À 81 ans, la réalisatrice Josée Dayan n’a rien perdu de son verbe. Débit mitraillette, tout doit aller vite avec la metteuse en scène et créatrice de la collection Capitaine Marleau dont le 39e épisode est diffusé ce vendredi sur France 2. Tout a commencé en 2013 alors que Josée Dayan réalise la fiction Entre vents et marées dans laquelle Corinne Masiero est introduite sous la dégaine atypique du Capitaine Marleau, une flic sans filtre, aux jeux de mots supersoniques et au sens de l’observation aiguisé.
Très friande du personnage de Marleau, Dayan tire la manche d’Anne Holmes, la directrice de la fiction de France Télévisions et lui propose un projet un peu fou: faire naître une collection autour de Marleau/Masiero. "J’ai eu une vision, il fallait faire une série autour de ce personnage, se souvient Josée Dayan. Ce n’était pas évident car Corinne n’était pas très connue, son personnage est atypique et cela pouvait être une aventure hasardeuse mais j’y croyais. Pour que cela marche, il fallait une star pour lui donner la réplique à chaque épisode, éviter une forme d’habitude, c’est l’ADN de la série. Très vite, il y a eu Gérard Depardieu, puis Isabelle Adjani et le public est vite tombé accro."
Corinne Masiero, l’improvisation contrôlée
Les téléspectateurs découvrent petit à petit ce personnage haut en couleur, à l’accent très prononcé du Nord, à la chapka et aux bottes chevillées au corps. Les guests s’enchaînent mais Masiero s’installe définitivement comme la star de la collection. "Elle est dotée d’une inventivité hors norme, souligne Dayan. Elle a des moments troublants, des fulgurances, elle a beaucoup de références et écrit énormément ses improvisations. Quand elle se livre à vous, en toute confiance, c’est un bonheur."
Entre les deux femmes, qui ont plus de 40 projets en commun à leur actif, pas de lien fusionnel prononcé. "On ne se voit pas en dehors des tournages, dit simplement Dayan. Mais elle s’abandonne à moi quand on est sur un plateau. Il y a une vraie estime professionnelle mutuelle. On ne fait pas 40 épisodes d’une série avec quelqu’un sans un minimum de confiance."
Dayan a une certaine réputation. Elle ne tourne pas autour du pot, est directe et travaille vite (quinze jours par épisode de Marleau, par exemple). "J’aime tourner dans l’urgence, ne pas prendre le temps de respirer pour ne pas que mes acteurs s’éparpillent trop vite. J’aime travailler ainsi, cela permet de garder tout le monde concentré constamment." Pour ne pas tomber dans le confort, Josée Dayan sait comment s’y prendre. "Il faut renouveler les interprètes. Là, sur le dernier opus, j’ai travaillé avec Florence Thomassin qui est très émouvante et Catherine Hiegel que l’on ne présente plus. Et puis j’ai découvert Philippe Bas, un vrai coup de cœur. C’est l’avantage du format avec Corinne qui est un électron libre et autour duquel on doit faire évoluer de nombreux personnages à chaque épisode."
Le cinéma dans le sang
D’autant que la légende raconte que de très nombreux acteurs lèvent le doigt pour se pointer dans Marleau. Une aventure naturelle pour Dayan qui, dès l’âge de 7 ans, savait qu’elle allait embrasser le métier de réalisatrice. "J’avais cette intime conviction, avoue-t-elle. C’est inexplicable, je voulais faire ce métier et même après 60 ans de carrière, chaque film est une nouvelle aventure, il faut se remettre en cause en permanence. J’ai une admiration profonde pour Orson Welles qui, à 25 ans, réalise un chef-d’œuvre comme Citizen Kane et qui va, malgré tout, connaître des échecs par la suite. J’ai fait beaucoup de choses au cours de ma carrière, notamment des adaptations littéraires à succès comme Le Comte de Monte-Cristo, Les Rois maudits, Diane de Poitiers ou Balzac mais l’aventure Marleau est particulière dans ce parcours, c’est une série atypique, originale." C’est surtout l’histoire d’une rencontre avec Corinne Masiero, une actrice inclassable tout comme peut l’être Josée Dayan.
ce vendredi à 21h10, sur France 2.
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