Mort d'Emile: retour sur ces 10 jours qui ont fait basculer l'enquête dans une autre dimension

De l'annonce de la découverte d'ossements appartenant au petit Emile, disparu en juillet 2023, à l'arrivée, ce lundi au Haut-Vernet de légionnaires du 2e régiment étranger du génie, retour sur ces 10 jours qui ont fait basculer ce fait divers dans une autre dimension.

La rédaction Publié le 09/04/2024 à 19:00, mis à jour le 09/04/2024 à 19:00
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L'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale a été dépêché sur places dès les premières heures de la découverte des ossements appartenant à Emile. Photo AFP

Un nouveau fragment d'os du petit Émile a été retrouvé ces derniers jours par les gendarmes de la section de recherches de Marseille, dans le périmètre des recherches au Haut-Vernet (Alpes-de-Haute-Provence). Dans un même temps, une dizaine de légionnaires du 2e régiment étranger du génie sont opérationnels depuis ce lundi matin 8 avril et participent aux fouilles pour retrouver d’autres traces. 

Après la découverte, samedi 30 mars, du crâne du petit garçon de deux ans et demi, disparu le 8 juillet 2023, les investigations se poursuivent. On rembobine ces 10 jours qui ont permis à l’enquête de franchir une nouvelle étape.

Émile Soleil est mort

Sur un sentier situé à 2,5 km du Haut-Vernet, la macabre découverte a été réalisée entre 12h et 14h le samedi 30 mars. Elle ne sera communiquée à la presse que 24 heures plus tard. Près de 9 mois après la disparition d’Émile, un communiqué du procureur de la République d’Aix-en-Provence met fin à tout suspens: Émile Soleil est mort. 

"Samedi la gendarmerie nationale était informée de la découverte à proximité du hameau du Vernet d'ossements" dont les analyses d'identification génétiques ont permis “de conclure ce dimanche qu'il s'agissait des ossements de l'enfant Émile Soleil”, est-il possible de lire.

En quelques lignes, l’information sort toutes les rédactions de la torpeur classique d’un dimanche de Pâques. Une étape importante dans l'enquête sur sa disparition vient d’être franchie.

Trois jours avant cette découverte, le jeudi 25 mars, une mise en situation, sorte de reconstitution des faits, avait eu lieu pour la première fois au Haut-Vernet, hameau rattaché au village du Vernet, avec son lavoir et sa place, d’où avait disparu le blondinet. Son visage a aussitôt fait le tour des médias.

La randonneuse déplace le crâne de l’enfant… avec un sac plastique

Dans toute découverte, il faut une personne. Dans l'affaire de la mort du petit Émile, malgré les battues millimétrées, les survols en hélicoptères, les observations de drones et le flair des chiens pisteurs, ce rôle sera tenu par une simple randonneuse. Son identité précise, dix jours plus tard, demeure inconnue. Le mystère à son sujet est resté entier, jusqu'à ce que BFM recueille le témoignage ce mardi 9 avril de cette sexagénaire. Mais pour le maire du Haut-Vernet, François Balique, il ne s'agit vraisemblablement pas d'une de ses 150 administrées. "Elle n’a pas pris le chemin dans le sens où les Vernetois le prennent", assure-t-il.

Ce sentier, cette promeneuse l'avait déjà emprunté un mois plus tôt. Sans rien apercevoir. Comme tant d’autres habitants du hameau. Cette fois, sa trouvaille a fait basculer une affaire, à l'arrêt depuis près de 9 mois. Mais a aussi provoqué un émoi dans l'opinion publique. Et pour cause, elle a placé le crâne dans un sac plastique, avant de le ramener chez elle et de contacter la gendarmerie de Seyne-les-Alpes. 

Un geste incompréhensible pour certains. Mais qui s'explique. "Perturbée par sa découverte", évoquera sobrement le procureur de la République d'Aix-en-Provence. Elle confiera tout simplement ne pas avoir "de téléphone portable".

Une intention, qui, selon le colonel François Daoust, ex-patron de l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale n'a pas compromis l'enquête. "Le crâne n’a plus de peau, de cheveux, plus rien. Elle le met dans un sac plastique, le peu de traces qui restait autour du crâne n’a pu être pollué."

Les enquêteurs multiplient les allers et venues dans le hameau du Haut-Vernet. Photo AFP.

Les pistes restent ouvertes: le procureur n’exclut rien

72 heures après la découverte du crâne, c'est peu dire que la conférence de presse organisée mardi 2 avril par Jean-Luc Blachon, procureur de la République d'Aix-en-Provence, est attendue. Les premières analyses menées sur le crâne d’Émile et par les experts dépêchés sur le terrain pour essayer de comprendre ce qui a pu se passer, doivent y être livrées. 

À son terme, demeure, pour certains, l'impression que la montagne a accouché d'une souris. L'aspect des os du crâne, qui présente "de petites fractures et fissures post-mortem", ainsi que "des traces de morsures par un ou des animaux", "ne permet pas de dire quelle est la cause de sa mort", affirme le magistrat. "Mais aucun traumatisme ante mortem n'a été observé", insiste-t-il.

A la description géographique et topologique de la zone – à “environ 25 minutes du village à marche d’homme”, sur un sentier présentant “une très forte déclivité” de 30%–, Jean-Luc Blachon annonce que le tee-shirt, les chaussures et la culotte appartenant à l’enfant ont été retrouvés “en contrebas” du chemin, “éparpillés sur quelques dizaines de mètres”.

Chute accidentelle, homicide involontaire, meurtre? Toutes les pistes restent ouvertes, "même si ce n'est satisfaisant pour personne, ni pour la famille, ni pour les enquêteurs, ni pour les juges d'instruction".

Les grands-parents apprennent les avancées de l'enquête à la télévision

Comme l’a dit le procureur de la République, ces premières conclusions ne sont satisfaisantes pour personne. Certainement pas pour la famille du garçonnet, qui vit depuis l’été 2023 au rythme de l’enquête, du harcèlement médiatique et d’accusations infondées.

Douleur supplémentaire: selon nos informations, ses grands-parents n'auraient pas été informés en amont de la teneur de la conférence de presse, apprenant en direct à la télé, minute après minute, les avancées de l'enquête. Comme des personnes lambda. 

"Ils sont dans l’incompréhension après cette conférence de presse, et dans l’envie de réponses. Mais ils sont aussi dans la peur des réponses, et dans celle de ne pas savoir, commente sobrement Me Isabelle Colombani, avocate de la famille au bureau de Draguignan. “On peut comprendre tous ces sentiments.”

Du côté des parents, qui vivent à La Bouilladisse, dans les Bouches-du-Rhône, seul un communiqué, publié quelques heures après l’annonce de la découverte d’ossements, a rompu le silence qui entoure cette famille, réputée catholique et très pratiquante.

"Si cette nouvelle déchirante était redoutée, l’heure est au deuil, au recueillement et à la prière", ont réagi Marie et Colomban Soleil, les parents d’Émile. Ils “savent désormais en ce dimanche de la Résurrection qu'Émile veille sur eux dans la lumière et la tendresse de Dieu", y est-il écrit. "Mais la douleur et le chagrin demeurent.”

Emile Soleil, 2 ans et demi, avait disparu le 8 juillet 2023. Photo DR.

Des enquêteurs lancés à la recherche du "point zéro"

Ancien commandant de la compagnie de gendarmerie de Nice, le général François Daoust est une référence dans le petit monde de la criminologie. La conférence de presse, lui aussi, il l’a suivie. À juste titre.

Après des postes de commandement en gendarmerie, il est devenu expert, chef de division criminalistique, mais aussi directeur de l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale, l'IRCGN. Pour rappel, c’est cet Institut qui a été dépêché dès le lundi 1er avril, quelques heures après l'annonce de la découverte des ossements. 

"Contrairement à ce qu’on pouvait imaginer, le crâne n’a pas été déposé là dans l’intention qu’il soit retrouvé", expliquait-il dans nos colonnes, au lendemain de la prise de parole du procureur de la République d'Aix-en-Provence. "On est bien dans le déplacement des restes du corps du fait des derniers épisodes méditerranéens. Les restes ont été emportés et dispersés par le ruisseau."

A ses yeux, le lieu de découverte du corps ne peut pas correspondre au point initial. Comme il l’explique, le travail est désormais de définir le “point zéro, largement en amont de là où on a trouvé les premiers restes”.

Les fouilles se poursuivent. Photo G.L..

Des habitants qui ne veulent pas rester avec des interrogations

Dix jours après la découverte des premiers ossements, les braqueurs ont de nouveau projeté leur lumière sur Le Vernet et son hameau du Haut-Vernet. En moins d'un an, cette affaire a placé sur la carte des faits divers cette paisible commune des Alpes-de-Haute-Provence de 150 âmes à peine.

Des habitants qui vivent au rythme des avancées de l'enquête, des passages des journalistes, et qui observent avec attention, plus que jamais, les derniers développements des recherches.  

“Scotché” devant sa télé le soir de la conférence de presse, Christian Mollet, habitant du Haut-Vernet interrogé par Nice-Matin, espère qu’on ne les laissera pas “le bec dans l’eau. J’espère qu’on ne va pas nous laisser avec nos interrogations.” 

"Pour le village, si on ne sait pas, ça va laisser des points d’interrogation terribles. Il va falloir continuer à vivre avec tout ça, c’est très lourd.”

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