Hausse des températures, espèces, pêche... Ces six scénarios qui dessinent l’avenir de la Méditerranée
Plan Bleu Sans bifurcation majeure, notre mer Méditerranée s’expose à un futur alarmant. Les +2 °C seront atteints plus tôt que prévu. Canicules terrestres et marines vont déstabiliser des équilibres fragiles. Dès 2050.
Article réservé aux abonnés
Sonia Bonnin et Flora ZanichelliPublié le 13/06/2025 à 06:45, mis à jour le 13/06/2025 à 07:38
Le tourisme de masse, autre point de préoccupation, d’ici 2050.Photo J.-F. Ottonello
Ce sera un grand bouleversement. Et sur la Méditerranée, le bouleversement qui vient percutera un milieu déjà vulnérable. C’est ce que montre la synthèse "MED 2050", un état des lieux doublé d’une prospective à l’horizon de la moitié du siècle présenté à l’occasion de l’Unoc.
À l’échelle des mers du globe, la Méditerranée est une goutte d’eau, mais elle est aussi "un laboratoire à ciel ouvert", tant les pressions humaines qui s’y exercent et les effets des changements climatiques y sont démultipliés.
Des tendances lourdes
Après l’Arctique, la Méditerranée est la région du monde qui se réchauffe le plus vite et le plus, 20% de plus qu’ailleurs.
"Ce qu’on attendait pour la fin du siècle sera là en 2050, pointe Guillaume Sainteny, président du Plan Bleu. En regardant notre précédent exercice de prospective réalisé en 2005, nous notons que certaines tendances sont plus rapides qu’attendu."
En premier lieu, "la hausse des températures devrait dépasser les 2°C dès 2040 pour atteindre 2,3°C dès 2050", décrit le rapport, soit vingt ans en avance sur ce qui était projeté. "Cela va accroître la rareté de l’accès à l’eau douce, alerte Guillaume Sainteny. Avec des conséquences sur les populations et l’agriculture."
Dans le même temps, le nombre d’habitants continuera de grossir de 20 à 30% sur ses rives.
"Mer la plus polluée par les plastiques, la plus surexploitée en termes de pêche, énoncent les experts, la Méditerranée de 2050 ne sera plus celle d’aujourd’hui". Sous l’influence de canicules marines plus fréquentes, l’arrivée de nouvelles espèces va se confirmer, mais aussi "la perturbation du plancton et la prolifération des méduses".
"Les problèmes sont tellement nombreux et imbriqués qu’il convient de passer à une action systémique", décrit le président du Plan Bleu, organe du plan d’action pour la Méditerranée, au sein du programme des Nations-Unies pour l’environnement.
La perspective d’une "action collective et volontariste" peut sembler utopique, mais le Plan Bleu en lui-même réussit déjà le tour de force de réunir, de façon stable, "des pays officiellement en guerre, qui arrivent pourtant à se mettre d’accord".
Des espèces vont disparaître
Mer fermée, la Méditerranée est parmi les plus polluées par les plastiques.Photo Cyril Dodergny.
Numérotés de 1 à 6, les scénarios dessinent trois trajectoires pessimistes, et trois autres davantage positives. "Dans le cas du scénario 1, explique Denis Lacroix, vice-président du Bureau du Plan Bleu, en charge de la Prospective, on a imaginé que c’était l’inertie qui prédominait et que donc, pas grand-chose ne changeait alors que les problèmes s’accentuaient. En revanche, dans le scénario 6, nous avons imaginé que la mer Méditerranée était reconnue comme bien commun mondial."
Avec toutes les protections que cela implique. Un travail collectif bénéfique pour l’ensemble de la zone méditerranéenne. Car "il va y avoir une modification des écosystèmes, explique Denis Lacroix. Certaines espèces comme les moules, les huîtres voire même les palourdes, vont être amenées à disparaître." Entre autres.
Quelle est notre situation?
"Actuellement, remarque encore Denis Lacroix, nous nous inscrivons dans le scénario 1 et le scénario 3." Ce dernier envisage une Méditerranée "éclatée" où "la croissance économique et les intérêts nationaux sont les seuls moteurs, limitant la coopération et conduisant à une exploitation intensive des ressources et une fragmentation accrue de la région".
Parmi les préoccupations les plus importantes: l’augmentation de la population du bassin méditerranéen et ses conséquences sur la gestion des ressources mais aussi le risque d’urbanisation accrue.
"La Méditerranée, à savoir la région méditerranéenne est la région qui concentre le plus de population au monde en situation de stress hydrique. Celui-ci engendre également des problèmes, notamment, par exemple, dans la gestion des incendies", commente Denis Lacroix en projetant une carte où la Grèce et l’Italie apparaissent en rouge, là où, il y a deux décennies, elles étaient en vert et en orange. "Certaines destinations sont à risque en raison de l’afflux de touristes, comme Venise ou Santorin, étouffées par le poids des visiteurs."
Comment agir?
Miser sur le collectif reste la solution la plus pertinente, selon les experts. C’est le principe avancé dès le scénario numéro 5. Ce dernier prône une transformation profonde vers une "durabilité forte", équilibrant les relations Nord-Sud et s’appuyant sur l’implication des territoires et sociétés civiles pour un écodéveloppement. "Nous avons un socle commun, patrimonial, culturel sur lequel nous appuyer", explique encore Denis Lacroix.
"On ne sauvera pas des espèces qui disparaissent parce que la température de la mer augmente, poursuit le scientifique. En revanche, on peut aménager les pêcheries, on peut aménager le tourisme à l’égard du tourisme durable, pas du tourisme de masse destructeur. Peut-être enfin découvrir que notre planète est finie et qu’on doit partager ses limites, au lieu de se jeter dessus de manière très prédatrice."
MED 2050, La Méditerranée à l’horizon 2050, Une prospective du Plan Bleu, mai 2025
commentaires
ads check
“Rhôooooooooo!”
Vous utilisez un AdBlock?! :)
Vous pouvez le désactiver pour soutenir la rédaction du groupe
Nice-Matin qui travaille tous les jours pour vous délivrer une
information de qualité et vous raconter l'actualité de la Côte d'Azur
Et nous, on s'engage à réduire les formats publicitaires
ressentis comme intrusifs.
Si vous souhaitez conserver votre Adblock vous pouvez regarder une seule publicité vidéo
afin de débloquer l'accès au site lors de votre session
Nous avons besoin de vos cookies pour vous offrir une expérience de lecture optimale et vous proposer des publicités personnalisées.
Accepter les cookies, c’est permettre grâce aux revenus complémentaires de soutenir le travail de nos 180 journalistes qui veillent au quotidien à vous offrir une information de qualité et diversifiée. Ainsi, vous pourrez accéder librement au site.
Vous pouvez choisir de refuser les cookies en vous connectant ou en vous abonnant.
commentaires