Le prince Honoré III de Monaco en temps de guerre

En 1742, allié de la France contre l’Autriche, l’Angleterre et la Russie, le prince Honoré III de Monaco mena ses hommes à travers les plus grandes batailles de la guerre de Succession d’Autriche.

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Thibaut Parat Publié le 01/06/2025 à 14:30, mis à jour le 01/06/2025 à 14:55
Que ce soit lors du siège de Namur (photo) ou celui de Mons, le régiment de Monaco s’est distingué à plusieurs reprise. L’effigie du prince Honoré III, son créateur, est visible aujourd’hui encore sur des pièces de monnaie. DR

Retrouvons le prince Honoré III. En 1739, le jeune souverain monégasque constitua le régiment de Monaco qu’il mit, sous son commandement, à disposition du roi de France [voir Monaco-Matin du 25 mai].

Après une année sur les rivages de la Mer du Nord où Dunkerque, morne et grise, endormit sa fougue dans l’ennui des brumes marines, il s’élança en 1742 dans la Guerre de Succession d'Autriche.

La Prusse, la Bavière et la France entendaient s’opposer à la décision de l'empereur Charles VI du Saint-Empire de léguer à sa fille Marie-Thérèse d'Autriche les États de la maison de Habsbourg. L’Autriche s’allia avec la Grande-Bretagne, les Pays-Bas et la Russie. La guerre dura jusqu’au traité d’Aix-la-Chapelle en 1748 à l’issue duquel… Marie-Thérèse monta sur le trône d’Autriche.

La gloire à Mons et à Namur

En 1743, le régiment de Monaco prépara une opération contre l’Angleterre pour aider Charles Édouard Stuart à reconquérir l’Écosse. La flotte appareilla en 1744 mais une tempête l’obligea à rebrousser chemin. La mer, ennemie imprévue, fit échouer l’opération.

En 1745, le régiment de Monaco repartit au combat, vibrant d’impatience, et fut associé à l'armée du Rhin, sous le commandement général du prince de Conti. Mais c’est vraiment en 1746 que le régiment d’Honoré III commença à faire parler de lui.

D’abord au siège de Mons. Ainsi que le rapporte Paul Bastié dans les Annales Monégasques (numéro 45, année 2021), le 24 juin les grenadiers de Monaco, vaillants et fiers, ouvrirent une brèche dans la porte de Berthamont. Ils furent les premiers à la franchir, entraînant derrière eux l’armée française qui parvint ensuite à chasser les Autrichiens et les Hollandais. Trois cents hommes du régiment de Monaco furent tués ou blessés.

Le 19 septembre 1746 commença ensuite la prise de Namur. Relation d’un chroniqueur de l’époque : "Deux compagnies de grenadiers de Monaco, suivies d’une de Rohan, ont glissé vers leur droite, et se sont emparées de la porte de ce côté. Pendant toute l’attaque et même dans le temps que nos grenadiers montaient à l’assaut, la batterie battant en brèche n’a cessé de tirer sur la gauche, mais simplement à poudre, pour tromper l’ennemi. Cette ruse a réussi, nos grenadiers étant arrivés sur eux sans qu’ils s’en soient doutés. Nous leur avons pris 300 prisonniers, en plus de ceux que nous leur avons tués ".

Le prince blessé

Moins d’un mois plus tard, le 11 octobre, le régiment de Monaco intervenait dans la bataille de Rocoux, sur les hauteurs de Liège. Là encore, toute une stratégie fut organisée. Il pénétra sur la gauche dans les vergers d’Ance tandis que le régiment de Picardie attaquait par la droite. Quatre cents hommes du régiment de Monaco furent toutefois mis hors de combat.

Honoré III fut blessé, secouru par un de ses soldats, ainsi que le rapporte le général Susane : "Le sergent Vidal, qui donnait le bras à M. de Monaco pour le conduire au dépôt des blessés, reçut dans ce bras un coup de feu qui le lui fracassa. Vidal, sans s’émouvoir, changea de bras. Prenez celui-ci, mon prince, dit-il, l’autre ne vaut plus rien. Ce brave fut fait officier."

Le régiment de Monaco allait encore agir. Au début de l’année 1747, un détachement de trois cents hommes prit le dessus sur un bataillon autrichien aux environs de Hasselt. Il fit cent cinquante morts et autant de prisonniers.

La bataille de Lawfeld

Mais le plus dur était pour la suite, le 2 juillet 1747, à la bataille de Lawfeld, à l’ouest de Maastricht. Sous un soleil de plomb, le régiment chargea cinq fois. Quatre canons ennemis tombèrent entre les mains monégasques.

Le curé Lanciarez raconte : "Le prince Honoré fut légèrement blessé, après avoir eu un cheval tué sous lui. Alors, ayant abandonné sa cuirasse tandis que tous les officiers supérieurs de son régiment étaient morts ou blessés, il en prit la place, courant à travers les files, encourageant les soldats, et leur faisant observer l’ordre de bataille, comme il convient de le faire pour n’être pas jeté dans la confusion à cause du feu de l’ennemi. "

On compta les victimes : 281 et 518 blessés. Le régiment de Monaco, qui était fort de 1 535 fantassins au départ, était épuisé. Il avait combattu sans relâche pendant quatre ans. Il n’en pouvait plus. Il fut retiré du front.

Après le traité d’Aix-la-Chapelle, le régiment rentra en France, au mois de février 1749. Il changea de main et, commandé par le vicomte Armand de Belzunce, devint le régiment de Belzunce.

Et c’est ainsi que s’acheva la carrière militaire d’Honoré III.

Retour au pouvoir

Abandonnant les champs de bataille pour la sérénité du Rocher, il assuma sa fonction de prince de Monaco. Il n’en oublia pas moins ses obligations militaires vis-à-vis de la France et, en 1762, constitua une marine au service de Louis XV afin de contrarier les agissements de la flotte britannique en Méditerranée.

Il prit en mains les affaires monégasques en 1784 à la mort du chevalier Grimaldi, lequel avait assuré la régence de la Principauté lorsqu’il était monté sur le trône à l’âge de 13 ans [voir Nice-Matin du 18 mai]. Neuf ans plus tard, en 1793, il serait chassé de Monaco par la Révolution.

Mais, vu sa jeunesse au moment de son intronisation, Honoré III demeure à ce jour le prince au plus long règne dans l’histoire de Monaco : 59 ans, deux mois et 12 jours.

L’effigie du prince Honoré III, son créateur, est visible aujourd’hui encore sur des pièces de monnaie. DR.

Le régiment de Flandres

Le Régiment de Monaco, constitué en 1739, fait partie du régiment des Flandres qui, depuis le XVIème siècle avait une longue histoire :

  • 1590 : création de deux compagnies portant le nom de Gardes à pied de Lesdiguières et un régiment d’infanterie portant le nom de régiment de Bonne.
  • 1597 : prend le nom de régiment des Arquebusiers de Créquy.
  • 1611 : change de nom et devient le régiment de Sault.
  • 1703 : est renommé régiment de Tessé
  • 1707 : devient le régiment de Tallard.
  • 1739 : est pris en mains par le prince Honoré III et devient le régiment de Monaco.
  • 1749 : devient le régiment de Belzunce.
  • 1761 : devient le régiment de Rougé.
  • 1762 : prend le nom sous lequel il est le plus connu dans l’histoire, de régiment de Flandre.
  • En 1791, le régiment des Flandes, symbole de l’ancien régime, disparut à la révolution au profit du 19ème régiment d’Infanterie.

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