Pas facile de réussir à caser une tournée de théâtre - riche de plus de 90 dates - quand on est déjà impliqué dans une série quotidienne sur TF1, c’est le cas du duo Catherine Marchal-Alexandre Brasseur, tête d’affiche de la pièce Un grand cri d’amour, issu du film de et avec Josiane Balasko sorti en 1997, ce mardi soir à Mandelieu, ce mercredi soir à Brignoles, avant des dates à Carqueiranne, Eze et Ramatuelle.
L’actrice est engagée sur la quotidienne Ici tout commence sur TF1 quand Alexandre Brasseur, lui, est la tête d’affiche de Demain nous appartient, également diffusée sur la même chaîne.
"L’avantage d’une tournée théâtrale, c’est que l’on connaît les dates un an à l’avance, lance Alexandre Brasseur, il faut juste jongler avec les différents emplois du temps, c’est plus contraignant pour nos familles."
"C’est une année chargé, fatigante, on ne fait pas des métiers ordinaires", poursuit Catherine Marchal.
"On y aborde l’ego mal placé des comédiens"
Cela fait six semaines que le duo n’a pas joué Un grand cri d’amour, une pièce mise en scène par Eric Laugérias, autour d’un couple d’artistes qui, après avoir vécu le grand amour et travaillé ensemble, ne peut plus se voir. Sauf que le hasard de la vie les oblige à collaborer de nouveau ensemble...
"On y aborde les ego mal placés des comédiens, l’envie irrationnelle d’être aimé", analyse Marchal qui campe Gigi Ortega, le rôle incarnée par Josiane Balasko puis Michèle Bernier. "Je me suis inspirée de personnages très années 1990 comme Arielle Dombasle et Amanda Lear, ensuite, le texte permet de faire le reste."
"C’est une excellente idée d’avoir fait appel à Catherine pour ce rôle, lance Brasseur. Elle prend parfaitement le contre-pied de Josiane et Michèle qui avaient inscrit le personnage dans l’imaginaire collectif. On en a beaucoup parlé car elle n’était pas sûre alors qu’elle a tout pour emmener le personnage où elle le voulait."
Le duo, qui se connaissait depuis plusieurs années, n’avait encore jamais œuvré de pair. Et au théâtre, tout est différent. "On est plus dans l’intimité, on vit plus ensemble car on partage la loge, les repas, les hôtels, les trajets, il y a une vraie promiscuité physique, il faut accepter de tout partager", confesse l’actrice.
"Ce métier, c’est une quête impossible"
Même son de cloche chez Alexandre Brasseur qui a également mis le partage au cœur de tout. "Le théâtre peut être une aventure longue et compliquée si le partage et le plaisir de l’écoute de l’autre ne sont pas au rendez-vous. On fait un travail communautaire, il faut s’ouvrir à l’autre, s’adapter, on change souvent de partenaires de jeu, de metteurs en scène. J’ai travaillé avec Eric Rochant sur Le Bureau des légendes, ça n’a pas été simple, il n’est pas forcément sympathique sans que cela soit péjoratif mais il m’a fait énormément progresser dans le dépouillement, le non-jeu. Pareil pour Daniel Colas avec qui j’ai beaucoup travaillé au théâtre, il a fait en sorte de m’enlever des béquilles d’acteur, c’était douloureux car c’est comme une mise à nu mais c’était essentiel. Ce métier, c’est comme la chanson de Jacques Brel, l’inaccessible étoile, c’est une quête impossible, on n’est jamais parfait, on prend notre bâton de pèlerin et on cherche cette vérité."
Le théâtre, joué sans filet, permet cette remise en question permanente. "On ne fait jamais la même chose, c’est comme un moteur de F1 sur lequel on opère des micro-ajustements, analyse Catherine Marchal. Ce n’est jamais le même spectacle, le public nous permet de faire des ajustements aussi. A Mandelieu, on (a) joué en plein air, avec des micros, cela demande une légère adaptation technique."
"Je redécouvre encore le texte de Josiane Balasko, poursuit Brasseur. À force de faire des Italiennes en faisant mon jogging je prends la mesure de certains non-dits, sur la problématique des enfants entre les deux personnages principaux. C’est ce qu’il y a de formidable avec le théâtre, c’est que rien n’est jamais acquis."
"Il y a des soirs où, sur scène, on est touché par la grâce et d’autres où on est sur nos acquis mais sur cette tournée, pour le moment, on est sur une espèce d’unanimité du public, tout le monde se marre", conclut Catherine Marchal. Le public varois et azuréen est prévenu, la troupe d’Un grand cri d’amour arrive motivée.
"Un grand cri d'amour", ce mercredi à Brignoles (21h, place Saint-Pierre), ce jeudi à Carqueiranne (21h, Auditorium de Clair-Val), le 5 août à Eze (21h, Oppidum du Col d’Eze) et le 6 août à Ramatuelle (21h, Théâtre de Verdure).
1. Une répétition sans mettre le ton, d’une voix neutre qui permet aux acteurs de mémoriser leur texte sans se fatiguer.
Le Var, terre d’adoption de la famille Brasseur
Alors que Catherine Marchal confesse avoir de nombreuses attaches passées dans les Alpes-Maritimes - "J’ai passé tous mes étés d’enfance à Vence chez mes grands-parents, ainsi qu’à Tourrettes-sur-Loup, je garde de très bons souvenirs de mes passages à la fondation Maeght" -, Alexandre Brasseur, lui, est intimement lié à la région.
Tout a débuté durant l’hiver 1943 où des artistes résistants(1) se cachent dans un ancien prieuré de Tourrettes-sur-Loup pour y écrire, en clandestinité, Les enfants du Paradis, un film mythique sorti durant l’occupation et dans lequel Pierre Brasseur, le grand-père, y campe un rôle majeur. Un film culte qui va inspirer un seul en scène à Alexandre en 2016: Brasseur et les Enfants du paradis.
Mais c’est surtout dans le Var que les Brasseur vont s’établir. "J’ai été baptisé à Grimaud où vivait ma grand-mère, mon grand-père avait une maison à Gassin qu’il avait construite de ses propres mains et que nous avons gardée, c’est une zone géographique qui me tient à cœur. Le Festival de Ramatuelle, où nous allons jouer le 6 août est un lieu intime pour moi pour plusieurs raisons: j’y ai joué avec mon père, Claude, et Jean-Claude Brialy, l’un des créateurs du festival, était mon parrain de théâtre, donc ça sera forcément une date chargée en émotion."
Malgré ses attaches très enracinées dans le Var, Alexandre Brasseur savoure ses dates maralpines également. "Je suis touché qu’Eze lance un nouveau festival de théâtre et fasse appel à notre pièce avec Catherine, je connais David Brécourt, le directeur artistique de l’évènement, c’est un passionné de théâtre et le lieu est sublime", conclut l’acteur.
1. Jacques Prévert, auteur antimilitariste, Marcel Carné, réalisateur homosexuel avec Alexandre Trauner et Joseph Kosma, décorateur et compositeur juifs-hongrois.
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