Saturation et immobilisme. Le constat de la FEDEM en cette rentrée est sans appel. Il se lit dans tout le numéro du trimestriel édité par la Fédération des entreprises monégasques qui se targue de mettre "les pieds dans le plat" sur la question du transport et des logements. Et les chefs d’entreprise en ont rajouté une couche ce mardi matin en convoquant la presse pour "prendre l’opinion publique à témoin et que les choses changent", se justifie leur président, Philippe Ortelli.
Dans son viseur, les routes saturées pour venir en Principauté, le transport ferroviaire chaotique, le manque de logements pour actifs dans les communes limitrophes. "Nos salariés galèrent au quotidien pour venir à Monaco. Depuis plus de dix ans, aucune infrastructure de transport ou de logements d’actifs n’a été vraiment mise en œuvre. Le gouvernement repousse les décisions structurantes. Et les conséquences de cette imprévoyance, ce sont des heures bloquées sur les routes ou dans les transports, des salariés qui craquent. Une absurdité économique, écologique, humaine."
"Des conditions humaines et décentes"
Face à ces problèmes, l’équipe de la FEDEM estime s’être tue "trop longtemps" en essayant de ménager la chèvre et le chou. Et dévoile un projet retravaillé ces derniers mois par la fédération: celui de la faisabilité d’un métro qui desservirait tout l’Est du littoral des Alpes-Maritimes jusqu’à la frontière italienne. Une ligne souterraine, étendue sur une trentaine de kilomètres entre l’aéroport Nice-Côte d’Azur et Vintimille. Et qui compterait une dizaine d’arrêts dans Nice et Monaco principalement.
Un serpent de mer souvent évoqué ces dernières années que le patronat monégasque entend pousser à sa concrétisation pour assurer la pérennité économique de la Principauté. "Le train et la route sont saturés. Et nos 50.000 salariés par jour, il faut les faire entrer et sortir dans des conditions humaines et décentes, estime Philippe Ortelli. L’économie monégasque est formidable et crée plus de 1.000 emplois par an. En dix ans, nous avons enregistré 15.000 salariés supplémentaires mais les façons de venir travailler à Monaco sont le problème principal pour notre attractivité." Entre le manque de fiabilité du train, les embouteillages quotidiens sur la route et les loyers élevés dans les communes limitrophes, le compte est vite fait. Et peut faire douter des actifs de venir travailler en Principauté.
"Nos infrastructures ne correspondent plus aux besoins"
"Notre vivier de population active se trouve à Nice (17.000 salariés monégasques y résident) ou côté italien, et nos infrastructures actuelles ne correspondent plus aux besoins, ni à ceux du futur, renchérit le vice-président de la FEDEM Henri Leizé. Notre modèle économique n’est pas prévu pour être en croissance zéro. On est dans une situation qui nécessite l’emploi. Mais en termes de logement, dans les communes limitrophes ce sont plus des résidences secondaires qui se développent que des appartements pour actifs. La mer n’est pas un bon moyen de transport, le train sera vite limité. On ne peut pas agrandir les routes. Et le télétravail ne règle pas les problèmes car il implique que le salarié vienne à Monaco régulièrement."
Une démonstration qui place le projet de métro comme solution numéro 1. "Nous devons réadapter les infrastructures à ce qu’est devenu Monaco", complète Fabien Deplanche, président de la Chambre patronale du bâtiment pour qui la Principauté doit se fixer l’objectif de 100.000 salariés à l’horizon 2060. "On doit se donner les moyens de faire perdurer la réussite de notre modèle socio-économique. Il y a plus de cinquante ans, l’enfouissement de la gare de Monaco, pour libérer du foncier à haute valeur ajoutée, a été une vision porteuse à long terme. On ne peut pas continuer à vivre sur des infrastructures adaptées à personne."
Un projet à 4 milliards d’euros
En cette rentrée, marquée par la prise de fonction d’un nouveau ministre d’État, l’équipe de la FEDEM estime qu’il est temps d’agir pour lancer des études et réfléchir au financement d’un projet pharaonique estimé à 4 milliards d’euros.
"La croissance économique du pays a besoin de 1.000 emplois par an encore dans les vingt prochaines années pour le système de retraite et pour la TVA. Et que met-on en place aujourd’hui pour faire que cette croissance se passe dans de bonnes conditions humaines et écologiques? Les embouteillages ce sont des dizaines de milliers de tonnes de Co2 par an", questionne Philippe Ortelli. Pour ce dernier, le frein n’est ni technique, ni financier. Seule de la volonté politique fera la bascule "On a loupé une fenêtre de tir en 2020 quand les taux étaient extrêmement bas pour un projet entre Nice et Monaco, où les deux parties étaient favorables. Maintenant il faut du courage politique, souffle-t-il. Le même courage politique qu’a eu le prince Rainier III qui a eu la volonté de percer le tunnel de l’A500. Imaginez si on devait encore aujourd’hui emprunter les petites routes pour rejoindre l’autoroute à La Turbie!"
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