"Je tuerai tous ces fils de p...": un père désespéré et dépressif jugé à Monaco après avoir menacé les employés du foyer Princesse Charlène

Les juges ont tenu compte du malaise vital de ce jeune père dépressif et éthylique, décidé de récupérer son fils, fruit d'un amour éphémère avec une prostituée thaïlandaise.

Jean Marie Fiorucci Publié le 30/05/2025 à 08:15, mis à jour le 30/05/2025 à 08:15
En revanche, le 28 avril dernier un rapport alarmiste des médecins évoque une dégradation psychique de l'enfant et un comportement très perturbé Photo: doc Nice Matin

"Vous avez menacé les éducateurs du foyer de l'enfance Princesse-Charlène d'assassinat, d'empoisonnement. De les tuer! Vous êtes déterminé à vous venger en commettant autant de meurtres parce que ces acteurs sociaux ont pour seule vocation de protéger votre enfant. Il vous a été retiré car il est en grand danger. Il est vulnérable. Alcoolique et dépressif, vous êtes dans l'incapacité d'être un père responsable. L'enfance est sacrée! Et ces mêmes gens que vous voulez massacrer, ne se sont pas constitués partie civile à cette audience, afin de ne pas vous accabler plus encore…"

Le regard courroucé, le président Thierry Deschanels (*) rapporte l'horreur de l'intention affichée, concentrée dans le courriel impulsif-compulsif écrit par le Maralpin arrivé menotté pour être jugé en comparution immédiate. Ce SDF de 32 ans geint longuement. Ses paroles plaintives, entrecoupées de sanglots, expriment à la fois la détresse de douloureuses règles contraignantes d'enfermement, comme de violents éclats de colère. Mais qui est véritablement ce détenu, semeur d'épouvante et d'angoisse?

La mère abandonne l’enfant, un père au RSA et alcoolique

À l'issue d’une formation pour être éducateur, il a séjourné en Thaïlande.

Un enfant naissait d'une relation charnelle avec une prostituée, indifférente au sort de sa progéniture. Le père, au contraire, préoccupé par le développement progressif du bambin, l’a ramené en France le 25 juillet 2024. Si, au début, les processus émotionnel et social s'articulent autour d'une cohérence certaine grâce aux revenus du RSA et des allocations familiales, l'addiction à l'alcool va vite fragiliser la petite cellule familiale et engendrer des traitements anxiolytiques et antidépresseurs chez l'adulte.

D'où l'inquiétude du magistrat sur l'état de santé mentale et les éventuelles conséquences sur sa responsabilité pénale. "L'expertise évoque une vulnérabilité psychique, note le président, avec des symptômes liés à un état présenté cependant sans danger. L'évolution ne nécessite pas d'hospitalisation spéciale. Un accompagnement médico-social apparaît suffisant."

En revanche, le 28 avril dernier un rapport alarmiste des médecins évoque une dégradation psychique de l'enfant et un comportement très perturbé. D'où la réduction drastique des contacts et des visites avec le père.

"Je tuerai tous ces fils de p..."

Cette coercition, incomprise par le père, crée un conflit relationnel où tout est reproche, défiance, méfiance, vengeance. Le géniteur fait état d'atrocités endurées avec des mots affligeants, âpres, meurtriers. Comme "je ne mourrai pas seul, ni pour rien!" Des propos pourtant relativisés par l'auteur depuis le box. « Il n'y a aucune menace, ni passage à l'acte. C'est dicté par ma situation précaire et toujours l'excès démesuré de l'absorption de boisson. Je ne pouvais plus appeler mon fils. Plus le voir! Il pleurait… J'étais harcelé…

- Quand vous aurez enfin un travail, signifie le président, et mis un terme à votre addiction, votre enfant vous sera rendu.

- Je suis désolé, chagriné! Je suis alcoolique, mais pas dangereux. Mon fils pleure en permanence. Il ne mérite pas ça. C'est lugubre… »

Face à cette situation d'extrême violence et d'inquiétude reflétées, le ministère public se concentre sur la convenance des faits. "Après ce florilège de courriels, expose précisément le premier substitut Valérie Sagné, Monsieur menace cet établissement dédié à l'enfance car il voudrait lui prendre son fils. Il fulmine, invective avec des mots atroces qui ont un sens: ‘‘Je tuerai tous ces fils de p…’’ C’est angoissant! Il a fallu sécuriser le foyer Princesse-Charlène."

Une dernière chance pour se reprendre en main et récupérer son enfant ?

Cependant, ce personnage émeut la représentante du Parquet général par sa situation difficile. "La compassion qu'il peut susciter, ne retire en rien les faits reprochés. Requérir du lourd? Je préfère une peine mixte. Deux mois d'emprisonnement, dont un assorti du sursis, la liberté d'épreuve pendant deux ans, l'obligation de soins, afin d'encourager ce père à se reconstruire et reprendre une relation filiale normale." Pour assurer la défense de son client, Me Sarah Filippi va focaliser sur la contrainte sociale.

"Comment en est-on arrivé là, interroge cette avocate habituée aux causes perdues. Personne n'a la réponse. On doit faire face à une enfance mouvementée à cause d'un accident de la vie. La mère est une prostituée qui ne s'est jamais occupée de son bambin, jusqu’à l’abandonner! Alors, cet homme veut offrir un avenir à son fils et il ne le lâchera jamais. Mais, sans emploi et avec un camping-car pour seul domicile, il est rattrapé par la précarité financière. Sa situation administrative demeure un obstacle. Je vois plus de la détresse que des menaces. La prison n'est pas la solution. Redonnez-lui l’espoir de vivre avec le bien-fondé de gérer une famille monoparentale…"

Le tribunal s’est montré favorable avec sa main tendue pour aider ce père à retrouver son fils: un mois totalement assorti de la liberté d'épreuve, l'obligation de soins et de travailler. La protection de l'enfance à Monaco n’est pas une vaine décision.

Assesseurs: Maxime Maillet et Patrice Fey.

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