a progressé dans la prise en compte des violences intrafamiliales depuis 2019.
"Demi-aveux"
L’avocat général se concentre ensuite sur "la dangerosité sociale de l’accusé", "sans empathie, sans remords". Avant lui, les avocats des parties civiles ont brossé un portrait tout aussi inquiétant d’Amin Mimouni. "Ces demi-aveux, lundi, arrivent après trois ans et demi de dénégations. Ils sont superficiels, de circonstance", tance Me Laura Lopez. C’est un crime de propriété. [...] Morte, elle lui appartient pour toujours. Je ne vois pas chez lui d’évolution dans son comportement. Il est totalement détaché, distant, froid et n’exprime aucune émotion à l’évocation du calvaire de Salomé."
Me Olivier Giraudo veut croire en la vertu pédagogique d’un procès. L’avocat niçois a l’espoir que le cas de Salomé incitera des femmes à pousser les portes des commissariats, "démarche libératoire" ô combien difficile: "Il faut en moyenne sept à huit allers-retours avant qu’une femme ne parvienne à sortir d’une telle emprise."
Le verdict est attendu ce jeudi.
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