C’était hier. Ou plutôt avant-hier. Au beau milieu du siècle dernier. Il y a une éternité, ou presque.
En juillet 1955, seulement quelques jours après avoir créé la société des Automobiles Alpine, Jean Rédélé présente ses trois premières A106 à la direction de la Régie Renault: une bleue, une blanche, une rouge positionnée devant le bâtiment historique de Boulogne-Billancourt.
Ce patriotique clin d’œil fait mouche. Le jeune entrepreneur normand qui ambitionne de mettre en route une marque sportive française basée sur des mécaniques Renault obtient le soutien de la firme au losange.
Ainsi débute une épopée riche en succès et en défis. Une aventure à la fois humaine et industrielle qui, sept décennies plus tard, continue à s’écrire au présent et au futur.
Voilà trois semaines, les 30, 31 mai et 1er juin, 150.000 passionnés du A fléché ont convergé vers le berceau dieppois, théâtre de la célébration en grande pompe du 70e anniversaire autour des plus de 1.700 Alpine d’hier, d’aujourd’hui et de demain réunies sur les pelouses et le front de mer. Maintenant que les bougies sont soufflées, il ne manque plus que la cerise sur le gâteau.
Et si c’était ce week-end? Aux 24 Heures du Mans et nulle part ailleurs? Top départ ce samedi 14 juin à 16h pour la 93e édition d’un double tour d’horloge dont la catégorie reine brille de mille feux, plus que jamais, avec 21 Hypercars représentant huit constructeurs.
Si le "cavallino rampante" Ferrari, éblouissant vainqueur en 2023 et 2024, rime avec favori... Si le géant nippon Toyota, intouchable lors des cinq éditions précédentes, de 2018 à 2022, fait figure de principal rival... Qui sait si une bonne surprise ne pourrait pas jaillir du groupe compact des outsiders, où l’on se bouscule au portillon?
Parmi ceux-ci: Porsche, BMW, Cadillac et... Alpine qui peut légitimement rêver d’un retour au sommet, 48 ans après le mémorable triomphe de l’A442 B du tandem Pironi-Jaussaud.
Six petites heures et puis s’en vont...
Évidemment, dans les rangs de l’équipe conduite par Bruno Famin, personne ne claironne une telle ambition.
"L’objectif, c’est de ne pas avoir de regret dimanche à 16h", glisse le directeur d’Alpine Motorsports, en soulignant dans la foulée qu’il faut "aborder cette course extrêmement compliquée avec beaucoup d’humilité".
Le souvenir du come-back raté en terre sarthoise il y a douze mois demeure ancré dans les esprits. Trahies par leur moteur, les deux A424 avaient baissé le pavillon bleu avant même la tombée du jour. Six petites heures et puis s’en vont...
Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts. Après avoir trouvé le chemin du podium au Japon (3e des 6 Heures de Fuji) et pris la 4e place du championnat constructeurs, l’hiver fut mis à profit pour plancher sur la fiabilisation du bloc V6 3,4l turbo Mecachrome.
Côté pilotes, Nicolas Lapierre a raccroché le casque et intégré l’état-major en qualité de directeur sportif. Et afin d’épauler Mick Schumacher et Jules Gounon (A424 N°36), on s’est adjoint les services du très aguerri Frédéric Makowiecki, 44 ans, transfuge de chez Porsche.
Et les résultats suivent: 3e à Imola, 3e à Spa. Dans les Ardennes belges, Schumi Junior et ses partenaires se sont même sérieusement rapprochés de la référence Ferrari. Sans une crevaison lente, peut-être auraient-ils fini plus haut, voire tout en haut...
Ce samedi, ils s’élanceront du 9e rang de la grille tandis que l’autre LMDh à châssis made in Var chez Oreca, la N°35 confiée à Paul-Loup Chatin, Ferdinand Habsburg et Charles Milesi, décollera en 12e position.
"On est fier d’afficher le logo A70 symbolisant le 70e anniversaire d’Alpine sur les autos et on a envie de faire honneur à cette décoration spéciale", martèle Philippe Sinault, un team manager impatient d’en découdre.
Nul doute que ce ne sera pas du gâteau. Mais il y a bel et bien une sacrée cerise à cueillir là-bas, au bout de l’effort XXL...
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